Vincent Chaudel est un expert en marketing et co-fondateur de l’Observatoire du Sport Business, le Think Tank du cabinet In
Le 15 février, Kylian Mbappé annonçait sa décision : il ne portera plus les couleurs du PSG la saison prochaine. Puisqu’il n’y a pas de grand club sans de grand joueur, le PSG a donc 6 mois devant lui afin de démontrer que le club n’a pas ou plus de « Mbappé » dépendance. Si commercialement, l’étude du cabinet Circle Strategy apporte des éléments de réponse, Luis Enrique semble chercher la bonne formule, depuis quelques matches.
L’annonce du futur départ de Kylian Mbappé a déclenché une tempête médiatique, en France comme en Espagne. Pour beaucoup d’observateurs, le départ du « kid de Bondy » représente un véritable défi pour le club de la capitale. Avec le 4e effectif évalué à 1,03 Md €, le Paris Saint-Germain faisait naturellement partie des favoris de cette édition de la Ligue des Champions. Sans son leader d’attaque (évalué 180 M€), il ne serait plus que le 7e effectif européen.
Difficile de réduire les performances d’une équipe à un seul joueur, surtout quand celui-ci a eu pour co-équipier des joueurs comme Cavani, Di Maria, Messi, Neymar, Silva ou Verratti. Pour autant avec lui sur le terrain, le Paris SG s’est hissé en finale de C1 en 2020 et en ½ en 2021. Depuis son arrivée au PSG en 2017, Kylian Mbappé a été une figure centrale de la réussite sportive du club. Ses contributions sont indéniables, dont notamment 5 titres de Championnat, 3 coupes de France, 293 matches, marqué 244 buts et réalisé 93 passes décisives. Les analyses effectuées par Circle Strategy montrent une diminution notable de la dominance du PSG en Ligue 1 en l’absence de Mbappé, traduite par une perte moyenne de 8 points par saison.
Tous réseaux confondus, la communauté des fans du PSG culmine désormais à 246 millions de followers dont 65 millions sur Instragam. Évidemment, le club a pu bénéficier de l’aura et des « super-connecteurs » que son Leo Messi, Neymar et Mbappé dont les communautés sur Insta sont respectivement de 500 millions, 219 millions et 112 millions de followers. Factuellement, la présence de ces 3 « galactiques » a permis au PSG de devenir le champion d’Europe … des recettes commerciales : 399,4 M€ en 2023 ( 175% par rapport à 2017). Ces revenus étant le fruit de contrat pluriannuels, le départ du capitaine de l’Equipe de France ne devrait donc pas avoir qu’un impact marginal sur le chiffre d’affaires, du moins à courts termes.
Maxime Van Steenberghe, Directeur du cabinet Circle Strategy, précise : « Personne n’a encore totalement mesuré l’impact du départ de Kylian MBappé du PSG. L’étude indépendante démontre que Mbappé a eu un impact économique sans précédent pour le PSG, pour la Ligue 1, et même pour la France ». Plus 40% de maillots du PSG vendus, plus 67% revenus de la billetterie ou encore plus 80 M€ de droits de diffusion. Mais c’est aussi plus 33% d’intérêt pour le “PSG” sur Google Trends lors des matchs des Bleus de la Coupe du monde 2022, plus 78% d’intérêt pour “Paris” sur Google Trends au moment des matches de Champions League. Pour la France, entre les charges sociales, les charges patronales, l’impôt sur ses sociétés et sur ses revenus, le « Mbappé business » représente environ 100 M€ par an de recettes fiscales.
En rachetant le PSG 70 M€, Qatar Sports Investissement est devenu propriétaire d’un club certes économiquement fragile mais à fort potentiel. Afin de contribuer à la stratégie de soft power pensée par l’émirat, le club se devait de nourrir une ambition européenne. Recruter des joueurs de standing « Ligue des Champions » était donc une obligation que la valeur marketing du moment ne pouvait financer sans soutien de son actionnaire. Développer la marque « PSG » en s’appuyant sur l’aura de « marquee player » a été l’axe stratégique du club. Aussitôt, aussitôt fait, sous la houlette de Leonardo, les fans ont vu arriver Beckham, Cavani, Ibrahimović, Motta, Pastore, Silva … Formile gagnante si on en juge par l’évolution du conttat équipementier passant de 2,5 M€ en 2011 à 80 M€ cette saison.
Sous l’ère Mbappé (2017–2024), la valorisation du club est passée de 841 M€ à 4,21 Mds €. Désormais grand d’Europe sur le plan économique, le PSG doit faire de son projet sportif la priorité de la décennie. À l’instar de Manchester City, les facteurs clés de succès sont connus : identité de jeu, stabilité du management, agrandissement du stade, centre d’entraînement, recrutement de stars montantes qui se fondront dans un collectif. Avec son campus flambant neuf de Poissy, la nomination de Luis Enrique l’été dernier, les dirigeants qataris semblent avoir posé les premiers actes de ce que l’on pourrait appeler le 2e étage de la fusée.
« Mbappé est une véritable étoile filante qui est passée à Paris mais qui s’envole vers d’autres cieux. Le PSG doit impérativement trouver un nouveau modèle économique » ajoute Jean-Marc Liduena, DG du cabinet Circle Strategy. Ça passera par un stade plus grand pour plus de recettes billetterie, de bpns droits TV, de meilleurs parcours en Coupe d’Europe et des joueurs « bankable ».
L’arrivée d’Arctos au capital, le club s’est donné les moyens de gérer le sujet du stade, avec ou sans la Ville de Paris. Côté sportif, le départ de Mbappé libérant 6 M€ de salaire mensuel, il est fort à parier que le club sera actif lors du prochain Mercato afin de renforcer le collectif. Sur le plan marketing, le jeune Kang-in Lee est le meilleur vendeur de maillots cette saison. Mais le départ de Mbappé arrive au pire moment pour la négociation des droits TV de la Ligue 1, domestiques comme internationaux. Si la LFP n’obtient pas le fameux milliard, c’est l’adversité hexagonale qui en pâtira le plus.
Dans l’attente de connaître qui diffusera le championnat de France et pour combien, la meilleure option pour maintenir le train de vie du club reste un bon parcours en C1. Une qualification en ¼ de finale garantirait au club de passer la barre des 100 M€, plus de 150 M€ pour une victoire en finale. La prochaine étape passe donc, ce mardi par un résultat positif dans l’enceinte du Reale Arena (San Sebastián).