«Ça va être compliqué», pointe Jordan, designer graphique de 34 ans. Ce père d’un enfant de 20 mois, dont la crèche sera partiellement fermée ce jeudi à l’occasion de la mobilisation contre la réforme des retraites, va travailler depuis chez lui pour pouvoir s’occuper de son enfant. «Je vais prévenir ma direction aujourd’hui. Je pense qu’on va être nombreux à faire ça. Mais concrètement, en devant m’occuper de mon fils, je ne pourrai pas vraiment travailler», reconnaît-il.
Comme Jordan, face aux fortes perturbations anticipées dans les écoles et les crèches liées au mouvement social contre le projet de réforme du gouvernement, les familles n’ont d’autres choix que de s’adapter. Quitte à devoir travailler malgré tout, dans des conditions délicates, en jonglant avec ses têtes blondes. Chloé, mère de deux enfants âgés de 5 et 9 ans et enseignante dans le supérieur, va ainsi recourir à son jour de télétravail autorisé par semaine. «Ça va nous rappeler la période des confinements où on travaillait depuis la maison avec les enfants. Mais sincèrement, si on ne veut pas les mettre toute la journée devant la télévision, il faut passer du temps avec eux et c’est compliqué pour travailler. En plus, je vais récupérer le fils d’une amie l’après-midi car elle a des réunions importantes à réaliser en visioconférence», soupire cette Parisienne de 41 ans.
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Malgré leurs difficultés, Jordan et Chloé font tout de même partie des chanceux qui pourront avoir recours au télétravail, un mode d’organisation qui n’est pas accessible à tous les métiers, ce qui rend la journée de demain encore plus difficile à appréhender pour certains. Avocate à son compte et maman d’un bébé de 18 mois dont la crèche sera fermée ce jeudi, Caroline a dû annuler l’ensemble de ses rendez-vous de la journée et demander des renvoies d’audience pour rester chez elle. «Je peux potentiellement perdre des clients. Je ne peux pas assurer mon emploi depuis chez moi. C’est très embêtant», déplore-t-elle.
Même constat pour Guy, qui doit s’adapter en prévision d’un jeudi noir dans les transports. «Je vais devoir dormir chez des amis ce soir qui habitent dans Paris, sinon j’aurais dû partir trois heures en avance pour arriver à l’heure à mon travail», explique le barman dans le centre de la capitale, qui habite en Seine-Saint-Denis. L’épouse de Jordan, quant à elle, va devoir faire quarante minutes de vélo pour se rendre sur son lieu de travail. Une séance de sport dont elle se serait bien passée.
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Mieux vaut donc s’organiser en amont pour éviter les soucis logistiques, ce jeudi. Gwendal Cosson, consultant en communication à Nantes, a ainsi revu ses plans pour se rendre à Angers pour la journée. «Je devais prendre le train mais je vais y aller en voiture car je ne peux pas prendre le risque d’être en retard à ce rendez-vous professionnel. Le déplacement me reviendra à plus chère en prenant la voiture et c’est plus contraignant mais je n’ai pas vraiment le choix», maugrée-t-il. De son côté, l’exécutif ne cesse d’appeler les opposants à la «responsabilité» : «Espérons que cette expression populaire ne se transformera pas en blocage», a ainsi déclaré le porte-parole du gouvernement, Olivier Véran, ce mercredi.