Plus de trois ans après le début de la pandémie de Covid-19, des scientifiques établissent pour la première fois un lien entre le développement d’une forme grave de la maladie et un cancer non diagnostiqué. Une étude franco-suisse, publiée dans la revue Scientific Reports le 30 mai dernier, a en effet cherché à déterminer si les patients qui ont développé une forme sévère du Covid-19 ont plus de risques d’être diagnostiqués porteurs d’un cancer quelques mois plus tard.
Les scientifiques d’Epi-Phare (un groupement d’intérêt scientifique constitué par l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé et la Caisse nationale d’assurance-maladie), de l’Institut de santé globale de Genève et de l’université de Genève, ont comparé les données de 41.302 personnes hospitalisées en réanimation pour cause de Covid-19 et de 713.670 personnes témoins, du même âge, même sexe et même département, mais non hospitalisées pour le Covid-19.
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Résultat, les patients hospitalisés pour forme grave de Covid-19 présentent un risque augmenté de 31% de recevoir un diagnostic de cancer dans les mois suivants. 2,2% d’entre eux ont reçu un diagnostic de cancer dans les mois suivants, contre 1,5% pour les autres témoins. Le risque est plus élevé pour les cancers du rein, du côlon, des poumons ou hématologiques (cancer du sang).
Si l’étude n’affirme pas qu’il y a un «effet causal» entre une infection grave au Covid-19 et un cancer, une forme sévère «pourrait représenter un marqueur de cancer non diagnostiqué. L’état d’immunodépression peut peut-être cacher un cancer sous-jacent pas encore détecté», a expliqué le Pr Mahmoud Zureik, directeur d’Epi-Phare dans Le Quotidien du médecin . Et le risque de cancer serait plus fort chez les femmes de moins de 60 ans que les hommes, précise l’étude.
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Cependant, le Pr Mahmoud Zureik estime qu’il est «prématuré » de recommander un dépistage systématique des cancers chez ces patients. Il invite donc simplement à plus de surveillance. «Les patients qui sortent de réanimation ou de soins intensifs après un Covid-19 sévère ont déjà un risque accru de mortalité. Il est donc utile de les surveiller, d’autant qu’ils sont exposés à des séquelles, notamment pulmonaires», a-t-il souligné. Le chercheur a ajouté que «d’autres recherches sont également à mener pour mieux préciser les localisations de cancer concernées et pour mettre en relation le trio immunodépression, Covid-19 et maladies liées à l’immunodépression, dont les cancers».