Le sujet est technique mais symbolique des absurdités qu’engendre parfois le droit du travail français. À partir du 1er septembre, la fiscalité sera la même pour toutes les ruptures conventionnelles alors qu’elle privilégiait jusqu’alors les séparations à l’amiable pour les salariés n’ayant pas encore cotisé tous leurs trimestres pour partir à la retraite. «Le but de cette évolution est de remédier à une aberration du système qui favorise les ruptures conventionnelles avant la retraite», explique Bertrand Martinot, économiste membre de l’Institut Montaigne et spécialiste du travail. «On constate qu’il y a un pic deux-trois ans avant l’âge légal de départ», ajoute-t-il, soit la durée maximale pendant laquelle les séniors peuvent toucher une allocation-chômage.

Le système était donc à la foi coûteux pour Pôle emploi qui voyait le nombre d’allocataires gonfler pour de mauvaises raisons, pour l’emploi des séniors et donc pour les finances publiques privées de cotisations. Concrètement, l’employeur était imposé sur les indemnités de ruptures conventionnelles à hauteur de 20% pour les employés ne pouvant pas partir à la retraite contre 50% pour ceux ayant assez cotisé. Dorénavant, un taux de 30% va être imposé à tous.

Si personne ne conteste la nécessité d’uniformiser les pratiques, cette réforme est «très mal accueillie» du côté du patronat, souligne Éric Chevée, vice-président de la confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). «Il y avait deux moyens d’aligner : par le bas et le haut. C’est la seconde option qui a été choisie», se désole-t-il. «Cela va renchérir le coût de la rupture conventionnelle alors qu’il s’agit d’un outil de paix sociale», fait valoir celui qui est aussi chef d’entreprise. Selon lui le dossier aurait dû être traité par les partenaires sociaux eux-mêmes, plutôt que par l’État et avec une vision comptable.

Le poids financier de cette réforme est relativisé par Maître Sabrina Kemel, avocat chez FTMS, «cette hausse du plafond ne devrait pas changer grand-chose pour les employeurs à l’exception des salariés étant en âge de partir en retraite. Au moment de la mise en place des 20% des voix s’étaient faites entendre, mais finalement ça n’a pas arrêté l’appétence pour ces solutions du moins pr les grandes entreprises», pointe-t-elle.

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En outre, il ne faut pas croire que cette mesure seule peut impacter notablement l’emploi des séniors. «La durée d’indemnisation des séniors au chômage reste le vrai point important», selon Bertrand Martinot. Et de rappeler ce qui a déjà été fait pour inciter cette tranche d’âge à continuer à chercher du travail. «Sur les 15 dernières années il y a une continuité des politiques publiques sur le sujet. Depuis 2009 et l’obligation faite aux plus de 55 ans au chômage de chercher activement un emploi. En passant aux reports successifs de l’âge auquel les demandeurs d’emploi séniors peuvent profiter d’une durée maximale d’indemnisation de trois ans et jusqu’à la réduction de cette durée de 36 à 27 mois cette année».