La start-up française de scooters partagés, Cityscoot, qui opère à Paris va-t-elle trouver un repreneur ou être placée en liquidation ? On en saura un peu plus en fin d’après-midi : à 17h, quai de Corse, le tribunal de commerce de Paris tiendra une audience où elle examinera les deux offres de reprise. Une portée par Bertrand Fleurose, fondateur et dirigeant de cette entreprise de 2014 à 2022. L’autre présentée par Cooltra, un autre opérateur de scooters partagés également présent à Paris.
Si Cityscoot joue sa survie, c’est que ses deux actionnaires historiques (la Caisse des dépôts et la RATP) l’ont lâché à la surprise générale. Alors que l’entreprise venait d’obtenir le droit, comme deux autres marques, d’exploiter pendant cinq ans ses engins dans la capitale. En fait, la Caisse des dépôts et la RATP qui avaient déjà dépensé des millions pour maintenir à flot cette start-up structurellement déficitaire, n’ont pas voulu remettre au pot pour renouveler entièrement sa flotte et disposer ainsi de véhicules rechargeables plus vite et plus facilement.
En fin d’après-midi, Bertrand Fleurose dira pourquoi il croit encore dans l’avenir de Cityscoot. « En se dotant de scooters neufs, la société va gagner de l’argent, estime l’entrepreneur. Ces engins connectés valent trois fois moins cher qu’à nos débuts. Et leurs coûts d’exploitation ont été divisés par deux. » Quant aux charges de personnel, elles ont été considérablement réduites car l’entreprise s’est déjà séparée de son armée de développeurs indispensables quand Cityscoot jouait les défricheurs du marché au milieu des années 2010.
De même, l’opérateur s’est retiré de toutes les villes (Rome, Milan, Barcelone, Nice), sauf Paris. Du coup, la taille de l’équipe montée au plus haut à 320 salariés a été ramenée à près de 150 personnes. Dans son projet, Bertrand Fleurose en garderait un peu plus de 90%. Au départ, il concentrerait l’activité sur Paris. Même s’il ne veut pas en dire plus sur le sujet, il a identifié la marque et le modèle de scooters qu’il achèterait pour remplacer les vieux coucous de Cityscoot. « Mon plan prévoit de revenir à l’équilibre au moins en 2025, avec un Ebitda d’environ un million », précise l’entrepreneur. Bref, tout est calé sauf le nerf de la guerre, le financement.
« Mon plan de reprise nécessite quatre ou cinq millions d’euros, précise Bertrand Fleurose. Or, pour l’instant, je n’en ai trouvé qu’une petite partie. Je vais donc demander au Tribunal de commerce de me laisser encore un peu de temps pour boucler mon tour de table. » On parle plutôt d’une quinzaine de jours que de plusieurs mois. La partie est loin d’être gagnée pour l’entrepreneur car il y a urgence : selon nos informations, la start-up perdrait 250.000 euros par semaine.
En face, Cooltra créé en 2006, fait une offre diamétralement opposée. L’opérateur espagnol, présent aussi à Paris, a plutôt une surface financière rassurante : active dans sept villes en Europe (Paris, Barcelone, Rome, Lisbonne…), l’entreprise a dégagé l’année dernière un Ebitda de 7 millions d’euros pour un chiffre d’affaires de 45 millions. Elle propose de reprendre Cityscoot pour 400 000 euros. Elle garderait seulement 30 salariés sur les 150 qui travaillent pour la start-up tricolore.
« Aujourd’hui, nous exploitons 1500 scooters et Cityscoot 1 100, explique Fabien Douay, directeur France de Cooltra. Si nous reprenons Cityscoot, nous sortirons du marché parisien au départ les 1 100 engins de Cityscoot. Du coup, nous atteindrons plus rapidement que prévu notre point d’équilibre (2,2 locations par jour par engin) alors que nous sommes à une location par jour. » Et, si la demande grossit au moment des Jeux olympiques cet été, Cooltra mettra davantage de véhicules à disposition dans la capitale.
Par ailleurs, les 30 salariés repris feraient partie des équipes terrain chargées de gérer l’utilisation plus forte des véhicules (rechargement de batterie, redéploiement des engins aux endroits stratégiques de la capitale…). En fait, Cooltra espère surtout récupérer la base client de Cityscoot… et exploiter sa marque. « À Paris, nous garderons bien les scooters Cooltra beaucoup plus faciles à maintenir et moins lourds, précise Fabien Douay. En revanche, nous les exploiterons sous la marque Cityscoot très connue ou en cobranding Cooltra-Cityscoot. » Et si l’Espagnol répond à d’autres appels d’offres en France, il le ferait sous la marque Cityscoot dotée d’une très forte notoriété pour le service des scooters en free floating dans l’Hexagone. Le tribunal de commerce aura à trancher entre ces deux offres. Il devrait se donner une quinzaine de jours pour choisir la solution qui lui semblera la meilleure pour la survie de Cityscoot.