Après l’embrasement des campagnes, celui des autoroutes ? Arnaud Rousseau, président du premier syndicat agricole français, la FNSEA, a annoncé lundi sur France Inter le lancement dans toute la France d’actions d’agriculteurs, appelant le gouvernement à entendre leur «ras-le-bol» et leur «colère», avant une réunion à Matignon. «Je peux vous dire que dès aujourd’hui et toute la semaine et aussi longtemps qu’il sera nécessaire, un certain nombre d’actions vont être menées», a-t-il déclaré, alors que plusieurs blocages ont déjà eu lieu en Occitanie.

Ce lundi, les agriculteurs font front comme un peu partout en Europe afin de faire part de leur «colère profonde», face à la décision du gouvernement de reporter le projet de loi de «simplification» du secteur. Une première mission de taille pour le tout nouveau premier ministre Gabriel Attal qui doit recevoir ce soir la FNSEA et les Jeunes agriculteurs. Le Figaro fait le point.

«La colère qui s’exprime n’est pas nouvelle (…) et ce qu’il se passe aujourd’hui, c’est le trop-plein de mesures franco-françaises mais aussi européennes qui sont attendues», s’est ainsi exprimé le président de la FNSEA, soutenant que «ce que veulent les agriculteurs, c’est redonner une forme de dignité à leur métier, c’est parler des questions des revenus et de la compétitivité (…) c’est tout le sujet de l’exercice du métier au quotidien : comment avec la suradministration et les déclinaisons européennes d’un certain nombre de règles, on n’est plus en ligne avec ce qu’il se passe».

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Pour Arnaud Rousseau, ces actions concerneront «chaque département». De même ce dernier a confirmé que le «peut-être» était levé concernant l’appel de la FNSEA à manifester. «Pour atteindre nos objectifs, la violence n’est pas une réponse», a-t-il ajouté, en réponse à une question sur plusieurs actions violentes récentes.

«Nous avons trop de contraintes, nous passons un jour par semaine à remplir de la paperasse (…) aucune compensation financière pour les normes en plus», s’est ainsi exprimé Arnaud Gaillot, le président des Jeunes agriculteurs. Et de préciser que «tant que les réponses ne seront pas apportées», son syndicat continuera de soutenir les blocages notamment en Occitanie. Avant de lancer : «Si le gouvernement n’est pas au rendez-vous, j’ai peur qu’il y ait d’autres rassemblements (…) On n’est pas là pour mettre la pagaille, mais on est dans un pays où si on n’en arrive pas là, c’est compliqué de discuter».

Un discours partagé par le vice-président de la FNSEA, Luc Smessaert, qui se dit persuadé ce lundi que les mouvements vont «prendre de jour en jour». «Dans beaucoup de départements français, l’action va s’élargir», a-t-il prévenu sur RMC, alors que les agriculteurs en ont «marre des promesses non tenues». «Aujourd’hui, les élus comprennent et nous entendent, mais il faut passer des paroles aux actes», a-t-il lancé, appelant à arrêter «avec cette lame de fond de la décroissance au niveau européen».

Première voix du gouvernement à prendre la parole à ce sujet ce lundi, Prisca Thévenot a réagi à l’actualité ce lundi matin «Ces hommes et ces femmes engagés chaque jour dans un travail extrêmement dur et éprouvant (…) expriment une colère, a concédé la porte-parole du gouvernement à l’antenne d’Europe 1 et CNews. Cette colère, elle est légitime, parce que c’est l’expression d’incompréhensions mais également de revendications». Si elle estime qu’il faut «aller plus loin», la ministre déléguée chargée du Renouveau démocratique a affirmé que le gouvernement ne partait pas «d’une feuille blanche».

Et de rappeler les dispositifs mis en place sous la présidence d’Emmanuel Macron : la protection de la rémunération des agriculteurs prévue par «la loi EGAlim 2» ou encore la réforme de l’assurance récolte en 2022. Tout en concédant un manque de suivi législatif… «Voter des lois, c’est bien. Faire en sorte qu’elles s’appliquent correctement (…), nous devons le faire», a lancé Prisca Thévenot.

En parallèle ce lundi matin, un incendie s’est déclaré sur l’A64, qui relie Toulouse à Bayonne en passant par Pau, en pleine mobilisation des agriculteurs. «Quand je suis arrivé ce matin sur le blocage (à Carbonne, en Haute-Garonne, NDLR), des personnes malintentionnées ont décidé de mettre le feu à notre mur en paille de la résistance», a ainsi fait savoir Jérôme Bayle, éleveur de bovins, qui explique avoir mis «tous les engins agricoles» ainsi que «toutes les réserves d’eau» à disposition afin d’éteindre l’incendie, qui n’avait provoqué «aucune dégradation».

Interrogé à ce sujet ce lundi sur RMC, l’éleveur a assuré qu’il n’y avait «aucun dégât», et que l’incendie n’était pas le fait des agriculteurs. «Mon appel est solennel depuis le début, c’est “respect, solidarité, détermination”. Et quand je parle de respect, je parle de respect national», a-t-il poursuivi, ajoutant qu’à chaque blocage, il ne s’agissait pas de bloquer totalement le passage à la circulation mais juste de créer des «ralentissements», afin que «les gens comprennent notre détresse». «Mais j’appelle à aucune dégradation», a-t-il conclu.

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Et les toutes premières actions commençaient déjà à se voir lundi, alors que les accès à la centrale de Golfech, dans le Tarn-et-Garonne, sont par exemple bloqués ce lundi matin par des agriculteurs, selon la gendarmerie. À Golfech, «les agriculteurs bloquent les différents accès à la centrale nucléaire», a indiqué la gendarmerie du Tarn-et-Garonne, précisant que la préfecture devait tenir un point presse dans la matinée.

Une autre action était également annoncée dans l’ouest de l’Occitanie, des agriculteurs devant «se rassembler vers 10h00 à hauteur du péage de Perpignan-sud», selon la gendarmerie des Pyrénées-Orientales. Les agriculteurs protestent notamment contre la hausse des coûts, des normes jugées excessives et un manque de considération, autant de facteurs qui, selon eux, pénalisent leur activité.