La date butoir approche dangereusement. Et pourtant, rien n’y fait : sans accord entre l’exécutif et la droite, la loi immigration, reportée à maintes reprises et portée par le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, pourrait, afin d’être adoptée, faire l’objet d’un 49.3. Si le gouvernement, qui ne dispose pas d’une majorité absolue à l’Assemblée nationale, espère garder dans sa poche cet outil constitutionnel, qu’il ne peut utiliser qu’une fois par session parlementaire hors texte budgétaire, il entend pourtant continuer ses négociations plus ou moins âpres avec Les Républicains. Point d’achoppement majeur : l’article 3 du projet de loi, présenté au Sénat à partir du 6 novembre, et qui défraie la chronique depuis quelques semaines. Que contient-il ? Pourquoi fait-il autant débat ? Va-t-il être supprimé ? Le Figaro dresse un panorama.

Fidèle à sa philosophie du «en même temps», le gouvernement se montre à la fois ferme et accommodant. Voulant lutter contre l’immigration illégale et accélérer les expulsions des délinquants étrangers, qui «ne respectent pas les valeurs de la République et commettent des infractions sur le territoire national», l’exécutif souhaite également renforcer l’intégration des immigrés qui travaillent dans certains secteurs en manque de personnel. Concrètement, le ministre de l’Intérieur veut créer une carte de séjour d’un an pour les «métiers en tension». Un dispositif qui viserait les étrangers travaillant de manière clandestine, par exemple dans le BTP ou la restauration, où les offres d’emploi affluent. S’il était voté, ce mécanisme ne serait mis en place qu’«à titre expérimental» jusqu’à fin 2026.

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Le gouvernement a beau faire valoir qu’il s’agit d’une réclamation de longue date des chefs d’entreprise, la droite, elle, dénonce un appel d’air. Et une voie d’immigration supplémentaire. Alors que l’opinion publique est plutôt favorable à cet article 3, les ténors Républicains y voient une ligne rouge, et entendent bien jouer leur partition. Quitte à aller au bras de fer. Et au final ne pas apporter leurs suffrages au texte. Une fracture d’autant plus assumée que la droite sait très bien que l’exécutif ne peut rien faire adopter au Parlement sans son appui.

Face à ce casse-tête politique, une question échauffe les esprits : le gouvernement va-t-il lâcher du lest et retirer cet article, conçu comme un signal envoyé à la gauche ? Si le président des Républicains, Éric Ciotti, considère de longue date que la première ministre est prête à une telle concession, c’est au tour du patron des sénateurs LR, Bruno Retailleau, d’avoir été, selon Le Parisien , le destinataire d’une confidence d’Élisabeth Borne, allant dans le sens d’un retrait.

Dans une interview au JDD, dimanche dernier, le ministre de l’Intérieur s’était dit «évidemment prêt à en discuter». «Personne, je le sais, ne veut continuer l’hypocrisie sur la régularisation des travailleurs», a raillé le premier flic de France. Et d’ajouter : «Le gouvernement est attaché à des mesures de justice envers ceux qui produisent dans notre pays sans jamais poser de problème d’ordre public.» Si la droite, majoritaire au Sénat, aura les mains libres pour amender comme elle le souhaite le texte dans quelques jours, la partie sera moins aisée en décembre lorsque les discussions commenceront dans une Assemblée nationale chauffée à blanc.