Après avoir retenu mercredi les Alpes françaises comme seules candidates pour accueillir les JO d’hiver 2030, le Comité international olympique (CIO) va «tout affiner» mais sa décision définitive paraît «déjà prise», explique à l’AFP Jean-Loup Chappelet, spécialiste de l’olympisme à l’Université de Lausanne.

Avez-vous été surpris par la victoire française ?«La Suède, déjà passée très près des JO-2026 face à Milan-Cortina, n’avait jamais organisé de Jeux d’hiver et la rotation géographique aurait pu bénéficier à la Scandinavie. Mais j’ai mieux compris en voyant le soutien politique au dossier français, Élysée compris, alors que le gouvernement suédois et la ville de Stockholm ont appuyé la candidature du bout des lèvres, et que la Suisse ne présentait aucune garantie politique. Par ailleurs, Paris organise déjà les Jeux d’été en 2024 donc ses équipes pourront très facilement être transférées vers la préparation des Jeux d’hiver, et une partie des sponsors se sont montrés intéressés pour poursuivre. Enfin, les Alpes françaises ont déjà deux des trois équipements qui posent le plus de problèmes à construire et entretenir, héritage des JO-1992 d’Albertville: la piste de luge-bobsleigh de La Plagne et les tremplins de saut à ski de Courchevel. Il reste l’anneau de patinage de vitesse, mais il peut être monté dans une grande halle.»

Le «dialogue ciblé» n’a été utilisé qu’une fois, pour attribuer en 2021 les JO-2032 à la ville australienne de Brisbane: en quoi va-t-il consister ?«Le CIO va tout affiner jusqu’en mars, depuis la carte des sites jusqu’à la logistique et au financement, et visiter à partir d’avril. Pour les sites, le pôle Savoie avec le ski alpin, la luge-bobsleigh et le saut à ski va forcément rester, de même que Nice pour une partie au moins des épreuves de glace. Mais les pôles »secondaires« comme le nordique à La Clusaz-Le Grand Bornand ou le ski acrobatique dans le Briançonnais peuvent encore bouger si leur accès s’avère difficile. Par ailleurs, le CIO va s’apercevoir que l’Acropolis de Nice où sont prévus patinage artistique et short track est en destruction et pourra suggérer une autre patinoire, d’autant que c’est une épreuve qui attire du monde et nécessite au moins 8.000 à 10.000 places, alors que Nice doit bâtir deux autres patinoires pour le hockey. Enfin, pour préciser le budget (pour l’instant prévu à 1,6 milliard d’euros de fonds privés sans évaluation des subventions publiques, ndlr), la possibilité de continuer avec des sponsors de Paris-2024 est intéressante. Ils devront laisser la place à Milan-Cortina dans les deux prochaines années, mais ça va permettre de négocier les contrats et de les activer dès 2026.»

Est-il imaginable que les Alpes françaises ne soient pas désignées en juillet 2024 et que la procédure reparte de zéro ?«Non, la décision est quasiment prise, d’autant que pour les garanties politiques, le CIO fera confiance à la parole donnée. Il n’y a pas de risque de référendum en France, contrairement à la Suisse. Ils feront avec les incertitudes restantes, d’autant que l’attribution aura lieu deux jours avant l’ouverture des JO-2024 à Paris: ça va passer comme une lettre à la poste.»