Du foin étalé dans tout le restaurant, devant des employés incrédules. Les images de l’action d’agriculteurs dans un McDonald’s d’Agen, en pleine grogne de la profession, le 24 janvier dernier, ont fait le tour des réseaux sociaux. On est loin du démontage du McDo de Millau en 1999, par José Bové et la Confédération paysanne, qui a marqué les esprits. Mais 25 ans après, la chaîne de fast-food américaine continue d’être la cible de la défiance des agriculteurs.
Pourtant, McDonald’s France met soigneusement en scène son attachement et sa contribution à l’agriculture tricolore depuis plus de 20 ans. Le géant de la restauration – deux millions de repas servis par jour dans l’Hexagone – martèle que 75% de sa matière première agricole est française. Campagnes publicitaires, visites d’exploitations et même un stand au Salon de l’agriculture : l’enseigne ne ménage pas ses efforts pour le faire savoir. Au point de se dire «très alignée avec les revendications actuelles des agriculteurs , notamment sur la rémunération et le défi de la transmission», glisse Rémi Rocca, senior director impact France chez McDonald’s.
La filiale française assure payer les agriculteurs à «un prix rémunérateur basé sur les coûts de production», et revendique de signer des contrats pluriannuels avec le maximum de producteurs possible pour leur garantir un revenu «indépendamment des fluctuations du marché», explique Rémi Rocca. «Comme on ne change pas de partenaire tous les quatre matins, on a le temps de se mettre autour d’une table pour échanger.» Près de 3000 agriculteurs avaient contractualisé leur relation avec l’entreprise en 2022. Un chiffre loin d’être anecdotique.
Le blé utilisé dans les pains à burger est 100% français, assure McDonald’s, idem pour le poulet des nuggets (fabriqués par deux fournisseurs dans le Loiret et le Pas-de-Calais). Les frites sont toutes issues de pommes de terre françaises transformées dans l’usine McCain de la Marne, mais pas les potatoes, fabriquées aux Pays-Bas où se trouve le fournisseur qui «a l’expertise du produit», justifie Rémi Rocca.
McDo communique abondamment sur le sujet depuis la fin des années 1990. C’est pour rassurer sur l’origine de ses steaks pendant les deux crises de la vache folle que la filiale française s’est mise à mettre en avant leur origine dans des campagnes publicitaires. Et c’est pour arrêter d’être prise à partie comme un symbole de mauvaises pratiques qu’elle s’est invitée au Salon de l’agriculture.
Un bon moyen de contrer les idées reçues auprès des premiers intéressés. «C’est à l’occasion d’échanges [sur le salon] que beaucoup d’agriculteurs ont découvert que nous étions leurs clients», raconte l’artisan de cette stratégie, ancien communicant puis PDG de McDonald’s France, Jean-Pierre Petit, dans son livre J’ai vendu mon âme à McDo.
En parallèle, l’Américain a francisé ses produits pour se faire accepter – tant des consommateurs que des agriculteurs – avec introduction de fromages AOP, de burgers à la viande charolaise… «Ils sont vraiment exemplaires sur le sourcing des produits français», soufflait un cadre du puissant syndicat agricole FNSEA au Figaro fin janvier, après le saccage du McDo d’Agen, qu’il jugeait «débile».
Malgré tous ces efforts, il reste des angles morts dans l’approvisionnement du géant du fast-food. Lors d’une action contre un McDonald’s – et un Burger King – de Vesoul en novembre dernier, la FDSEA de Haute-Saône dénonçait «l’importation massive de viande d’origine étrangère» des enseignes, pointant surtout la question du bœuf, l’ingrédient principal de leurs burgers.
McDonald’s le reconnaît, ses steaks ne sont pas 100% français – il est de toute façon obligé d’en afficher l’origine en restaurant. Un peu moins de la moitié de son approvisionnement est importé d’Irlande et des Pays-Bas. «On est au maximum de nos capacités en France», se défend Rémi Rocca, qui évoque un manque de vaches suffisamment grasses pour répondre au cahier des charges de la chaîne. Il rappelle que l’enseigne a acheté, en 2022, 21.950 tonnes de bœuf français et assure «travailler avec la filière bovine» pour améliorer ce point dans sa stratégie.