Dix défaites pour commencer, seulement cinq victoires en 18 matches dans une saison à trois descentes… L’exercice 2023-2024 du Basket Club Maritime, qui reçoit Dijon samedi (21h00), avait déjà tout d’une galère, voire d’une saison noire. Il a tourné au cauchemar le 25 décembre, quand Sportica, sa salle, a disparu dans les flammes, emportant avec elles près de quarante ans d’histoire.

«Ç’a été un drame. C’est comme la perte d’un être cher. Je n’ai pas encore fait le deuil, je suis resté très longtemps dans le déni. Je ne réalisais pas ce qui nous arrivait.» lâche Hervé Beddeleem, directeur sportif du club dans lequel il occupe des fonctions depuis sa création en 1984. C’est dans cette salle de 3.000 places, très grande si on la rapporte aux 11.000 habitants de Gravelines, ville située le long de la mer du Nord, que le BCM s’entraînait et disputait ses matches en Élite.

«Mentalement, on a pris un coup avec l’incendie de Sportica, souffle Marie-France Louf, présidente des Irréductibles, une association de supporters. Je me sens SDF. On n’a plus de salle.» Plus qu’une salle, c’est «un emblème» que la ville a perdu, selon cette supportrice de 77 ans, tatouage du blason du club qu’elle soutient depuis soixante ans sur le bras droit.

Mais une fois les flammes éteintes et les larmes séchées, il a fallu revenir au jeu pour tenter de sauver ce club historique du basket français, au maigre palmarès (une Coupe de France en 2005) mais en première division depuis 1988 sans discontinuer. Très vite, une vague de solidarité locale a permis au BCM de poursuivre sa route, un peu plus loin. Les joueurs s’entraînent désormais dans les infrastructures du club de Loon-Plage, à quelques kilomètres de Gravelines. «Une aubaine», selon l’entraîneur Jean-Christophe Prat, arrivé en novembre pour redresser le club.

Mais avec un confort moindre. «Sportica était un vrai complexe, on avait le bain froid, le jacuzzi, le sauna, la machine à tirs, on y avait accès quand on voulait… Donc pour la récupération, c’est différent», détaille l’intérieur Valentin Chery. Pour autant, pas question de se lamenter. «Le message que j’ai essayé de faire passer, c’est: on n’a pas le droit de se plaindre, affirme Jean-Christophe Prat. Il y a des gens qui ont perdu leur emploi, parce que Sportica, c’était 90 salariés ; il y a des gens qui ne peuvent plus emmener leur enfant à la piscine, faire du judo ou du roller, parce que Sportica n’était pas qu’une salle de basket. La vie continue.»

Celle du club nordiste s’écrit désormais entre Loon-Plage, Calais et Dunkerque. C’est dans la salle Calypso de Calais que le club, qui a pour emblème un corsaire, a repris la mer, en recevant Nanterre samedi dernier, avant de lever l’ancre jusqu’à la fin de la saison pour les Stades de Flandres, à Dunkerque. Si le BCM vogue à nouveau, c’est aussi grâce à l’argent de la Communauté urbaine de Dunkerque qui a notamment permis de poser du parquet dans cette salle et à l’accueil de l’USDK, club de hand de la ville, qui l’occupe habituellement. Nomade, le BCM n’a pas manqué ses retrouvailles avec son public près d’un mois après l’incendie, l’emportant grâce à un tir à trois points à la dernière seconde contre Nanterre, dans une ambiance digne des grands soirs de Sportica.

«Pour l’histoire, pour ce premier match (à domicile) après tout ce qu’il s’est passé, finir comme ça, c’est génial», sourit Jean-Christophe Prat. «On s’est directement dit: On est chez nous. C’était énorme», se réjouit Valentin Chery, pour qui cette victoire constitue une «source d’espoirs». «On voit qu’au classement, rien n’est fait, affirme-t-il. (Mais) les équipes le voient: c’est dur de venir gagner chez nous, peu importe où on jouera à domicile.»