Boris Johnson a quitté la tête du Parti conservateur jeudi et nombreux, dans l’opposition comme dans son propre camp, attendent de lui une démission imminente comme chef du gouvernement. La presse britannique elle, accable celui qui est encore premier ministre : «Fin de partie», «Rideau pour Bozo» ou encore «Porcelet huileux».
Si les critiques sur son apparence ou son style vestimentaire abondent, cette image négligée n’a pas toujours déplu aux électeurs. C’est même elle qui lui a permis de se démarquer au début de sa carrière.
Encore maire de Londres, Boris Johnson gagne en popularité à échelle nationale grâce notamment à un style décontracté. «Dès le début de ses études, Boris Johnson a compris qu’il avait une carte à jouer en apparaissant comme le garçon drôle, qui ne se prend pas au sérieux. Il veut se montrer différent des autres, c’est assumé», explique Tristan de Bourbon, journaliste et auteur de «Boris Johnson, un Européen contrarié».
Devenu premier ministre en juillet 2019, Boris Johnson entretient cette image. Difficile de recenser le nombre de fois où Boris Johnson est apparu décoiffé devant la porte du 10 Downing Street. Une coiffure parfaitement voulue, raconte Tristan de Bourbon. «Beaucoup de personnes avec qui il a travaillé le décrivent coiffé normalement lors des réunions. Ce n’est qu’au moment de sortir voir la presse qu’il passe sa main dans ses cheveux pour les ébouriffer».
Le Britannique continue aussi parfois à se déplacer à vélo, un casque sur la tête. Symbole fort pour le «monsieur tout le monde» qui salue aussi les passants dans la rue, discute avec eux, leur tape sur l’épaule et cultive son côté sympathique.
Pas d’inflexion non plus lorsqu’il s’attelle aux négociations pour sortir de l’Union européenne. Devenu «Monsieur Brexit», en pourparlers constants avec Bruxelles, Boris Johnson s’attache à montrer qu’on peut être un ferme négociateur sans en avoir l’apparence.
Son style vestimentaire est assumé jusque dans les grandes rencontres diplomatiques. Un exemple marquant parmi d’autres : lors du dernier G7 en juin 2022. Boris Johnson s’y présente dans un costume beaucoup plus large que tous ses homologues. «Il n’est pas envisageable pour lui de porter des costumes taillés comme Emmanuel Macron ou Joe Biden, il se mettrait en porte à faux avec l’image qu’il a créée depuis plus de 20 ans».
Mais en interne, les crises se succèdent. À commencer par le confinement en pleine pandémie et, avec lui, le «Partygate». «Boris Johnson est tout sauf un fêtard mais cette image négligée a rendu plausible dans l’opinion publique le fait qu’il ait pu participer à ces soirées», commente Tristan de Bourbon. Le premier ministre a beau argumenter longuement, «c’est trop tard, son image l’a dépassée».
Crise sociale avec une inflation historique, scandales sexuels au Parlement et dans son gouvernement… «Dès que les problèmes arrivent, les gens se demandent si cette image de guignol décontractée ne cache pas finalement une personne qui n’est pas assez sérieuse pour gérer les crises», poursuit le spécialiste.
«Clown fall», titre le quotidien The Economist à l’issue de sa démission à la tête du parti conservateur. Un surnom qui lui aura d’abord servi de conquérir la sympathie des britanniques avant de se retourner définitivement contre lui.