« Il faut un plan de bataille pour le solaire, » a insisté Bruno Le Maire, devant les élus locaux et des acteurs de la filière, ce vendredi près de Manosque (Alpes de Haute Provence). Le ministre de l’Économie y était en déplacement avec Roland Lescure, ministre délégué en charge de l’énergie.
L’objectif de long terme a déjà été fixé par le président de la République : 100 GW (gigawatts) d’ici 2050. Aujourd’hui, ce niveau est inférieur à 20 GW. Il faut donc « accélérer », selon les mots du ministre de l’Économie. « Il faut être capable de déployer 6 GW de capacité photovoltaïque chaque année, ce qui représente un doublement par rapport aux 3,2 GW installés l’an dernier », a-t-il précisé. Pour aller plus vite, le décret sur l’agrivoltaïsme (solaire sur des zones agricoles) – attendu depuis un an – devrait être publié ce samedi 6 avril, tandis que les délaissés autoroutiers vont pouvoir être utilisés pour installer des panneaux photovoltaïques et les autorisations vont être données plus rapidement pour les installations sur les bâtiments et les parkings.
Mais l’un des axes principaux de la stratégie solaire consiste à créer une industrie française dans ce secteur. Installer 100 GW de panneaux solaires représente 20 milliards d’euros d’investissements. « Je préfère que ces 20 milliards d’euros servent à ouvrir des usines et à créer des emplois bien rémunérés pour nos compatriotes, » a proclamé Bruno Le Maire. Ce qui n’est absolument pas le cas aujourd’hui. « La quasi-intégralité des panneaux utilisés en France est importée », a reconnu le ministre, soulignant que le champ devant lequel il s’exprimait était équipé de panneaux photovoltaïques provenant de Malaisie. Les quelques acteurs français encore existants sont en difficulté. Le fabricant de panneaux Systovi situé près de Nantes cherche ainsi un repreneur.
« Retroussons-nous les manches, pour produire en France, d’ici 2030, 40% des panneaux photovoltaïques que nous utilisons », a déclaré le ministre de l’Économie. Pour y parvenir, l’État et les 29 premiers développeurs de parcs et grands acheteurs vont signer un « pacte solaire » dans lequel le premier s’engage à soutenir massivement le développement du solaire en France, et les seconds promettent de recourir davantage à des panneaux français. Des nouveaux critères d’éligibilité basés sur le contenu carbone des panneaux vont également être appliqués dans le cadre des appels d’offres concernant les parkings et les bâtiments, afin de favoriser les produits fabriqués à proximité. Une prime bas-carbone va également être accordée aux développeurs de parc utilisant des panneaux français, afin d’en compenser le surcoût.
Dernier point : les giga-usines de panneaux – Carbon et Holosolis – actuellement en développement en France vont être soutenues par l’État, notamment via le crédit d’impôt vert existant. Les acteurs existants devraient également bénéficier d’une plus grande attention, notamment pour « trouver des repreneurs lorsqu’ils sont en difficulté, comme c’est le cas actuellement ».
Cette stratégie est similaire à celle qui a été mise en place pour l’automobile où le bonus écologique tient compte de l’empreinte environnementale sur tout le cycle, depuis la production jusqu’à l’utilisation, et donc pénalise les véhicules fabriqués en Asie. Avec un certain succès, puisque, pour les voitures électriques, « la part des véhicules produits en Chine et immatriculés en France est passée de 49% en décembre 2023 à 24% en février 2024 », s’est félicité Bruno Le Maire.