Un entretien aux allures de point d’étape. Un an après l’automne noir qu’a traversé la RATP, le PDG de la régie depuis novembre 2022, Jean Castex, a échangé avec les usagers du métro, du bus et du RER pour le Parisien. Au cours de cette rencontre, cinq lecteurs âgés de 20 à 65 ans, ont interrogé l’ancien Premier ministre sur la qualité du trafic, la sécurité et l’accessibilité du réseau, la pollution ou encore les JO 2024.
Concernant le trafic, Jean Castex souligne d’emblée que «la situation s’est améliorée de façon significative», après une «année très difficile». Le président de la RATP le reconnaît pourtant, «le compte n’y est pas encore», en raison notamment du fossé qui sépare les lignes les plus modernes (la 1, la 14) des plus vétustes (7, 8, RER B). Grâce à un plan de recrutement «inédit», la RATP serait parvenue à endiguer partiellement la pénurie de chauffeurs de bus : seuls 4% des effectifs manqueraient toujours à l’appel. En conséquence, la «production» de bus et de métro s’est sensiblement améliorée, désormais proche de 90% et de 95% de l’offre. La situation devrait encore s’améliorer avec l’arrivée de nouvelles rames, «plus capacitaires» et moins consommatrices d’électricité, les MF19. Le premier prototype «sera déployé sur la ligne 10 en 2025», assure Jean Castex. Les lignes les plus anciennes, comme la 7 et la 8 feront l’objet d’un renouvellement accéléré, promet encore le dirigeant. «Nous allons discuter avec IDFM (île de France Mobilité, NDLR) d’une anticipation de la modernisation, apparemment c’est techniquement possible», précise Jean Castex.
À lire aussiMétro, bus: la RATP tarde à remonter la pente
Concernant les désagréments persistants sur le trafic de bus, le PDG avance certaines causes externes, tels que les «travaux, la coexistence avec les vélos et les trottinettes», qui représenteraient près de six points de régularité perdus. Quand au RER B, cogéré par la SNCF et IDFM, Jean Castex reconnaît qu’il s’agit du «point noir» du réseau francilien. «De nouveaux trains ont été commandés mais leur livraison ne s’achevera qu’à l’horizon 2030», plaide-t-il, en réponse à un usager visiblement à bout de nerfs.
Le dirigeant a également été interrogé sur l’accessibilité du réseau, toujours marginale en ce qui concerne les métros. Sur ce point, Jean Castex a tenu à clarifier les attentes des usagers. «Même si je disposais des milliards d’euros supplémentaires, je ne suis pas sûr que ce serait techniquement possible», a-t-il plaidé, soulignant le «réseau historiquement tellement profond, enchevêtré». Certaines lignes seront toutefois partiellement accessibles, comme la ligne 11 dans son prolongement en cours. Ce sujet n’est pas pris à la légère à la RATP, assure Jean Castex. «La RATP s’est dotée d’un comité accessibilité (…), les réunions ont été multipliées par deux», précise-t-il.
Lors de ses incidents à répétition (panne sur la ligne 4 cet été, ), la RATP a été épinglée pour son manque d’information au voyageur. C’est pourtant l’une des «priorités» du PDG. Celui-ci assure qu’il «va mener des investigations» pour comprendre pourquoi l’information est parfois déficiente dans les stations de bus, et également «poursuivre la formation des conducteurs» afin que ces derniers s’adressent mieux aux voyageurs pendant les incidents.
Autre écueil du réseau francilien : la sécurité. Jean Castex rappelle que la RATP dispose de ses propres forces de sécurité, le GSPR (groupement de protection et de sécurité du réseau), que finance IDFM. En sous-effectif il y a encore un an, le GSPR serait aujourd’hui en nombre suffisant (960 agents). Des négociations salariales ont été menées, comme avec les chauffeurs de bus, pour renforcer les effectifs. «La prochaine étape» pour le groupement sera des actions communes avec la police municipale de la capitale. Un accord avec les douanes vient également d’être signé. Selon Jean Castex, «les chiffres du préfet de police montrent que les faits de violence sur le réseau sont en diminution». Reste le cas de l’insécurité des femmes. «En plus du GSPR nous disposons de 5300 agents formés » qui organisent des « marches exploratoires», assure le dirigeant. La «descente à la demande» sera également généralisée dans les bus du soir, rappelle Jean Castex.
L’ancien premier ministre s’est enfin exprimé sur deux sujets d’actualité: la pollution dans le métro et les JO. Pour rappel, la Régie est accusée par l’association Respire de «tromperie et blessures involontaires» en raison d’une qualité de l’air dégradée dans l’enceinte du métro parisien. Sur ce sujet sensible, Jean Castex a joué la carte de la prudence. «Les chiffres que vous donnez ont été relevés par des personnes qui n’avaient pas accès à ces normes», répond le dirigeant à un usager qui évoque une pollution de 18 microgrammes/m3 sur la ligne 5. «On ne nie pas qu’il y ait un sujet», assure toutefois Jean Castex, qui appelle à «objectiver les mesures à mettre en place» . La régie a déjà lancé un plan qui consiste à «accroître les ventilateurs» et passer à un système de freinage électrique. «A ce jour, les études sur le sujet ne montrent aucune surmortalité sur l’ensemble de la cohorte RATP» a tenu à rassurer l’ancien Premier ministre.
Quant aux Jeux olympiques, pas de panique non plus, plaide le dirigeant. «Avec les visiteurs olympiques, la fréquentation sera équivalente à celle d’un mois d’octobre. C’est plus qu’un été mais dans des proportions que nous savons gérer», note-t-il. Il y aura toutefois des moments de « tension forte», et des «points de vigilance», dans l’Ouest parisien notamment. L’évènement fera l’objet d’un plan de recrutement spécifique. Pour éviter le risque de grève qui pourrait perturber le bon déroulement des jeux, la régie va «entamer des discussions avec les organisations syndicales cet automne», indique Jean Castex.