Depuis son lancement le 17 octobre dernier, la campagne de vaccination contre la grippe connaît un succès limité. Devant le constat de ces chiffres «médiocres», bien moindres que ceux de l’an dernier à la même période, Aurélien Rousseau s’est exprimé sur X (ex-tweeter). À la fin du mois de novembre, le ministre de la santé a appelé à un «sursaut» pour rattraper ce retard au risque de voir l’hôpital et les plus à risques payer «le prix fort», a-t-il ajouté. Alors que les indicateurs montrent une progression des maladies respiratoires sur le territoire, comment expliquer que les doses aient du mal à s’écouler ?

L’hiver vient à peine de s’installer et déjà trois régions de l’Hexagone, l’Île-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d’Azur, sont passées en phase pré-épidémique selon Santé publique France, depuis le 29 novembre. En réaction, le ministre de la Santé avait lui-même fait part de ses préoccupations quant à l’éventuelle propagation de la grippe à d’autres régions du territoire. «Les indicateurs pré-épidémiques bougent sur la grippe. Elle va progressivement s’étendre», avait-il écrit dans un post sur X.

De leur côté, les deux principaux syndicats de pharmaciens, la FSPF (Fédération des syndicats pharmaceutiques de France) et l’USPO (Union des Syndicats des Pharmaciens d’Officine) ont tiré la sonnette d’alarme face à la baisse du nombre de délivrances de vaccins antigrippaux en pharmacie, selon les données de la société IQVIA. «50 jours après le lancement de la campagne annuelle, un peu plus de 8 millions de doses de vaccin antigrippal ont été délivrés par les pharmaciens sur le territoire, ce qui représente 600.000 personnes vaccinées en moins par rapport à l’année dernière. Soit une baisse de 8%», indique Philippe Besset, président de la FSPF.

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Pour le syndicaliste, la tendance s’expliquerait par une lassitude des Français face aux incitations vaccinales. «C’est quelque chose qui n’est pas récent: il peut être compliqué d’admettre que se faire vacciner est bon car la plupart du temps, à l’échelle de l’individu, on n’en voit pas le bénéfice immédiat.» Un problème renforcé, toujours selon Philippe Besset, par l’ombre qu’a pu exercer la campagne de vaccination contre le Covid qui, à l’inverse, a connu une dynamique plus positive (3,3 millions de personnes âgées de plus de 65 ans ont été vaccinées depuis le 2 octobre contre 2 millions en 2022).

Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO, regrette pour sa part les conséquences d’une logistique un peu trop hâtive. «Les personnes ciblées en priorité par la campagne, notamment les personnes âgées et à risque, reçoivent leurs bons de vaccination un mois avant que ne débute la campagne. Quand ils viennent nous voir, on leur demande de revenir au moment du lancement. Mais bien souvent ils oublient.» À cela, se sont ajoutés plusieurs facteurs de dissuasion, entre autres des températures étonnamment clémentes ce mois d’octobre et les départs en vacances.

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À ce stade, les autorités sanitaires comme les spécialistes déplorent l’impact potentiel de ce retard. «Si jamais l’épidémie de grippe est de même nature que celle de l’an dernier, on estime que 600.000 vaccinations en moins pourront conduire à un millier d’hospitalisations supplémentaires et 300 à 400 décès», indique Philippe Besset. Pour inverser la courbe, les autorités sanitaires insistent sur la prise de conscience collective. Elles rappellent que le vaccin est fortement recommandé aux populations les plus vulnérables (personnes âgées, personnes souffrant de maladies chroniques, immunodéprimés, et femmes enceintes) qui sont plus susceptibles de faire des formes graves. Néanmoins il reste ouvert à tous et toutes. «Une inversion est encore possible mais cela doit passer par un renforcement de la communication autour de la stratégie vaccinale. Par ailleurs, c’est aussi le rôle des professionnels de santé d’être doublement vigilant sur le statut vaccinal de leurs patients afin de les inciter à se faire vacciner s’ils ont oublié», souligne Pierre-Olivier Variot.