Jeudi 18 août 2016. Au Stade de Rio, le sprinter français Christophe Lemaitre dispute la finale olympique du 200 mètres. La course est tellement serrée qu’il faudra attendre quelques stressantes secondes pour voir son nom s’afficher sur le tableau et confirmer ainsi sa médaille de Bronze, au millième de seconde près… Derrière ces moments d’intenses émotions sportives se cache toute une chaîne technologique pour capter, remonter, traiter, afficher la donnée et la distribuer au public des stades et aux centaines de millions de téléspectateurs à travers le monde… «Sans bases technologiques solides, rien n’est possible» rappelle Tony Estanguet, président du Comité d’Organisation des JO de Paris 2024. Pour cette édition, toutes les technologies nécessaires au bon déroulement de l’événement seront supervisées depuis le Centre des Opérations Technologiques («TOC»), inauguré ce mardi 3 octobre, à quelques kilomètres du Stade de France.
À la manière du «Mission Control Center» de Houston pour la NASA, «ce centre de commandes, opéré par Atos, supervisera toutes les opérations technologiques pendant les Jeux avec l’ensemble des partenaires et le Comité international Olympique» explique Bruno Marie Rose, directeur de la Technologie et des Systèmes d’Information de Paris 2024. Après 5 ans de préparation, les équipes des 15 partenaires technologiques se rassemblent physiquement en un même lieu, qui pilotera les 140 managers responsables de l’IT sur l’ensemble des sites des Jeux Olympiques et Paralympiques.
Installer les équipements informatiques nécessaires – PC, imprimantes – sur tous les 63 sites, gérer le système d’accréditation des participants et des 45.000 volontaires, générer et diffuser les résultats et les données nécessaires aux commentateurs, assurer toute la connectivité qui permettra aux 10.500 athlètes et aux milliards de fans de sport d’être connectés à chaque instant, le spectre technologique est vaste et mobilise environ 2000 personnes. Les tests grandeur nature sur les services technologiques et des compétitions sportives ont commencé depuis juin 2023 et se poursuivront pour que tout soit prêt le 26 juillet, jour de la cérémonie d’ouverture sur la Seine. Véritable épine dorsale du projet, le TOC mobilisera 300 personnes à plein temps – 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 – pendant les périodes de compétition, capables de réagir à la moindre alerte sur un début de dysfonctionnement.Sur 610 mètres carrés, situés au sein d’un bâtiment ultra-sécurisé, se répartissent les écrans de contrôle et équipements des différents îlots du TOC. Les équipes des 15 partenaires technologiques sont responsables du bon déroulé des Jeux. «Imaginez un restaurant de 63 grandes tablées d’invités ayant chacun leurs besoins, nous sommes un peu la cuisine qui va devoir servir toutes les tables, gérer les priorités et aussi accueillir des invités imprévus » image Blandine Lassau, directrice adjointe de l’intégration pour les événements spéciaux chez Atos.
Comme les athlètes qui s’entraînent et répètent leurs gestes avant le jour J, les différentes équipes doivent définir et tester les processus pour être en capacité de réagir au mieux en cas de problèmes. « Nous n’avons pas le droit aux couacs. Il faut s’assurer que tout le monde est bien intégré et s’appuie sur les mêmes processus. Nous testons aussi beaucoup la résilience des systèmes informatiques, qui sont au cœur des services fournis aux acteurs de l’écosystème olympique» résume Christophe Thivet, directeur de l’intégration technologique pour les jeux de Paris 2024 chez Atos. Des pannes d’énergie au remplacement express de matériels informatiques détériorés à cause de pluies diluviennes comme cela s’est produit aux JO de Tokyo, il faut pouvoir faire face à toutes les situations. Gérer l’imprévu, jusqu’aux situations les plus ubuesques comme ce crocodile grignotant des câbles pendant les Jeux de Rio… Aucune chance que cet incident se reproduise à Paris, mais tant d’autres scénarios à préparer.Dont plusieurs inédits en raison des nouveautés spécifiques aux JO de Paris 2024. Outre la cérémonie d’ouverture sur la Seine, le déroulé de quatre épreuves sportives différentes sur la Place de la Concorde – le plus complexe des sites à gérer d’un point de vue technologique – ou l’organisation de l’épreuve de surf à Tahiti, soit à 15.000 kilomètres de la ville hôte des Jeux posent de nouveaux challenges technologiques. «D’habitude l’absence de compétition la nuit nous permet de mener des opérations de maintenance ou des mises à jour. Pendant la durée des épreuves de surf, nous serons sur du 24 heures sur 24 sans répit» illustre Christophe Thivet.
Pour les JO de Paris 2024 de nouvelles technologies vont être aussi déployées pour la première fois une échelle inédite. Les talkies Walkies laisseront place au «push to talk» pour les échanges nécessaires à l’organisation, la 5G privée viendront renforcer les besoins de connectivité pour la cérémonie d’ouverture, des modélisations de sites en 3D seront mis à disposition des fédérations sportives. L’intelligence artificielle sera également utilisée en appui pour le choix et la gestion des volontaires, afin de trouver la meilleure personne au meilleur endroit en fonction des disponibilités et des compétences requises.Ce TOC est l’un des 3 sites dédiés à la technologie des Jeux Olympiques et Paralympiques. Il est épaulé par le Centre des Opérations Technologiques Central (CTOC) de Barcelone et par le Laboratoire des Tests d’Intégration de Madrid. En cas de problème sur ce TOC, un centre de secours Bien évidemment, toutes les préoccupations liées à la cybersécurité et aux attaques informatiques sont intégrées à ce colossal chantier. «De notre point de vue idéalement, des Jeux réussis sont des jeux où l’on n’entendra pas parler de la technologie» résume Christophe Thivet.Pour ces Jeux, l’ordre de grandeur du budget technologique est de 510 millions d’euros sur les 4,4 milliards prévus à date pour l’ensemble de l’événement.