Qui n’a jamais rêvé de dormir 20 heures par jour, d’être doté d’une grande agilité et de tout faire tomber sur son passage pour embêter les humains ? Le studio français BlueTwelve Studio l’a fait avec Stray, sa toute première production. Dans ce jeu d’aventure sorti le 19 juillet sur PC, PlayStation 4 et PlayStation 5, le joueur incarne un chat errant qui échoue dans une cité souterraine peuplée de robots.

Accompagné d’un petit drone doté de parole qu’il rencontre en route, il essaiera de se frayer un chemin jusqu’à la surface tout en essayant d’échapper aux Zurks, créatures mutantes qui dévorent tout sur leur passage. Particulièrement attendue, l’œuvre de BlueTwelve a bénéficié d’un très bon accueil de la part des joueurs et des internautes.

Stray est le fruit du travail de BlueTwelve, un petit studio montpelliérain fondé en 2016. «Koola» et «Viv», anciens graphistes chez Ubisoft Montpellier, souhaitaient développer leur propre jeu vidéo en tant qu’indépendants. Ils s’attellent au projet en 2015. Alors qu’ils publient des premières images de leur jeu, ils sont repérés par le renommé éditeur américain Annapurna Interactive (Flower, Journey, Outer Wilds…). En 2016, ils signent un contrat d’édition.

L’entreprise BlueTwelve se développe au fur et à mesure de l’avancement du projet et regroupe aujourd’hui 17 personnes. «Dans une entreprise à taille humaine, il y a beaucoup de discussions, de souplesse et de fluidité», explique Swann Martin-Raget, producteur. «Les grosses entreprises de 100 personnes sont monnaie courante dans le jeu vidéo, mais elles perdent cette aisance de communication à cause d’un système trop pyramidal».

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Le développement de Stray aura duré sept ans. Le projet s’est heurté à deux difficultés. La première est la taille réduite de l’équipe. «On ne peut pas tout faire quand on est moins d’une vingtaine», constate Swann Martin-Raget. «Il a fallu faire des choix, notamment celui de remplacer les humains par des robots. La modélisation humaine prenait beaucoup trop de temps et de moyens».

La seconde aura été de trouver des mécaniques de jeu qui ne se heurtent pas au design de l’environnement. «Koola et Viv se sont inspirés des rues exiguës et des bâtiments de la citadelle de Kowloon, près de Hong Kong. Ajouter des éléments de décor en 3D, c’est plutôt simple mais ici, tout devenait une plateforme d’exploration potentielle pour le chat. Il fallait penser à l’impact du monde sur le gameplay, pour éviter de casser le rythme».

L’équipe a aussi passé du temps à soigner l’animation et le comportement du chat que l’on incarne. Miaulements, frottements contre les jambes, ronronnements… le résultat final est bluffant de réalisme. «80% de l’équipe a des chats et deux petits félins nous ont accompagnés au studio lors du développement. C’est un animal qui nous passionne et qu’on a passé de longs moments à observer», explique le producteur.

En parallèle, l’éditeur Annapurna a présenté à Sony les avancées du développement de Stray. Convaincu, le groupe japonais a intégré une bande-annonce du jeu dans sa conférence en ligne «Future of Gaming». Nous sommes alors en 2020. «Une telle communication, c’est très impressionnant pour une petite équipe», se souvient Swann Martin-Raget. «Présenter la première bande-annonce et les premiers éléments de gameplay, c’est un moment excitant mais stressant».

Les premières images du jeu font mouche auprès des internautes et l’engouement autour de Stray commence alors à monter. «Au vu de l’intérêt des joueurs, on ne voulait pas se rater. Ça nous a poussés à prendre plus de recul sur notre travail», souligne le producteur. Avec son histoire condensée, Stray se termine sans grande difficulté en environ 6 heures. Les développeurs ont misé sur une aventure fluide et rythmée plutôt que de complexifier les mécaniques de jeu. «Que tout le monde puisse aller au bout du jeu et de l’histoire, ça nous semblait important. Stray, c’est avant tout un voyage», explique Swann Martin-Raget.

Le pari semble réussi. Sur les réseaux sociaux, les internautes se sont approprié Stray depuis sa sortie : comptes regroupant les interactions de chats avec le jeu, dessins des fans, modifications du jeu pour y insérer l’apparence de son propre chat…. «Ça nous touche énormément de voir que les joueurs se sont impliqués dans l’histoire et ont développé un lien avec les personnages», s’émeut le producteur. «C’est drôle, on reçoit beaucoup de mails de gens qui nous disent s’être rapprochés de leur chat après avoir fini le jeu, ou avoir envie d’en adopter un».

Le jeu fait partie de l’abonnement PlayStation Plus Extra lancé fin juin par Sony pour ses consoles PlayStation 4 et 5, ce qui assure à Stray une large visibilité. Sur la plateforme PC Stream, le jeu récolte 97% d’avis positifs de joueurs. Mais ni le studio ni son éditeur ne communiquent pour le moment sur les chiffres de ventes.

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Pour BlueTwelve, la suite de l’aventure reste mystérieuse. «Pour l’instant, on observe les réactions des joueurs, on prend note des avis négatifs pour trouver des pistes d’amélioration et on corrige les bugs. L’équipe ne veut pas réagir à chaud et on tire leçon des portes qu’ouvrent les fans en utilisant Stray. On a toujours plein d’idées, mais savoir ce qui fait sens, c’est une décision qu’on prendra tous ensemble».

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