L’année 2024 s’ouvre sur une sombre projection pour l’économie mondiale, selon le nouveau panorama de la Banque mondiale, publié mardi. Certes, soulignent ses experts, «l’économie mondiale est en meilleure position qu’elle ne risquait de l’être et a évité une récession mondiale principalement du fait de la solidité de l’économie américaine». Mais le regain de tensions géopolitiques à court terme et les perspectives dans la majorité des pays émergents à moyen terme font craindre que «les années 2020 ne deviennent une décennie d’opportunités manquées», estime le chef économiste, Indermit Gill.
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La prévision pour cette année de la croissance mondiale est de 2,4%, en recul pour la troisième année consécutive, après 2,6% en 2023. «Soit près de trois quarts de point de pourcentage en dessous de la moyenne des années 2010», souligne le bailleur de fonds dans un communiqué. À l’exception de 2020, de la forte récession engendrée par la pandémie et la fermeture de larges pans de l’économie mondiale, il s’agirait alors de la croissance mondiale la plus faible enregistrée sur un an depuis la crise financière de 2008.
«L’économie mondiale post-Covid a été très inégale, commente Indermit Gill. Elle a été meilleure pour les pays les plus riches. Ainsi, à la fin de cette année, nous prévoyons que les économies avancées auront un revenu par habitant supérieur à celui de 2019.» Ce ne sera le cas que pour deux pays émergents sur trois et encore moins pour les pays à faible revenu.
Le commerce mondial préoccupe particulièrement l’institution. «Ce moteur de la croissance économique sera bien meilleur en 2024 que l’année dernière mais il ne devrait représenter que la moitié de la moyenne de la décennie passée précédant la pandémie». Les perspectives sont assombries par de multiples risques : les tensions politiques, un stress financier lié à des taux d’intérêt élevés, la possibilité d’une inflation persistante, une croissance plus faible que prévu en Chine, la fragmentation des échanges commerciaux ainsi que les catastrophes liées au changement climatique.
La banque mondiale prévoit une faible hausse du PIB, de 1,2%, pour les économies avancées, en recul sur un an, et de 4% pour les pays émergents, qui voient les investissements privés comme publics, ralentir. Deuxième économie mondiale, la Chine devrait passer de 5,2% en 2023 à 4,5% cette année, puis à 4,3% en 2025, soit le niveau le plus faible depuis 1990. Ce ralentissement traduit une forte baisse de la consommation intérieure, à mesure que l’élan donné par la réouverture du pays se dissipe et que le moral des consommateurs faiblit.
De manière plus générale, la Chine «est le reflet de l’économie» mondiale. L’empire du Milieu est sur la voie d’une croissance plus faible, amenée à se poursuivre en raison du vieillissement et de la diminution de la population ainsi qu’une hausse de l’endettement. La crise immobilière qui s’est propagée dans le pays pèse aussi sur ce ralentissement qui «constitue un vent contraire pour les autres économies en développement, précise la Banque mondiale, en particulier celles pour lesquelles la Chine est un partenaire commercial majeur.» Dans un scénario pessimiste, l’institution explique que «si la croissance de la Chine est inférieure d’un point de pourcentage à ce que nous prévoyons en 2024, et c’est une possibilité compte tenu des risques mentionnés, la croissance mondiale pourrait être réduite d’environ 0,2 point de pourcentage, avec d’importantes retombées négatives pour les pays émergents en particulier.»
Enfin, le rapport s’est penché sur le cas des pays exportateurs de matières premières (deux tiers des pays en développement). Une part importante de leur recette provient de ces exportations soumises à la volatilité des cours. Or, l’instabilité des prix conduit ces économies à des périodes qui alternent entre prospérité et récession. «Les gouvernements de ces pays adoptent souvent des politiques budgétaires qui intensifient ces cycles», constatent les économistes. Ils ont tendance à augmenter leurs dépenses lorsque les prix des matières premières sont en hausse puis, lorsque les prix baissent, ils dépensent moins ce qui a pour effet de ralentir la croissance.
«Ce frein peut être réduit en mettant en place un cadre budgétaire qui discipline les dépenses publiques, en adoptant des régimes de taux de change flexibles et en évitant les restrictions sur les mouvements de capitaux internationaux», préconisent les spécialistes. Ces mesures pourraient aider ces États à augmenter la croissance de leur PIB par habitant d’un point de pourcentage tous les quatre à cinq ans en moyenne.
Voici dans le détail les projections de croissance par région :