Louis-Marie Valin est consultant expert sport. Auprès d’agences ou d’annonceurs, il intervient sur des problématiques de communication, sponsoring, événementiel ou entreprenariat. Il est également membre de l’Observatoire du Sport Business et fondateur du site sport-vox.com.
Sur le rectangle vert, cette édition de la Coupe du monde de rugby laissera un goût particulièrement amer à tous les amoureux de ballon ovale à travers l’hexagone, la compétition aura néanmoins été une franche réussite. Entre l’engouement du public dans les stades, les audiences télévisées ou les retombées commerciales, la FFR peut se féliciter d’une organisation sans fausse note. La RWC 2023 va même continuer d’exister grâce à un programme inédit et innovant : Campus 2023.
Campus 2023 : un programme ambitieux
Consciente de sa responsabilité sociale et désireuse d’assurer une pérennité à l’événement, le GIP France 2023 a trouvé un moyen intéressant d’atteindre ces objectifs. Forte de l’expérience de 2007, lorsque l’afflux de licenciés généré par la Coupe du monde n’avait pas pu être absorbé et jugulé correctement en raison du manque de professionnalisme des structures accueillantes souvent gérées par des bénévoles, le GIP France 2023 a souhaité axer son action sur ce problème.
Ainsi, dès décembre 2021, ce sont plus de 1 700 alternants qui ont intégré les différents parcours diplômants proposés. Couvrant sport, tourisme et sécurité, ils doivent permettre aux futurs diplômés d’intégrer des clubs, des ligues ou des fédérations sur l’ensemble du territoire pour apporter un véritable savoir-faire en améliorant leur fonctionnement. Campus 2023, ce sont donc près de 1.200 structures d’alternance et 115 sites de formation répartis sur l’ensemble du territoire national (incluant tous les territoires d’outre-mer), 3 filières professionnelles, 4 niveaux de formation et 11 diplômes préparés.
Un impact fort territorial
Ce dispositif particulièrement innovant, la mise en place d’un CFA d’entreprise au sein d’un comité d’organisation d’un grand événement sportif international (GESI) n’ayant jamais été envisagée auparavant, et d’une ampleur exceptionnelle porte dès aujourd’hui ses fruits. Avec 85% de réussite, ce seront ainsi près de 1 500 nouveaux professionnels compétents, dont 1 100 ont participé activement à la Coupe du monde, qui vont alimenter le vivier de professionnels dans la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024, notamment dans les secteurs de l’événementiel sportif et de la sécurité, mais aussi, et surtout, nourrir le secteur associatif sportif dans l’ensemble de nos territoires.
Ces clubs sportifs locaux qui depuis trop longtemps sont dépendants de la bonne volonté et de l’énergie de bénévoles vieillissants (51% des plus de 65 ans sont engagés dans des actions bénévoles) et toujours plus sollicités (l’engagement des bénévoles du sport représenterait, sur le terrain et chaque année, l’équivalent de… 260 000 équivalents temps plein) pourront désormais se renforcer et se structurer en piochant dans ce nouveau réservoir.
Une ambition internationale
Des apprentis qui auront non seulement eu l’occasion d’évoluer dans des structures françaises et d’être intégrés à un événement de dimension mondiale mais également de s’internationaliser dans le cadre d’Erasmus . Le CFA “Campus 2023” a ainsi permis à 85 apprentis de terminer leur cursus en réalisant un stage immersif au sein de 36 organisations sportives nationales ou internationales, publiques ou privées, dans 27 pays et sur 4 continents.
Une opportunité pour ces jeunes mais également pour les organisations les ayant accueillis. En effet, cet échange aura également été l’occasion pour la Fédération Française de Rugby d’exporter son savoir-faire auprès de fédérations de rugby plus modestes en pleine construction. Suisse, Belgique, Luxembourg, Pays-Bas, Danemark, Portugal… autant de nouveaux marchés que le World Rugby souhaite développer et dont les moyens restent très limités. Ces fédérations ont ainsi pu bénéficier d’un transfert de compétences venant de l’une des fédérations rugbystiques les plus puissantes et organisées de la planète ovale tout en permettant à des jeunes de parfaire leur formation avec un champ de responsabilité accru. Du gagnant-gagnant dont le rugby sort vainqueur.
Plus qu’un lot de consolation après la désillusion sud-africaine, à qui la France avait ironiquement soufflé l’organisation de la compétition, la réussite d’un tel projet se pose comme un jalon dans les réussites futures du rugby français.