« Pas ce soir chéri, j’ai la migraine ! ». Cette maladie est souvent perçue comme exclusivement féminine. Rien de plus faux.

« Quand mon fils a commencé à se plaindre de maux de ventre vers l’âge de 7-8 ans, je n’ai pas pensé à la migraine. Quand, l’année suivante, il a évoqué des maux de tête, je l’ai envoyé chez l’ophtalmo, qui n’a rien détecté… Pourtant, je suis migraineuse, ma mère et ma sœur aussi. Mais justement, pour moi, c’était une maladie typiquement féminine. Jamais je n’aurai pensé que cela pouvait concerner les hommes », raconte Annie. Or, contrairement à ce que pensait cette mère de famille mais aussi bon nombre d’entre nous, les hommes ne sont pas épargnés par cette pathologie chronique.

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Avant la puberté, il existe même une égalité des sexes face à la maladie. « Sur les 5 à 10 % d’enfants concernés, il y a autant de petits garçons que de petites filles », précise le Dr Michel Lantéri-Minet, neurologue au CHU de Nice. Après l’âge de 15 ans, la parité disparaît. Ainsi, sur les 12,5 % des Français qui souffrent de migraine, deux tiers sont des femmes et un tiers des hommes. C’est au moment de la puberté que tout bascule. Bon nombre de garçons vont alors voir leurs migraines s’améliorer ou disparaître. Parallèlement, sous l’influence des hormones, le nombre de jeunes filles migraineuses va augmenter.

« La migraine est une maladie caractérisée par une excitabilité neuronale liée à un terrain génétique complexe. Les hormones féminines viennent renforcer cette excitabilité », explique le Dr Lantéri-Minet. C’est pourquoi de nombreuses femmes, souffrant de migraine, ont des crises liées au cycle menstruel. Pour certaines, ces maux sont strictement hormono-dépendants. Chez elles, les crises surviennent uniquement au cours des règles (ce sont des migraines dites cataméniales) et disparaissent pendant la grossesse et avec la ménopause. « C’est cette forme de migraine qui donne une vision très féminine de la maladie », souligne le Dr Lantéri-Minet. On peut même dire que, pendant des années, la migraine a été considérée comme une « maladie de bonne femme ».

D’ailleurs, si les femmes ont parfois du mal à parler de leur maladie, les hommes préfèrent bien souvent la taire. « Dans mon précédent poste, je n’osais pas en parler, même avec mes collègues femmes qui disaient être migraineuses. Lorsqu’on me faisait remarquer ma pâleur ou le fait que j’avais l’air à côté de mes pompes, je prétextais avoir fait la fête, avoir la gueule de bois… Cela ne faisait peut-être pas sérieux, mais, pour moi, c’était plus facile à dire. J’ai changé d’entreprise et mon nouveau boss évoque très naturellement ses migraines. Ce qui m’a permis de parler des miennes », raconte Baptiste, cadre trentenaire dans une banque. Car, homme ou femme, ce sont bien les adultes jeunes qui paient le plus lourd tribut à la maladie migraineuse. Les crises débutent en effet presque toujours avant 35 ans. Ensuite elles vont évoluer tout au cours de la vie avec des périodes d’amélioration ou d’aggravation. Puis, à partir de la cinquantaine, la fréquence et la sévérité des crises peuvent diminuer, voire disparaître. « Seuls 10 % de nos patients ont plus de 65 ans. Ils souffrent souvent d’une maladie sévère avec des abus médicamenteux », précise le Dr Lantéri-Minet. Mais, même chez les plus âgées, les femmes restent plus nombreuses que les hommes à se plaindre de migraine.

Les migraines des hommes sont plus souvent liées aux changements de rythme, que ce soit au niveau de leurs activités personnelles ou professionnelles (migraine du week-end ou des vacances), de leur sommeil (manque ou excès de sommeil) ou encore de leur repas. . . En outre, il semble que les hommes, qui sont moins souvent migraineux, ont moins fréquemment que les femmes des migraines sévères qui deviennent chroniques.