Des capacités de production non alignées sur la demande. Comme Airbus, Daher, équipementier et avionneur, est confronté à une crise de l’offre. Alors que le géant européen a engagé des hausses de cadence dans ses sites d’assemblage, l’ETI (Entreprise de taille intermédiaire) familiale a décidé de renforcer son système industriel, avec une nouvelle usine. «Nos sites d’assemblage de Tarbes où nous produisons l’avion d’affaires TBM et de Sandpoint (Idaho) où est assemblé l’appareil Kodiak atteignent les limites de leur capacité. Nous lançons une étude de faisabilité pour ouvrir une troisième ligne d’assemblage modulaire, capable de produire ces deux modèles, à Stuart en Floride », a annoncé Didier Kayat, directeur général de Daher, ce mercredi. Objectif ? Mettre la nouvelle usine en service d’ici à 2026-2027.
Le site, qui emploiera une centaine de personnes, aura une capacité de production initiale de 20 à 30 appareils par an, ce qui permettra au constructeur de franchir le cap symbolique de la centaine d’avions produits par an. Mais aussi de se renforcer aux États-Unis. Un choix logique pour plusieurs raisons. Daher réalise un tiers de son chiffre d’affaires (1,6 milliard d’euros en 2023, soit 300 millions de plus qu’en 2022) aux États-Unis, qui est devenu le deuxième pays pour l’ensemble de ses activités : avions, logistique, services à l’industrie et fourniture d’équipements aéronautiques. Il y emploie un millier de personnes, après avoir racheté Quest Aircraft, le constructeur des Kodiak, en 2019, et un site de production de pièces d’aérostructures basé à Stuart, en juillet 2022. « Les gros équipements et systèmes de nos avions proviennent d’Amérique du Nord, notamment les moteurs et l’avionique », ajoute le directeur général.
Ces nouveaux investissements américains s’intègrent dans le plan stratégique 2023-2027, baptisé « Take-off » (décollage), qui vise à faire entrer Daher, dans le club des cinquante premières entreprises aéronautiques mondiales. Cela, en franchissant le cap des 2 milliards de ventes, répartis de façon équilibrée entre ses quatre métiers, et en générant une rentabilité (Ebitda) à deux chiffres. « Nous sommes en avance sur nos objectifs de ventes. En 2024, pour la deuxième année de Take-Off, nous visons 1,9 milliard de chiffre d’affaires, grâce à l’intégration de 100% de AAA, la société de services industriels familiales acquise l’été dernier, et grâce à la montée en cadence de nos activités », développe Didier Kayat. Ce dernier admet en revanche que la rentabilité de la société : « s’est dégradée en 2023 en raison de la persistance de perturbations (approvisionnement en matières premières encore difficile, logistique désorganisée, hausse du prix des de l’énergie etc). Mais nous ne perdons pas d’argent ». Faute de pouvoir davantage produire, Daher a livré moins d’avions que prévu en 2023, soit 74 appareils (56 TBM et 18 Kodiak), ce qui représente 21 avions de moins que prévu initialement.
Sur le terrain commercial, le groupe a bouclé un millésime historique en signant une centaine de commandes de TBM et de Kodiak. « Nous n’avions jamais connu une année aussi riche en termes d’activité, de perspectives de développement de nos cadences de production et de nouveaux contrats », insiste Didier Kayat.
Dans ce contexte, la société a recruté 1 900 nouveaux collaborateurs, dont 1 200 pour remplacer les départs à la retraite. Ce qui pose un double défi : intégrer les nouveaux entrants et les former, en particulier à la qualité. « Une génération part à la retraite, cela prend du temps de former les nouveaux salariés et de le faire monter en compétence », développe le directeur général. À cet effet, l’ETI a formé toutes ses nouvelles recrues dans ses propres centres dédiés, à Tarbes, Toulouse et au Maroc. « Nous avons réalisé 11 000 heures de formation en 2023 et formé 400 salariés dans les métiers en tension en 2023. Cette année, nous prévoyons de recruter 1 200 personnes et de réaliser 24 000 heures de formation », précise Didier Kayat.
Parallèlement, l’ETI a décidé de mettre en place une nouvelle organisation, sur le modèle des géants aéronautiques, afin de gagner en efficacité, de simplifier ses structures et d’installer une nouvelle génération de managers. Baptisé D