2000 pilotes. 350 courses. Des milliers de spectateurs… Les chiffres de la plus grande course automobile sur glace 100% électrique donnent le vertige. Depuis 1990, chaque hiver, Max Mamers et sa caravane, sont allés de sommet en sommet enneigé poser le Trophée Andros .

LE FIGARO. – L’aventure Trophée Andros se termine à Super-Besse ?

Max MAMERS. – Trente-cinq éditions, c’est beaucoup plus qu’une aventure. Je dirais que c’est une belle histoire de vie aboutie.

Dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Serein parce que c’est ma décision qui a été prise il y a cinq ans. Ce n’est pas un accident.

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Pourquoi le Trophée Andros s’arrête ?

Il ne s’arrête pas. Ce n’est peut-être qu’une interruption… Qui sait? Mais, force est de constater que notre matière première qui est la glace n’est plus au rendez-vous. Par rapport à la fin des années 1990, nous avons perdu 15 jours de froid et de neige au mois de décembre. C’est un fait. Le réchauffement climatique a accéléré une décision que nous n’osions pas prendre…

C’est-à-dire…

L’innovation a toujours été mon credo et, pour moi, courir, c’est repousser les limites, à tous niveaux. La compétition automobile a toujours permis de faire évoluer les produits pour le grand public. Il suffit de regarder : à la fin du 19e siècle, les premières courses étaient des côtes à gravir. Il fallait arriver le plus haut possible. Au début du 20e siècle, quand tout le monde arrivait au sommet, c’est celui qui terminait le plus rapidement qui gagnait. Nous, avec les constructeurs, nous avons pris part à cette course en participant à la transition énergétique. En 2009, nous avons connu une première mutation, avec un passage du thermique au tout électrique. Le Trophée Andros est devenu la première course automobile au monde sur glace 100% électrique.

Et quelle aurait été la prochaine évolution pour le Trophée?

Je pense que le nouveau cycle sera celui des voitures fonctionnant 100% à l’hydrogène.

Et il était impossible de continuer ?

Pour s’engager sur dix ans, il fallait l’assurance que la climatologie nous soit favorable. Ce 27 janvier, nous serons à Super-Besse et il n’y a pas de neige. Vous avez la réponse.

Comment est née cette idée folle de course sur glace il y a 35 ans ?

Lorsque j’étais pilote, la saison hivernale était une période dépourvue d’événements pour le championnat de rallye-cross. J’étais fréquemment invité à participer à des courses sur glace à Chamonix ou à Serre-Chevalier. Bien que spectaculaires et médiatisées, elles manquaient d’une organisation formelle. Avec mon ami Frédéric Gervoson, nous avons envisagé la création d’une véritable compétition comprenant des étapes, des points et un classement. Et, comme durant l’hiver, à l’exception du Dakar, aucune autre course n’était proposée, le Trophée Andros offrait l’opportunité de conduire dans des conditions difficiles, parfois extrêmes. Pendant 35 ans, un peu comme le Tour de France, nous avons été la fête d’hiver qui a animé toutes les stations que nous avons traversées.

Vous souvenez-vous où vous étiez le samedi 27 janvier 1990 lors de la première épreuve?

Comme si c’était hier! J’étais sur la grille de départ au volant de la BMW 325 iX officiel. Mais je dois avouer qu’en tant qu’organisateur, j’avais la tête ailleurs. Et mon ami de toujours et cofondateur de l’épreuve, Frédéric Gervoson, propriétaire d’ Andros, était aussi sur la ligne. De mémoire, je crois qu’il était au volant de sa Visa 1000 Pistes.

Et si vous deviez accrocher une musique au Trophée, vous choisiriez laquelle ?

Il est libre Max.

Feuilletons le livre des 35 ans du trophée Andros. Quel est votre meilleur souvenir?

J’en ai beaucoup mais je voudrais en mettre trois en avant. D’abord, avoir fait découvrir la glace à des pilotes comme Alain Prost qui était spécialiste de l’asphalte et qui n’aimait pas la glisse. Il m’avait dit qu’il ne partirait pas avant d’avoir remporté le Trophée Andros. Il l’a remporté trois fois! Je pense aussi à Sébastien Loeb qui est venu sur la glace pour découvrir une nouvelle surface et qui nous a émerveillés par sa conduite. En deuxième position, je vais en glisser deux à égalité. D’une part notre première compétition au Stade de France, en 1999. C’était un spectacle fabuleux et sur la même marche du podium je voudrais saluer les dix victoires d’Yvan Muller. Enfin, sur la troisième marche de mon Panthéon, je suis très fier et heureux d’avoir, avec le Tout électrique, contribué à la transition énergétique.

Et le pire?

À la réflexion, je ne garde que les bons moments. Mais je crois que mon pire souvenir, c’est quand je n’ai pas pu organiser de course de spectacle. Je repense forcément aux deux avalanches que nous avons essuyées. La première en 1991 à Val-Thorens, où il était tombé plusieurs mètres de neige en 48 heures. Les hélicoptères ne pouvaient pas voler. Le plan Orsec (un système de gestion de crise, NDLR) avait été déclenché et nous avons annulé l’épreuve. Et la seconde, c’est en 1997 à Isola 2000. Nous sommes restés bloqués trois jours et trois nuits.

Le Trophée et toutes les équipes que je tiens à remercier du fond du cœur pour leur dévouement ont organisé plus de 350 courses… et seulement trois ont dû être annulées. À chaque fois c’est la météo et les conditions climatiques qui nous bloquent. Hier, il y avait trop de neige et aujourd’hui, c’est dramatique. Tout est prêt, tout le monde est présent mais on ne peut pas courir parce qu’il n’y a pas de neige ou parce qu’il ne fait pas assez froid.

Et si c’était à refaire…

Aucune hésitation, j’écrirais la même histoire.

Vous avez toujours imaginé de nouveaux concepts. Où va-t-on vous retrouver la saison prochaine?

Peut-être comme ingénieur météo afin de favoriser des conditions plus froides et neigeuses…

Un mot pour conclure…

Il n’y a aucune tristesse. Au contraire, réjouissons-nous de ces 35 saisons merveilleuses.