« Pour la République, contre l’antisémitisme »: plus de 182.000 personnes ont défilé dimanche, à Paris et partout en France, pour dénoncer la recrudescence du nombre d’actes antisémites dans notre pays depuis l’attaque perpétrée le 7 octobre par le Hamas à l’encontre d’Israël. Dans ce contexte international très tendu, ces manifestations ont fait l’objet d’un dispositif de sécurité maximal, avec notamment plus de 3000 policiers et gendarmes mobilisés dans la capitale. Samedi, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, avait demandé aux préfets de « garantir une extrême sécurité » des marches, « encourageant » au passage les représentants de l’État à « participer personnellement » aux différentes mobilisations.
À Paris, le cortège s’est élancé peu après 15 heures depuis le quartier de l’Assemblée nationale, en direction de celui du Sénat. Le carré de tête du cortège parisien, arrivé à destination vers 16 h 45, a rassemblé de nombreuses personnalités politiques parmi lesquelles Élisabeth Borne et plusieurs membres de son gouvernement, les présidents de l’Assemblée et du Sénat Yaël Braun-Pivet et Gérard Larcher, initiateurs de cette « grande marche civique », les anciens présidents de la République François Hollande et Nicolas Sarkozy, des anciens premiers ministres, mais aussi des représentants des cultes comme le grand rabbin de France, Haïm Korsia, et l’évêque de Nanterre, Mgr Matthieu Rougé.
À lire aussiL’appel de Gérard Larcher et Yaël Braun-Pivet: «Pour la République et contre l’antisémitisme, marchons»
Quelques mètres derrière ce carré de tête, des élus rassemblés par chapelle politique puis le reste du cortège, 105.000 personnes en tout selon la préfecture de police de Paris. Parmi les manifestants, Ismail et Jasmin, tous deux âgés de 27 ans. Pour les deux hommes – ni l’un ni l’autre ne sont de confession juive, Ismail est musulman – il est « important d’être présents car c’est une marche transpartisane qui doit rassembler tout le monde. Ce qui se passe pour les juifs est inacceptable». « C’est bien qu’il y ait autant de monde, c’est surtout important qu’il y ait plein de non-juifs », renchérit Ava, 17 ans, qui « n’a pas peur dans la vie de tous les jours » mais « prend plus de précautions depuis le 7 octobre ». Un peu plus loin, Mathilde et Florence, quadragénaires, racontent avoir entendu une de leurs amies leur dire qu’une personne de confession juive lui avait demandé : « Si besoin, tu nous cacherais ? » « Ça nous a retourné le bide d’imaginer que des juifs se posent ce genre de questions », se désolent les Parisiennes.
La marche s’est, dans l’ensemble, déroulée dans le calme. « C’est bon enfant et patriote », commente Sylvie, 45 ans. La manifestation a notamment été ponctuée par des Marseillaise entonnées en tête de cortège, des salves d’applaudissements et des slogans comme « Non, non, non à l’antisémitisme ». Très peu de drapeaux français et pancartes étaient visibles. Une ambiance grave mais apaisée, aux antipodes de celle du rassemblement de la matinée, initié par plusieurs organisations de jeunesse comme les Jeunes insoumis, l’Union étudiante et l’Union syndicale lycéenne, en présence de plusieurs élus LFI. La situation s’est rapidement tendue avec des contre-manifestants opposés à « l’instrumentalisation » du mémorial de la rafle du Vél d’Hiv’. Après l’exfiltration des opposants par la police, deux gerbes de fleurs ont été déposées au pied du mémorial, puis une minute de silence pour les victimes de la Shoah a été respectée.
À lire aussiÀ Strasbourg, les députés insoumis se sont fondus dans la foule de la marche contre l’antisémitisme
Ailleurs en France ont eu lieu de nombreux rassemblements de taille plus modeste. Plus de mille personnes se sont retrouvées à Tours à l’initiative de la Ligue contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) Touraine. C’est également une antenne locale de la Licra qui était à l’origine du rassemblement de Strasbourg, qui a réuni plusieurs milliers de participants, dont des cadres LFI venus de Paris car ils refusaient de défiler aux côtés du Rassemblement national. À Nice, deux rassemblements se sont tenus : l’un le matin à l’initiative du maire, Christian Estrosi, et du Conseil représentatif des institutions juives de France (Crif) du Sud-Est, l’autre l’après-midi à l’appel de l’Association des maires de France (AMF). Cet appel de l’AMF à se réunir «devant chaque préfecture de département » a été entendu dans plusieurs villes, notamment Angers, Bordeaux, Bourges, Grenoble, Nantes, Rennes, Toulon, Montpellier… « Les Français ont répondu présent », se sont réjouies plusieurs personnalités politiques.