Après le «Nutri-score » pour les qualités nutritionnelles des aliments, vers un label sur le bien-être animal bientôt affiché sur les produits ? Face aux étiquetages qui «se multiplient en Europe», l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) a rendu publiques ce jeudi ses propositions pour un éventuel futur étiquetage harmonisé au niveau européen. Ces critères figurent dans un vaste rapport de près de 300 pages, résultat de trois ans de travaux, qui ont mobilisé une quarantaine d’experts.

«Aucune législation européenne ne régit les allégations ou l’étiquetage en matière de bien-être animal», explique l’Anses en introduction de son avis. Certaines règles encadrent uniquement les informations sur les méthodes de production comme «Agriculture biologique» ou le mode d’élevage des poules pondeuses («en cages», «en plein air», etc.). Néanmoins, il existe divers étiquetages au niveau national et/ou pour des filières particulières, comme le poulet de chair en France, mais «sans que leurs cahiers des charges ne soient comparables et parfois vérifiables, générant de la confusion et des doutes chez les consommateurs», estime l’Anses. L’agence pointe d’ailleurs qu’une étiquette bien-être animal existe déjà en France, et que «plusieurs autres sont en cours de développement».

Alors que l’Union européenne envisage de créer un étiquetage harmonisé, l’Anses s’était autosaisie du sujet en septembre 2021, «pour proposer aux acteurs des filières d’élevage une base scientifique sur laquelle pourrait reposer cet étiquetage». Comme le Nutri-score, il pourrait être composé de cinq niveaux, allant de A pour le meilleur à E pour le plus faible. Ce dernier niveau correspondant «au seul respect des exigences imposées par la législation européenne en matière de bien-être animal, que ce soit pour la vie en élevage, le transport ou l’abattage».

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Voilà pour l’affichage. Quant aux critères, l’Anses recommande que l’évaluation porte en priorité sur «l’état de bien-être de l’animal», avec des indicateurs relevés directement sur la bête, et pas uniquement «des modes d’élevage et des moyens mis en œuvre pour l’améliorer» comme c’est le cas aujourd’hui. Dans le détail, l’organisme recommande de prendre en compte toutes les étapes de vie de l’animal, de l’élevage à l’abattage en passant par le transport.

Et elle a identifié huit facteurs de risque au cours de chacune de ces étapes : les caractéristiques génétiques, les techniques d’élevage, les pratiques de l’éleveur, l’hébergement, l’alimentation, les démarches mises en œuvre pour assurer la bonne santé des animaux, la limitation du recours à des pratiques stressantes ou douloureuses et la reproduction. Pour chaque facteur, un protocole d’évaluation a été proposé. «Par exemple, pour l’alimentation, les critères proposés sont à la fois que l’animal dispose d’une nourriture facilement accessible et adaptée à son espèce et son âge, mais aussi qu’il puisse satisfaire ses besoins comportementaux liés à l’activité alimentaire, comme le broutage pour les ruminants, le fouissage pour les porcs ou encore le picotage et le grattage pour les volailles», développe l’Anses.

Par ailleurs, «l’évaluation du bien-être des animaux ne doit pas s’arrêter aux animaux producteurs de denrées alimentaires», estime l’établissement public, qui recommande de prendre également en compte les élevages spécialisés dans l’amélioration des caractéristiques génétiques et la reproduction. «On ne peut pas affirmer qu’une production respecte le bien-être des animaux si on ne sait rien des conditions de vie de la génération précédente», déclare en effet Julie Chiron, coordinatrice d’expertise à l’Anses.

Reste à voir si ce rapport aura de véritables répercussions au niveau politique. Au ministère de l’Agriculture, on se dit seulement favorable à un étiquetage sur une base volontaire, rapportent nos confrères du Monde. «Les lignes directrices proposées par l’Anses pourront éclairer les travaux des parties prenantes qui voudront mettre en place un tel étiquetage», indique au quotidien le ministère.