La France est mieux préparée que l’hiver dernier pour s’approvisionner en gaz, et même en exporter vers les voisins européens. Ce sont les conclusions tirées ce lundi par les gestionnaires du réseau de transport de gaz GRTgaz et Teréga. Des tensions restent toutefois possibles en fin d’hiver en cas de coup de froid tardif. Il a fallu repenser toute la chaîne d’approvisionnement en gaz, alors que l’Europe a perdu 75% des livraisons russes en deux ans. Les livraisons par bateaux de gaz naturel liquéfié (GNL) sont venues compenser celles qui étaient historiquement effectuées via les gazoducs venant de Russie. Parallèlement, les capacités de regazéification, étape nécessaire pour injecter le gaz dans les tuyaux, ont été augmentées de 22%.
«Les analyses montrent que cette année le réseau français a la capacité d’assurer les approvisionnements nécessaires pour alimenter les consommations et les exportations, y compris en cas d’hiver froid», estiment les deux principaux gestionnaires dans leurs «perspectives du système gazier français pour l’hiver 2023-2024». Trois scénarios sont envisagés, allant d’un hiver doux à une saison marquée par le froid. Ce dernier présente logiquement le plus fort taux de risques de tensions sur les approvisionnements en gaz.
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Les stocks contiennent l’équivalent du tiers environ de la consommation annuelle de gaz en France. Les Français sont remplis à 95% et ceux de l’Europe à 97%. Participant à l’équilibre du système qui implique : «des imports soutenus en GNL, une gestion prudente des stockages ainsi qu’un maintien de la sobriété à des niveaux similaires à ceux observés l’hiver dernier». La France a baissé sa consommation gazière de 14,3% (données corrigées du climat) entre le 1er août 2022 et le 31 juillet 2023 par rapport à la même période de 2018-2019. «Les industriels ont modifié leurs processus, en réaction à la hausse des prix du gaz l’hiver dernier. Ces gains sont acquis, ce sont des sources d’économies pour eux», estime Thierry Trouvé, confiant quant à la capacité des consommateurs à rester économes.
Et ce même si les prix sont moins élevés que l’année dernière. Un palier s’est établi aux alentours de 50 euros du mégawattheure (MWh), loin du pic d’août 2022 à plus de 300 euros et des prix de l’hiver dernier à 95 euros du MWh. Les prix futurs sur les marchés de gros du gaz s’établissent même entre 30 à 40 euros du MWh, illustrant la confiance des acteurs dans les capacités d’approvisionnement. Mais même à ces niveaux, les prix restent 3 à 4 fois supérieurs à ceux d’avant crise, continuant d’être une incitation forte à réaliser des économies.
Les Européens ont aussi développé de nouvelles capacités d’importations de GNL, avec le développement de FSRU, des unités flottantes dédiées à la regazéification. L’Allemagne en a désormais trois, l’Italie deux, la Finlande un , pour ne citer que ces pays. Celui de la France , situé au Haver et opéré par TotalEnergies au Havre devrait être mis en opération cette semaine. En outre, les capacités d’entrée de gaz via l’Espagne ont été augmentées, permettant d’injecter sur l’hiver un volume additionnel pouvant atteindre 6 TWh, selon les gestionnaires.
La France parie aussi sur le développement de sa filière biométhane, qui lui permet de produire son propre gaz sur son territoire. «Actuellement elle est d’environ 11 TWh, c’est encore peu, mais c’est supérieur aux objectifs fixés pour 2023 par la précédente programmation pluriannuelle de l’énergie. La filière estime pouvoir fournir 20% de la consommation hexagonale de gaz en 2030», ajoute Thierry Trouvé, rappelant que le Danemark est déjà à 40%. une façon d’illustrer aussi la diversité des alternatives aux importations de gaz russe.
Enfin, pour éviter toute dépendance à un seul pays, les fournisseurs français de gaz ont à cœur de diversifier leurs approvisionnements.