Réunis pour la première fois en audience sur le thème de «la menace du Parti communiste chinois pour l’Amérique», les élus démocrates et républicains de la commission du Congrès américain sur la Chine ont alerté sans détour ce 28 février sur les risques que fait peser sur Washington la montée en puissance de Pékin. «Ce n’est pas un match de tennis poli. C’est une lutte existentielle sur ce à quoi ressemblera la vie au XXIe siècle», a déclaré en guise d’introduction Mike Gallagher, président de la nouvelle commission parlementaire.

La commission, tenue en présence de membres de la société civile, de représentants des droits de l’homme et de militants pro-démocratie de Hong Kong, a débattu pendant plusieurs heures des multiples aspects de l’influence chinoise, depuis l’usage du réseau social TikTok aux agressions envers Taïwan, jusqu’aux origines du Covid-19. Pour Mike Gallagher, la politique vis-à-vis de Pékin «au cours des dix prochaines années préparera le terrain pour les cent prochaines années». «Le temps n’est pas de notre côté», a-t-il mis garde.

L’élu du Wisconsin a notamment insisté sur la nécessité d’une unité entre démocrates et républicains, s’inquiétant que celle-ci soit en péril à l’approche de la campagne présidentielle de 2024, alors que les républicains risquent de vouloir montrer un Joe Biden «faible face à la Chine». Le co-président démocrate de la commission, Raja Krishnamoorthi, a abondé sur ce point, et condamné la naïveté de l’idée selon laquelle une intégration économique de la Chine pouvait «inexorablement mener à la démocratie».

Ceux qui ont cru cela ont «sous-estimé» le gouvernement chinois, a déclaré l’élu démocrate, qui urge en faveur d’une compétitivité économique américaine accrue pour contrer la puissance chinoise. «Nous ne voulons pas une guerre avec la RPC, pas une guerre froide, pas une guerre chaude», a toutefois assuré l’élu de l’Illinois, «nous ne voulons pas un ‘choc des civilisations’. Mais nous recherchons une paix durable. Et c’est pourquoi nous nous devons de dissuader l’agression».

Présent à l’audience, l’ancien conseiller adjoint à la sécurité sous Donald Trump, Matt Pottinger, a estimé de son côté que l’habileté du Parti communiste chinois (PCC) à se présenter comme entité «responsable» et «normale» était «l’un des grands tours de magie de l’ère moderne». «On pourrait dire que le PCC est le Harry Houdini des régimes marxistes-léninistes, le David Copperfield du communisme, le Criss Angel de l’autocratie », a-t-il continué, terminant toutefois en affirmant que «la magie s’estompe».

Cette première réunion se tient dans un contexte de recrudescence des tensions entre Washington et Pékin. Début février, le Pentagone avait alerté successivement de la présence de plusieurs «ballons espions chinois» au-dessus des États-Unis, du Canada et jusqu’en Amérique latine. Les républicains étaient monté au créneau, reprochant à l’Administration Biden le manque d’informations données au Congrès sur ces ballons finalement abattus. Les chefs de la commission parlementaire sur la Chine avaient alors dénoncé une «violation de la souveraineté américaine».

Dans le cadre de la guerre en Ukraine également, sans se prononcer pour ou contre l’«opération spéciale» de la Russie, la Chine a exprimé à plusieurs reprises son soutien à Moscou face aux sanctions occidentales. Fin février, le secrétaire d’État américain Antony Blinken a exprimé ses craintes sur le fait que la Chine envisage de fournir des armes à la Russie, des propos que Pékin s’est empressé de démentir.

Interrogé sur le message envoyé par la Chine en envoyant ses ballons, l’ex-conseiller à la sécurité nationale HR McMaster, également présent à l’audience, a déclaré y voir la «métaphore de l’effort massif d’espionnage» chinois dans le monde entier. La Chine, quant à elle, a toujours catégoriquement nié ces accusations, maintenant qu’il s’agit de simples appareils de recherche scientifique.