Rungis le clame haut et fort, c’est le «premier marché de produits frais au monde». C’est ce symbole que veulent paralyser les agriculteurs. « Rungis revient souvent dans nos têtes », affirmait vendredi 26 janvier, la présidente de la Coordination rurale Véronique Le Floc’h au micro de RMC.
Coincé entre l’aéroport d’Orly et les bretelles de plusieurs autoroutes franciliennes, le MIN, pour marché d’intérêt national, est une plaque tournante de l’agroalimentaire en France et en Europe avec un chiffre d’affaires qui dépassait les 10 milliards d’euros en 2022, plus de 0,4% du PIB tricolore. Des cageots de fruits et de légumes, des carcasses de viandes et des caisses de glace pilée remplies de poissons, en 2022, 3 millions de tonnes de marchandises sont passées sur les carreaux des gigantesques entrepôts du sud de l’Île de France.
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La Semmaris, société en charge de la gestion du marché de Rungis, par ailleurs propriété de l’Etat français, a recensé plus de 1200 grossistes qui vendent leurs produits à 25.731 acheteurs actifs. Pour approvisionner les marchés et les restaurateurs, près de 30.000 camions y transitent quotidiennement. Selon des chiffres de la mairie de Paris, actionnaire à hauteur de 13% de la Semmaris, le marché nourrit 18 millions de consommateurs français.
«65% de nos acheteurs sont implantés en Île-de-France, nous fournissons également des commerces et restaurants en Europe et à l’autre bout du monde», détaille le groupe dans son rapport d’activité annuel. En cas de blocage, comme souhaité par certains agriculteurs, c’est avant tout les Franciliens qui seraient touchés par les pénuries de produits frais. Les légumes, les fruits mais aussi la viande ou les produits de la mer pourraient venir à manquer dans les vitrines des maraîchers, des poissonniers ou des bouchers.
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Rungis est aussi un poumon économique du Val de Marne. 12.947 personnes sont employées sur le site de 234 hectares, ce qui en fait l’un des principaux employeurs du département. Et le modèle fait des émules. Le plus grand marché au gros du monde se voit aujourd’hui comme «la référence mondiale des marchés de gros» et vend aujourd’hui son expertise à l’international. Des projets sont aujourd’hui en cours au Kazakhstan, mais aussi au Viêtnam ou au Bénin.
Outre son poids économique, le MIN est aussi un symbole. D’abord installé aux halles, au cœur de la Capitale, le marché est le symbole de la production agricole et halieutique française ce qui n’échappe pas aux politiques qui se plaisent à arpenter ses allées. En 2017, le président Emmanuel Macron fraîchement élu avait choisi de s’y rendre pour détailler sa feuille de sa politique alimentaire. Rebelote en février 2023 pour défendre la réforme des retraites. «Dans l’ensemble, les gens savent qu’il faut travailler un peu plus longtemps en moyenne tous», avait alors affirmé le chef de l’Etat sur les coups de 6h00 du matin devant les commerçants. Le symbole de Rungis, c’est aussi ce qui a poussé Gérald Darmanin à donner des instructions aux responsables des forces de l’ordre présents ce dimanche matin place Beauvau «pour déployer un dispositif défensif important afin d’empêcher tout blocage» du plus grand marché du monde.