Qui sont donc les personnalités ayant la responsabilité de statuer sur la réforme des retraites ? Alors que le mouvement de contestation se poursuit et fait descendre chaque semaine des milliers de personnes dans les rues, exécutif comme opposants ont les yeux rivés vers le Conseil constitutionnel. Ce groupe de «Sages» qui doit rendre le 14 avril prochain sa décision quant à la conformité du texte à la Constitution. À quelques jours de l’échéance, Le Figaro rappelle qui en sont les membres aux horizons divers, et soumis à l’impartialité.
Les neuf membres du Conseil constitutionnel sont nommés par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et celui du Sénat – chacun ayant la possibilité de désigner trois membres. Leur mandat, non renouvelable, est d’une durée de neuf ans, et le renouvellement s’opère par tiers tous les trois ans.
À chaque nomination, les noms doivent être soumis à l’avis de la commission des Lois. Celle de l’Assemblée nationale pour le président du Palais Bourbon, celle du Sénat pour le président de la Chambre haute, et les deux commissions réunies lorsqu’il s’agit du chef de l’État. Dans ce dernier cas de figure, seule l’addition des votes négatifs de chaque commission, si elle atteint 3/5e des suffrages exprimés, peut invalider la proposition.
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Les présidents de la République sont également membres de droit, à vie. René Coty et Vincent Auriol en ont bénéficié sous la IVe République, et Valéry Giscard d’Estaing sous la Ve. Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy y ont siégé à temps, avant d’y renoncer. François Hollande a quant à lui refusé ce statut, qui l’obligeait à respecter un devoir de réserve.
C’est en 2016 que Laurent Fabius est désigné par le chef de l’État pour succéder à Jean-Louis Debré, et prendre la tête du Conseil constitutionnel. Soutenu à la quasi-unanimité par le Parlement, le nouveau président des Sages prend ses fonctions et s’engage à l’impartialité après une carrière politique particulièrement fournie, au sein du Parti socialiste. Enchaînant les mandats, Laurent Fabius a été longtemps député, régulièrement ministre et même chef de gouvernement sous François Mitterrand.
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Désigné par le président (LR) du Sénat, Michel Pinault demeure inconnu du grand public lorsqu’il entre au Conseil constitutionnel en 2016. Ancien conseiller d’État, le haut fonctionnaire passé par l’ENA et HEC a passé la majeure partie de sa carrière dans le privé.
Pour sa nomination, le président socialiste de l’Assemblée nationale en 2016 Claude Bartolone pioche dans son entourage. À l’époque, Corinne Luquiens est en effet la première femme à exercer la fonction de secrétaire générale du Palais Bourbon et de sa présidence.
Jacques Mézard intègre le gouvernement d’Édouard Philippe en 2017, d’abord en tant qu’éphémère ministre de l’Agriculture – son passage ne durera qu’un mois -, puis en tant que ministre de la Cohésion des territoires. Il est également élu sénateur mais ne siège à la Chambre haute que trois mois, avant d’être proposé par le chef de l’État pour rejoindre le Conseil constitutionnel.
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Longtemps maire d’une commune du Cher, François Pillet est élu sénateur en 2007, rattaché au groupe UMP puis LR. Il soutient François Fillon durant la primaire des Républicains en 2016, et entre au Conseil constitutionnel sur proposition du président LR du Sénat, trois ans plus tard.
L’annonce est accueillie avec surprise. Candidat à la primaire des Républicains en 2016, Alain Juppé prend ses distances avec la droite après son échec. Il se rapproche par la suite d’Emmanuel Macron, sans officialiser un quelconque ralliement. Encore maire de Bordeaux, il entre au Conseil constitutionnel en 2019 sur proposition du président macroniste de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand.
Elle aussi membre du gouvernement d’Édouard Philippe, Jacqueline Gourault s’installe pour trois ans au ministère de la Cohésion des territoires. Sa nomination en 2022, soumise par le chef de l’État, est loin de faire l’unanimité au Parlement. Le Sénat, dont elle a été vice-présidente après avoir été longtemps sénatrice , y est même majoritairement opposé, sans parvenir à la bloquer.
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Haut fonctionnaire, directeur de cabinet de la ministre de la Justice Rachida Dati ou encore conseiller auprès du premier ministre François Fillon, François Seners figure parmi les derniers arrivés au Conseil constitutionnel. Il est désigné par le président du Sénat en 2022.
Sa nomination a suscité la polémique. Directrice de cabinet du garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti, la magistrate Véronique Malbec a aussi été la procureure générale ayant classé sans suite le dossier de Richard Ferrand, lors de ses démêlés avec la justice. Le même Richard Ferrand qui, président de l’Assemblée nationale, lui a permis d’entrer cinq ans plus tard au Conseil constitutionnel.
Une fois leur validation nommée, les Sages doivent prêter serment devant le président de la République. Ils jurent de «bien et fidèlement remplir leurs fonctions et les exercer en toute impartialité dans le respect de la Constitution, ainsi que de garder le secret des délibérations et des votes.» Leur fonction devient alors incompatible avec celle de ministre ou de membre du Parlement.