L’échange aura été bref. Ce jeudi après-midi, sept des huit organisations syndicales de la fonction publique étaient attendues au ministère de la Transformation et de la Fonction publique, pour une réunion avec les équipes du ministre chargées de présenter un «diagnostic de l’évolution des rémunérations». Une rencontre qui a tourné court, les représentants syndicaux ayant quitté les lieux avant même que les échanges ne débutent, signe du fort mécontentement qui agite la fonction publique.
En cause notamment, un document envoyé en début de semaine aux syndicats qui évalue l’évolution des rémunérations des fonctionnaires ces dix dernières années. Les chiffres avancés par le ministère tendent à montrer une hausse du pouvoir d’achat des agents publics «de 20,8 à 34,2% selon les versants avec le seul effet des mesures salariales», en comparaison d’une inflation autour de 20%. Des données statistiques qui n’ont pas convaincu les représentants syndicaux. «Le document choisit un critère qui s’appuie sur la hausse de la masse salariale plus que les rémunérations et voudrait donc nous faire croire que les rémunérations ont augmenté», s’agace Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT Fonction publique.
«Ce n’est pas forcément une volonté de nous provoquer, reconnaît-elle. Mais c’est reçu tout comme». «On n’est pas très loin de la déclaration de guerre», renchérit Stanislas Gaudon, président de la fédération services publics de la CCFE-CGC, qui estime que «ça n’était pas opportun de nous transmettre ce document dans un tel contexte». Il faut dire que la grogne sociale monte dans la fonction publique – une journée de mobilisation générale, la première en cinq ans, ayant été décrétée pour le mardi 19 mars. Car si les fonctionnaires ont obtenu deux revalorisations successives du point d’indice en 2022 et 2023, l’année 2024 sera «une année blanche» en matière de hausse de salaire. Une situation inacceptable à leurs yeux, au vu du niveau toujours élevé de l’inflation.
Du côté du ministère, on regrette que les syndicats aient refusé la discussion. «Nous avons discuté tout au long de l’automne pour mettre en place une méthode de négociations annuelles, sur le modèle des NAO dans le privé. Cela doit se faire en trois temps, en commençant par un diagnostic partagé, qui nécessite que l’on puisse négocier, même sur les composantes elles-mêmes du diagnostic», avance le ministère de la Fonction publique. Rue de Grenelle, on trouve donc «regrettable que l’on n’ait pas pu en discuter» ce jeudi.
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Pour les syndicats, si le principe d’instaurer des négociations annuelles et pluriannuelles sur les salaires plaît, on accepte difficilement l’absence d’augmentations salariales pour 2024. Car quand bien même des négociations interviendraient cette année, elles ne concerneraient des revalorisations que pour 2025. «Il y a beaucoup d’insatisfaction et de colère chez les fonctionnaires», prévient Stanislas Gaudon de la CFE-CGC.
Une ambiance plutôt électrique qui augure des négociations compliquées pour le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques en pleine préparation d’un projet de loi de réforme prévu après l’été. Et que l’absence de Stanislas Guerini ce jeudi à la réunion n’a pas franchement apaisée. «Il n’était là ni aujourd’hui, ni lors de la réunion sur les Jeux olympiques», regrette Mylène Jacquot qui y voit «un manque de considération pour les représentants des agents publics qui n’est que le reflet d’un manque de considération pour les agents publics eux-mêmes».