Il faisait encore figure d’exception au pays du streaming. Ce ne sera bientôt plus le cas. Après Netflix, Disney , Max (HBO), Peacok, Hulu, etc. Amazon cède, à son tour, aux sirènes de la publicité. Le géant américain a annoncé vendredi matin que son service Prime Video allait diffuser des réclames à partir de 2024.

Ces dernières feront leur apparition aux États-Unis, au Royaume-Uni, en Allemagne et au Canada dès le début de l’année. Puis elles arriveront en France, en Italie, en Espagne, en Australie et au Mexique plus tard dans l’année. La mesure doit permettre de continuer à « investir dans un contenu convaincant et continuer à augmenter cet investissement sur le long terme », a indiqué la société sur son site internet.

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Le modus operandi du géant de l’e-commerce va consister à insérer des coupures publicitaires dans le forfait Prime Video existant, tout en proposant dans le même temps aux abonnés de payer plus pour une alternative sans publicité. Outre-Atlantique, il faudra ainsi s’acquitter de 3 dollars supplémentaires pour éviter les réclames entre deux épisodes du Seigneur des anneaux, de La Fabuleuse Mme Maisel ou de Jack Ryan.

« La stratégie d’Amazon est intéressante : en basculant l’ensemble des abonnés Prime Video sur l’offre avec publicité, Amazon pourra disposer dès le début d’une audience massive à commercialiser », relève Philippe Bailly, le président du cabinet NPA Conseils. À l’inverse d’un Netflix, dont la nouvelle offre avec de la publicité est partie de zéro.

Amazon est déjà solidement implanté sur le marché de la publicité. En 2022, l’entreprise a généré 38 milliards de dollars de revenus publicitaires. Une goutte d’eau comparée aux 500 milliards de dollars de chiffre d’affaires engrangés l’an passé. Mais ces revenus dépassent déjà ceux issus des abonnements à Prime. Preuve que le segment est dynamique, au deuxième trimestre, le chiffre d’affaires publicitaire a atteint 10,7 milliards de dollars, en progression de 22 % comparé à la même période de l’an passé.

Le mastodonte dispose, en outre, d’une connaissance fine de ses utilisateurs. Il a donc la possibilité de proposer des publicités plus qualifiées, qui pourraient être perçues comme moins intrusives par le consommateur. Mais ce dernier, qui avait délaissé les chaînes de télévision et ses tunnels de publicité, ne risque-t-il pas de fuir à nouveau ? Amazon a pris les devants en indiquant qu’il introduirait un nombre limité de réclames. « Nous envisageons de diffuser beaucoup moins de publicités que la télévision linéaire et les autres fournisseurs de télévision en streaming », a-t-il tenu à rassurer.

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« S’il ne dépasse pas les quatre à cinq minutes d’annonces par heure, ce qui est à peu près la norme pour les services de vidéo à la demande par abonnement, l’expérience utilisateur ne sera pas vraiment dégradée, estime le patron de NPA Conseils. Cela reste acceptable : c’est deux à trois fois moins que le volume publicitaire sur les chaînes de télévision en Europe et quatre fois moins que sur les antennes des diffuseurs américains. »

Les téléspectateurs vont devoir s’y faire. « Les offres de streaming avec de la publicité étaient une exception. Elles sont en train de devenir le nouveau standard du marché de la vidéo à la demande », fait observer Philippe Bailly. Le nouveau monde, décidément, a comme un air de déjà-vu.