Glagla, il fait froid. Rien que de très normal pour la saison, nous direz-vous. Il n’empêche que grelottements, nez gelé et doigts gourds ne sont pas la partie la plus agréable de l’hiver, et que certains publics sont plus à risque face aux températures négatives. «Le Figaro Santé» a ôté ses moufles, pour vous livrer ses meilleurs conseils anti froid et vous alerter sur quelques pièges à éviter.

Notre organisme n’a de cesse de maintenir sa température interne autour de 37°C (avec de petites variations selon les organes, les moments de la journée et les individus). Pour résister au froid, il économise la chaleur dont il dispose, et s’efforce d’en produire. Pour l’économiser et la dispenser là où elle est le plus nécessaire, apparaît un phénomène de vasoconstriction: les vaisseaux sanguins des parties non vitales (la peau, les doigts…) voient leur diamètre diminuer. Cela a deux avantages: d’une part, une peau moins irriguée est plus isolante, et limite les échanges thermiques entre notre sang et l’extérieur. Le sang va en outre affluer vers les organes vitaux pour mieux les protéger. Il devient également plus visqueux.

Seconde tactique de notre organisme: produire de l’énergie. Pour cela, il va accélérer la digestion pour absorber les nutriments nécessaires à la création de chaleur, et puiser dans les graisses. Le métabolisme cellulaire s’accélère pour produire encore plus de chaleur. L’autre façon de produire de la chaleur est le mouvement, et les frissons sont la «seconde ligne de défense» de l’organisme face au froid: les fibres musculaires superficielles se contractent pour accroître la production de chaleur. L’apparition de frissons signale donc que l’organisme peine à réguler la température interne, et qu’il est temps de rentrer ! Quand à la «chair de poule», elle permet de créer une couche d’air isolante entre votre peau et le froid extérieur; ce mécanisme très ancien est évidemment plus efficace chez un animal au pelage fourni que chez l’homme…

Grippes, rhumes et autres infections respiratoires sont dues à des virus et des bactéries et non, on n’«attrape pas froid» au sens strict du terme (même si certains mécanismes font qu’il est indirectement impliqué et que notre résistance face à eux est moindre). En revanche, chez les très jeunes enfants et les personnes âgées, les mécanismes de régulation thermique fonctionnent moins bien. Et c’est d’autant plus vrai s’ils ne bougent pas ou peu. N’oubliez pas que, tandis que vous marchez, votre bébé reste immobile dans sa poussette! Par ailleurs, les enfants ne savent pas dire quand ils ont froid, a fortiori s’ils s’amusent. Gare aussi aux malades chroniques (pathologies cardiovasculaires ou respiratoires, hypothyroïdie, maladies neuropsychiatriques): pour lutter contre le froid, l’organisme mobilise précisément les mécanismes fragilisés par leur pathologie. Des études ont ainsi montré une plus grande mortalité cardiovasculaire lors des épisodes de grand froid (9,1 décès supplémentaires tous les 1 000 décès, selon une étude publiée en 2022 dans la revue Circulation ).

Engelures et hypothermie menacent en cas d’exposition prolongée, et chaque hiver, des personnes sans abri sont retrouvées mortes de froid. Les engelures sont des lésions localisées provoquées par un gel de la peau, le plus souvent au niveau des extrémités exposées (mains, pieds, visage); cela commence par des rougeurs et sensations de brûlure, puis une sensation d’engourdissement et une décoloration de la peau ou des taches blanchâtres. Une engelure doit être traitée immédiatement, pour éviter qu’elle ne se transforme en gelure plus profonde. Quant à l’hypothermie, elle démarre lorsque la température interne du corps descend en dessous de 35°C. L’organisme ne peut alors plus fonctionner convenablement. Frissons, somnolence, fatigue et maladresse générale sont les signes avant-coureurs. En dessous de 32°C (hypothermie modérée) apparaissent une inconscience progressive et des hallucinations. Sous 28°C, c’est l’hypothermie grave.

Autre danger, plus indirect: chaque année, des personnes sont victimes d’intoxications au monoxyde de carbone à cause d’appareils de chauffage mal utilisés ou mal entretenus et de pièces mal ventilées. Maux de tête, vertige ou sensation de faiblesse doivent vous alerter, de même que des symptômes digestifs (nausées, vomissements, douleurs…), surtout s’ils touchent plusieurs membres du foyer et disparaissent lorsqu’ils quittent le logement. Si l’intoxication perdure, peuvent apparaître des troubles de la vision, du comportement, voir un coma. «Pour des raisons physiologiques, [les nourrissons] peuvent être les premiers voire les seuls intoxiqués, précise le ministère de la santé. La présentation clinique est souvent atypique (refus de téter, pleurs inexpliqués, torpeur, convulsions).» Attention aussi aux femmes enceintes: le fœtus peut être gravement intoxiqué alors que sa mère en ressent peu ou pas les effets. Quelles que soient les températures extérieures, il est donc primordial de continuer à aérer son logement.

Savez-vous quel est le meilleur isolant ? L’air, pour peu qu’il soit sec et immobile! Que vous soyez en ville ou tout en haut d’une montagne, le secret est donc de vous «envelopper» d’air pour vous isoler des frimas. Pour cela, deux solutions: vous pouvez opter pour une tenue conçue pour cela (une doudoune, des vêtements de ski ou de randonnée…), ou superposer plusieurs vêtements légers plutôt qu’un seul très épais (ce qui, cerise sur le gâteau, vous facilitera l’effeuillage lorsque vous entrerez dans un lieu chauffé). Les vêtements doivent aussi ne pas être trop près du corps (pour pouvoir emprisonner la couche d’air), celui au contact de la peau pouvoir évacuer la transpiration, et la dernière couche doit vous isoler du vent et de la pluie.

Attention aux parties qui dépassent. Votre maman n’avait pas tort quand elle vous disait de mettre bonnet, gants et écharpe… En protégeant votre nez et votre bouche, vous respirerez un air moins froid, épargnant à votre organisme de le réchauffer avant qu’il parvienne à vos poumons; vos muqueuses seront également moins fragilisées, et formeront ainsi une meilleure barrière contre les virus et bactéries. La tête, abondamment irriguée par la circulation sanguine, est une vraie source de déperdition de chaleur si elle est exposée. Quant aux doigts, ils sont les premiers sacrifiés par l’organisme qui préfère irriguer les organes vitaux, ne comptez donc pas sur lui pour les protéger !

Résister au froid demande des efforts à votre organisme. Le cœur bat plus vite, la pression sanguine augmente, de même que la fréquence respiratoire. Si vous n’êtes pas en très bonne santé ou pas habitué aux efforts physiques, ce n’est donc guère le moment de vous mettre au running.

En outre, le froid extrême ou subit de façon prolongé diminue nos performances et notre vigilance. La force musculaire, la dextérité (surtout engoncés dans des vêtements épais et des gants), l’attention et le temps de réaction peuvent être altérés, attention donc si vous vous livrez à une activité comportant un risque, par exemple le bricolage. Gare aussi au risque de glissade sur un sol gelé.

Normalement, sauf à être exposé à un froid extrême et/ou prolongé, votre corps n’a pas besoin de calories supplémentaires pour faire face. Une nourriture équilibrée suffira. Il faut en revanche veiller à s’hydrater correctement, d’autant que le froid a tendance à irriter les muqueuses. Les boissons chaudes peuvent être agréables, mais elles ne vous réchaufferont pas plus qu’un simple verre d’eau. Et quel que soit votre plaisir à siroter un vin chaud ou un grog, oubliez une idée reçue: non, l’alcool ne réchauffe absolument pas! C’est même tout à fait le contraire: sous l’effet de l’alcool, les vaisseaux sanguins à la surface de la peau se dilatent et le sang y afflue, nous donnant une fausse sensation de chaleur, au détriment de nos organes internes!

Le froid peut avoir des conséquences sur la stabilité de certains médicaments, et sur leur effet dans notre organisme. Les médicaments sont soumis à des essais de stabilité face à des températures élevées, mais pas toujours aux basses températures, et certains produits peuvent voir leur qualité diminuée s’ils sont exposés au grand froid. En outre, ils peuvent altérer nos mécanismes de défense. Les neuroleptiques, barbituriques et benzodiazépines perturbent le fonctionnement de l’hypothalamus, qui pilote la thermorégulation centrale; certains anti-hypertenseurs et les vasodilatateurs perturbent la régulation périphérique; d’autres produits peuvent voir leur absorption modifiée.