Quatre ans et demi après l’incendie de Notre-Dame de Paris, aucune mise en examen n’a été prononcée dans les enquêtes sur les causes du sinistre – la piste accidentelle restant privilégiée – et la possible pollution au plomb provoquée. Les investigations menées par trois juges d’instruction du pôle santé publique de Paris se poursuivent pour déterminer l’origine du feu, le 15 avril 2019, tandis que de nouvelles expertises ont été ordonnées, avait appris l’AFP en avril de source judiciaire. «Les unes ont pour objectif d’affiner la zone et l’instant du départ des flammes. Les autres visent, par analyse des scellés, à déterminer les causes matérielles de l’incendie», avait-on précisé. Sollicité mardi par l’AFP, la source judiciaire a confirmé que cette information judiciaire était toujours en cours, sans mise en examen.

Au terme de l’enquête préliminaire, avant la saisine des magistrats instructeurs, le procureur de Paris de l’époque, Rémy Heitz, avait indiqué privilégier la piste accidentelle, évoquant un mégot mal éteint ou un dysfonctionnement électrique. Rien ne semble depuis accréditer la piste criminelle. «Au cours de l’année écoulée, l’intégralité des zones ont pu être déblayées» sans néanmoins révéler «de nouvel élément susceptible d’être exploité», avait souligné au printemps la source judiciaire.

Le 15 avril 2019, l’édifice vieux de plus de 850 ans et célèbre dans le monde entier, alors en travaux de restauration, s’était embrasé et avait perdu sa flèche, sa toiture, son horloge et une partie de sa voûte, ravagées par les flammes. Plusieurs défaillances dans la sécurité de la cathédrale ont été identifiées, notamment dans le dispositif d’alarme de l’édifice, ce qui a contribué à retarder l’appel aux pompiers le jour de l’incendie, ou sur le système électrique d’un des ascenseurs. Ces dysfonctionnements ne sont vraisemblablement pas à l’origine de l’incendie, mais ont pu permettre aux flammes de se propager dans l’édifice.

Depuis mars, la justice enquête par ailleurs sur les conséquences potentiellement néfastes pour la santé de cet incendie au retentissement mondial. Deux juges d’instruction parisiens sont ainsi chargés d’une plainte déposée en juin 2022 par l’association Henri Pézerat de défense de la santé en lien avec le travail et l’environnement, le syndicat CGT et deux parents d’élèves, accusant les autorités de ne pas avoir pris toutes les précautions pour éviter des contaminations liées à la pollution au plomb provoquée par l’incendie.

Les juges enquêtent sur une possible mise en danger, aussi bien des riverains que des ouvriers qui ont dépollué le site, d’après la source judiciaire. L’union départementale CGT a annoncé mi-novembre sur son site internet l’audition de son secrétaire général comme partie civile le 8 septembre par les magistrats instructeurs. «Les deux heures et demie d’audition ont permis, à partir de données et de faits précis, d’argumenter sur la dangerosité du plomb et sur les manquements graves des autorités en charge de la santé des travailleurs et de la population», indique le syndicat.

Un représentant de l’association Henri Pézerat a également été entendu, d’après une source proche du dossier. D’après une autre source proche du dossier, une même juge est désignée dans les deux dossiers afin «d’avoir une vision d’ensemble» du sujet. Certains des plaignants ont participé jeudi à un rassemblement de protestation sur le parvis de la cathédrale contre la reconstruction à l’identique de la flèche de Notre-Dame, c’est-à-dire avec des ornements en plomb. Dans leur plainte, ils estimaient que dans le brasier, 400 tonnes de plomb du toit et de la flèche de Notre-Dame étaient parties en fumée, soit «près de quatre fois les émissions annuelles de plomb dans l’atmosphère, dans la France entière»