À Édimbourg
COUPS DE CŒUR
Les Bleus étaient bien mal embarqués. Incapables de développer leur jeu, de se procurer des occasions d’essai. Pour s’en sortir, il a fallu une action individuelle de classe du jeune ailier bordelais. Servi sur son aile par Nolann Le Garrec, Louis Bielle-Biarrey tape au-dessus des deux défenseurs écossais et, d’une accélération foudroyante, prend de vitesse toute l’arrière-garde pour inscrire l’essai décisif à cinq minutes du coup de sifflet final. À seulement 20 ans, l’ailier de l’UBB en est déjà à six ballons aplatis en 9 sélections.
«Ça s’est joué au mental. Tout le monde a tout donné», a souligné l’un des petits nouveaux, Posolo Tuilagi, à l’issue du match. Et c’est indéniable qu’en défense, les Bleus ont fait preuve de courage du début à la fin. Dans le sillage d’une troisième-ligne découpe-tout – 18 plaquages pour Cros, le meilleur total, 14 pour Alldritt mais en seulement cinquante minutes, 13 pour Ollivon – c’est toute l’équipe qui s’est mise au diapason, de Cyril Baille (12 plaquages) à Gaël Fickou (8) en passant par les finisseurs. Sébastien Taofifenua (7), Tuilagi et Nollann Le Garrec (6) n’ont pas donné leur part aux chiens. Dans cet engagement collectif, Matthieu Jalibert a apporté un énorme écot. Critiqué après la défaite contre l’Irlande pour ses errements défensifs, l’ouvreur des Bleus a cette fois réussi dix plaquages, dont certains décisifs, pour seulement deux ratés. «C’est idiot ce que je vais dire, mais c’est l’une de mes plus belles victoires en équipe de France, a souligné “Captain Alldritt”. La semaine a été compliquée et on s’est vraiment resserré entre nous. On voulait gagner pour nous et on l’a fait. Je suis très content pour certains joueurs, je n’ai pas besoin de les citer. Au-delà du rugby, on n’a pas lâché, on n’a jamais baissé les bras pendant 80 minutes. Et, à la fin, c’est magnifique en termes d’émotion…»
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Avec lui, tout semble facile. Il jongle avec le ballon et évite l’en-avant en adressant une passe le corps à l’horizontal. Il distille ses petits coups de pied avec aisance, et toujours le sourire aux lèvres. Précis, clinique, inspiré. L’ancien demi d’ouverture du Racing 92 a été le parfait chef d’orchestre de son équipe, variant sans faute de goût occupation et animation. Sa frustration à l’issue de la défaite sur le fil de son équipe, après un essai refusé par l’arbitre qu’il conteste, peut se comprendre vu sa prestation haut de gamme ce samedi dans son jardin de Murrayfield.
COUPS DE GRIFFE
Après Paul Willemse, expulsé contre l’Irlande, c’est Uini Atonio qui a failli connaître le même sort face à l’Écosse. Alors que les Bleus défendent leur ligne, le puissant pilier rochelais ne cherche pas à plaquer, assénant un gros coup d’épaule à Fagerson. Carton jaune (38e minute). Puis bunker demandé par l’arbitre, Nic Berry, pour vérifier, après réflexion, si ça ne valait pas rouge. La couleur ne changera pas. Ouf de soulagement pour le joueur qui a frôlé la correctionnelle sur un geste dont il aurait largement pu se passer.
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À plusieurs reprises, particulièrement en seconde mi-temps, les deux équipes se sont recroquevillées, refusant de prendre des risques ballon en mains. À la place des coups de pied, des 22 mètres aux 22 mètres, en attendant une faute adverse à la réception ou dans la précision de la botte. Avec, au milieu, des avants figés, autorisés par la règle, à ne pas se replier s’ils ne chargent pas le botteur. À ce petit jeu, Finn Russell et Thomas Ramos se sont illustrés. Bon pied, bon œil, ils se sont répondu jusqu’à finir par provoquer les sifflets de Murrayfield. Et, devant le petit écran, ça ne devait pas être plus trépidant à suivre… Aux législateurs de trouver la parade pour mettre fin à ce ping-pong d’un ennui profond.