Les sénateurs passent à l’action. Quelques mois après la publication d’un rapport largement commenté sur l’influence «tentaculaire» des cabinets de conseil sur l’État, les élus de la chambre haute vont étudier, mi-octobre, une proposition de loi «encadrant l’intervention» de ces structures dans les politiques publiques, a-t-on appris mercredi.
Porté par les anciens présidents et rapporteure de la commission d’enquête du Sénat sur l’influence des cabinets de conseil, Arnaud Bazin (LR) et Éliane Assassi (CRCE), le texte, déposé en juin, est aussi signé par des élus de plusieurs bords, comme Nathalie Goulet (Union centriste), Valérie Boyer (LR), Jean-Pierre Corbisez (RDSE) ou encore Franck Montaugé (Socialiste, écologiste et républicain). Il vise à répondre à plusieurs problèmes soulevés par la commission d’enquête, dont «l’opacité» autour de ces questions ou le «foisonnement incontrôlé» des missions, les sénateurs s’étant étonnés du recours massif aux cabinets par l’État et ses opérateurs.
La proposition de loi sera étudiée par la commission des lois, puis en séance publique, à compter du 18 octobre. Les débats pourront ensuite se poursuivre le lendemain, au soir, précise le calendrier sénatorial. Parmi les pistes présentées en juin, elle crée notamment un «document budgétaire recensant les prestations de conseil commandées par les administrations bénéficiaires au cours des cinq dernières années», et encadre davantage les prestations, par exemple en interdisant les missions de conseil réalisées à titre gratuit, dites «pro bono».
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Explosif, le recours aux cabinets de conseil avait suscité une intense polémique lors de la campagne présidentielle, poussant l’exécutif à réagir face aux accusations. Fin juin, Éliane Assassi avait justifié le dépôt d’une proposition de loi en dénonçant, du côté du gouvernement, des annonces «mais peu d’actions» et un pouvoir qui «a fait le dos rond en attendant que la vague passe». Les élus espéraient que leur texte serait étudié au Parlement dès cet été, sans succès.
Depuis, le gouvernement a dévoilé de nouvelles mesures : fin juillet, le ministre de la Transformation et de la fonction publiques, Stanislas Guerini, disait vouloir «donner un cadre largement défini dans ses principes et dans ses montants», et instaurait un plafonnement au coût de chaque mission, établi à deux millions d’euros. Le membre de l’exécutif précisait que ces annonces étaient complémentaires avec le texte des sénateurs, avec lequel il n’avait «aucune divergence philosophique».
Une chose est sûre : plusieurs mois après la publication du rapport sénatorial, le sujet continue de passionner les Français. Mi-juillet, suite à une consultation en ligne, la Cour des comptes a annoncé qu’elle allait travailler sur «le recours par l’État à des cabinets de conseils privés», d’ici fin 2023. La Cour n’avait pas travaillé sur ce sujet depuis plusieurs années et le rapport sur les cabinets de conseil a été soutenu sur la plateforme par près de 500 personnes et porté huit fois, notamment par l’association Anticor. De son côté, la commission des Finances de l’Assemblée nationale, dirigée par l’insoumis Éric Coquerel, a annoncé une mission d’information sur ces entités privées, avant de faire volte-face, devant l’indignation des sénateurs qui rappelaient que ce travail avait déjà été réalisé par leurs équipes : la mission d’information ne sera donc lancée que plus tard, pour constater l’effet des réformes mises en place ces derniers mois.