Les prix du bois sont en train de flamber, en plus d’une pénurie qui s’accroît. Les fournisseurs de bois de chauffage sont unanimes : il n’y aura pas assez de bûches pour tout le monde cet hiver. En tout, «entre 7,5 et 8 millions de foyers français sont équipés de chauffage au bois-énergie (bûches et granulés confondus)», selon un rapport de 2019 du Comité national pour le développement du bois. Sur son site, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) précise que l’ambition du gouvernement est de porter à 9,5 millions le nombre de logements chauffés au bois d’ici 2023, pour arriver à 11,3 millions en 2028.

«Ces dernières semaines, l’Ademe a largement promu le chauffage à granulés qu’ont installé de nombreux professionnels. Mais cela a engendré une forte augmentation des prix du bois», regrette Gérard Fellous, dirigeant de Quality-bûches. Non seulement «le prix des granulés a triplé ces six derniers mois, entraînant aussi celui des bûches et de nos charges», complète le revendeur. Depuis le mois de juin, le tarif des palettes de bois brut a augmenté de 20%, obligeant Gérard Fellous à appliquer cette hausse à ses clients : «J’ai enregistré trois augmentations depuis le début de l’été, qui ne sont que des répercussions des prix de mon fournisseur».

À lire aussiSobriété énergétique : ces Français qui ne veulent pas baisser leur chauffage à 19 degrés

Selon lui, «la demande a décuplé depuis le mois de juillet» alors qu’elle ne débute généralement qu’à l’automne. «Sans faire de publicité, je reçois une centaine d’appels par jour, que je renvoie directement vers la messagerie. Cela n’a jamais existé, c’est inédit», s’étonne Gérard Fellous. Même observation pour Julian, un fournisseur de bois de chauffage qui n’a «jamais vu ça de [sa] vie». Il reçoit une quarantaine d’appels par jour, contre seulement cinq en temps normal. «J’espère que l’hiver ne va pas être rude, sinon ça va être très compliqué», s’inquiète-t-il.

Julian limite ainsi le nombre de stères par personne, jusqu’à cinq pour une seule livraison. Ces ballots d’un mètre cube de bois commencent à manquer chez les revendeurs, et «personne n’aura assez de stocks», prévient Gérard Fellous. Une situation similaire pour Patrick Heib, revendeur en Moselle : «Il n’y a plus de stock nulle part, je garde mes stères pour ma clientèle fidèle, en espérant tenir jusqu’à la fin de l’hiver.» Vendu normalement entre 55 et 57 euros l’unité, le mètre cube de bois est aujourd’hui entre 60 et 65 euros chez ce marchand.

En 2020-2021, la demande française en bois s’élevait à 1,8 million de tonnes, pour passer à 2 millions de tonnes en 2021-2022. Un chiffre qui explose pour l’hiver 2022-2023 à 2,4 millions de tonnes de bois, selon les estimations de la Fédération française des combustibles. Un engouement qui n’est pas passé inaperçu du côté des fournisseurs. «Mon producteur m’a signalé l’arrivée de nombreux nouveaux entrants, qui ont flairé la poule aux œufs d’or. Lors des ventes aux enchères de bois, ils achètent toujours au tarif le plus haut et faussent le marché. Les anciens commencent d’ailleurs à se retirer», observe Gérard Fellous, qui a lancé son activité en 2003.

À lire aussiEn vue de l’hiver, les Berlinois se ruent chez les marchands de bois et de charbon

À cela s’ajoute la modification de la réglementation au 1er septembre qui oblige les revendeurs à fournir à leurs clients plusieurs informations sur leur bois : essence, longueur, quantité et taux d’humidité. À compter de septembre 2023, les bûches de moins de deux mètres – et donc les stères – devront être uniquement du bois sec. La quantité de bûches va ainsi s’amoindrir, sachant qu’il faut en moyenne 18 à 24 mois pour sécher le bois.

À VOIR AUSSI – «Nos équipes sont mobilisées pour remettre sur le réseau un maximum de réacteurs nucléaires pour l’hiver», déclare le PDG d’EDF