Quand une équipe perd 44 à 6 en demi-finale de Coupe du monde, difficile de dire que «c’est dans les détails que ça se joue». C’est pourtant ce qu’a affirmé Michael Cheika vendredi, en conférence de presse, après la lourde défaite des siens face aux All Blacks. «Les petits détails sur la transition dans les mêlées, les deux dernières minutes avant la mi-temps, les deux premières minutes après la mi-temps… Ce sont ces petites nuances que nous n’avons pas encore dans notre jeu», a précisé le sélectionneur argentin.
Julian Montoya, son capitaine, s’est sans doute montré plus lucide : «Aujourd’hui, on est loin du niveau qu’on voulait montrer. Je suis effondré, c’est une énorme déception.» Dépassée dans tous les compartiments du jeu, l’Argentine n’a jamais semblé en mesure de tenir tête à des Néo-Zélandais d’abord en maîtrise, puis dévastatrice. Les ingrédients utilisés lors des deux victoires récentes face à cet adversaire (novembre 2020 et août 2022) n’y étaient pas vendredi soir. Après 2007 et 2015, les Pumas échouent encore aux portes de la finale, cette fois sans avoir eu la sensation de lutter.
Alors comment expliquer la déroute ? La pluie ? L’arbitrage ? Peut-être commencer par le niveau de l’équipe en noir. C’est, selon Montoya, «une équipe fantastique, de loin la meilleure aujourd’hui», qui a «marqué sur chacune de ses occasions». Le sélectionneur lui-même a fini par admettre que son équipe n’avait tout simplement «pas la classe nécessaire pour rivaliser avec la Nouvelle-Zélande». Mais les partenaires d’Aaron Smith et Beauden Barrett ont beau avoir pratiqué un rugby flamboyant, ils ont été bien aidés par les trous d’air adverses.
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Et les réponses sont donc aussi à chercher du côté des Pumas. Ce n’est pas un problème d’envie, «les joueurs ont tout donné» souligne Cheika. Le gros point faible fut les phases statiques. «On n’a pas été bons en maul, en mêlée, je ne sais pas vraiment pourquoi, tente d’analyser l’Australien. À deux ou trois moments importants sur mêlée en première mi-temps, on avait la possession, on était bien placés mais on a perdu la balle sur un en-avant et on a fini avec un essai encaissé. Au début de la deuxième mi-temps, pareil. On est passés de 15-6 à 27-6 et à partir de là, ç’a été vraiment difficile.»
En attaque, les Argentins ont eu du mal à percer le rideau défensif néo-zélandais, il semblait manquer «ce petit truc pour passer. On a eu besoin de 20 phases et c’était certain qu’à un moment ou un autre, on commettrait une erreur.» En clair, trop d’imprécisions pour espérer quoi que ce soit face à une équipe contre laquelle «la moindre erreur est fatale».
Sans doute ne fallait-il pas espérer davantage de cette Argentine-là, dont le parcours fut chaotique. Après sa défaite inaugurale face à l’Angleterre, elle a gagné tous ses matches mais n’a jamais pleinement convaincu. Elle pourra toujours, comme l’indiquer Marcos Kremer, «tirer des leçons pour afficher un niveau de jeu qui [lui] permette d’aller chercher la victoire». Mais force est de constater que l’écart qui la sépare des toutes meilleures nations est grand. En attendant, la déception est immense. «Notre rêve s’est envolé et pour tout le monde, c’est terrible», constate Julian Montoya, amer.
Pour ces vaillants Pumas, le Mondial n’est pas tout à fait terminé. Reste le match pour la troisième place, avec une potentielle médaille à la clef. «On veut quitter cette Coupe du Monde en vainqueurs et on va tout faire pour que ça se fasse», affirme Kremer. Contre l’Afrique du Sud ou l’Angleterre ? Le pilier Thomas Gallo a fait son choix : «J’aimerais avoir l’occasion de prendre notre revanche sur l’Angleterre.»