COUPS DE CŒUR

Mais où va-t-il s’arrêter ? À 26 ans, Damian Penaud est dans la forme de sa vie et les statistiques s’affolent. En inscrivant un (nouveau) doublé, samedi face aux Gallois, l’ailier de Clermont en est à 21 essais inscrits lors de ses 26 dernières sélections ! Avec ces deux unités supplémentaires, il confirme un peu plus son statut de meilleur marqueur français dans le Tournoi. Il en est désormais à 14 essais (une semaine après avoir dépassé à Twickenham les 11 réalisations du précédent recordman, Vincent Clerc). Vous en voulez encore ? Avant ce Tournoi, terminé avec cinq essais personnels, il était le 10e meilleur marqueur français de l’histoire. Il sort de la compétition à la 5e place, avec 26 essais en 42 sélections. Il a dépassé Aurélien Rougerie, Christian Darrouy (23 chacun) et Christophe Dominici (23). Le voilà à hauteur de Philippe Bernat-Salles et Émile Ntamack. Restent, devant lui, Philippe Sella (30), Philippe Saint-André (32), Vincent Clerc (34) et Serge Blanco (38). Un Serge Blanco qu’il titille sur une autre marque. En inscrivant son 6e doublé sous le maillot bleu, il se rapproche du légendaire numéro 15 qui en a réussi sept (mais en 93 sélections…). Enfin, le futur ailier de l’UBB termine, évidemment, meilleur marqueur d’essais de cette édition 2023, devant les Écossais Huw Jones et Blair Kinghorn, 4 chacun.

Une première pour sa 50e. Uini Atonio se souviendra longtemps de ce match contre le pays de Galles. En effet, pour sa 50e sélection sous le maillot bleu, le pilier de La Rochelle a inscrit son premier essai international, bien servi en bout de ligne par Thomas Ramos. Tout sauf une anecdote. Cet essai est venu couronner un match titanesque du golgoth d’origine néo-zélandaise, qui a été monstrueux en mêlée fermée. Son vis-à-vis, le pauvre Wyn Jones, se souviendra sûrement longtemps du calvaire que lui a fait subir le droitier tricolore. Atonio, solide à l’impact et habile balle en main, est sûrement l’un des meilleurs mondiaux à son poste. Avec Cyril Baille de l’autre côté de sa mêlée, le XV de France est sacrément équipé pour viser un premier titre planétaire, dans six mois, sur ses terres.

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Le Grand Chelem est pour l’Irlande, mais la meilleure attaque est pour les Bleus. Ils ont inscrit 174 points en cinq journées (presque 35 par match) contre 151 pour les Irlandais. En nombre d’essais, ils terminent également juste devant les vainqueurs du Tournoi : 21 essais inscrits contre 20. Évidemment, la large et historique victoire à Twickenham (53 points inscrits) a largement contribué à la démonstration offensive de Thomas Ramos, meilleur réalisateur de cette édition avec 84 points – loin devant ses poursuivants, l’Irlandais Jonathan Sexton (35 points) et l’Italien Tommaso Allan (34) -, Damian Penaud (5 essais), Charles Ollivon, Thibaud Flament (3 essais chacun) et leurs coéquipiers.

COUPS DE GRIFFE

À la 48e minute, les Bleus menaient 34 à 7. Bonus offensif en poche et match plié. Pour des relâchements coupables et trois essais encaissés pour terminer par un 7-21 en faveur des Gallois. Thomas Ramos, par ailleurs buteur infaillible et auteur de deux passes décisives sur les essais de Uini Atonio et Damian Penaud (son second), est directement impliqué sur deux des trois réalisations des Dragons. À la 68e minute, l’arrière tente depuis son en-but une relance aussi inutile qu’absurde. Seul face à trois défenseurs, il se fait arracher le ballon pour, quelque temps de jeu plus loin, un essai de Tomos Williams. À la dernière minute, venu sur l’aile droite, il rate le premier plaquage sur Dyer. Penaud manque le second et essai de l’ailier gallois. «Le petit bémol, peut-être, ce sont les deux essais encaissés un peu bêtement en fin de match, dont l’un avec une mauvaise relance de notre part, a reconnu Ramos. On avait fixé un nombre de points à ne pas prendre et on l’a dépassé…» Encore un peu plus de regrets de la part du capitaine, Antoine Dupont. «La fin de match reflète certains problèmes qu’on peut avoir. On leur a donné des points, c’est récurrent chez nous. On se fait souvent remonter par notre faute. On doit être plus consistants, plus rigoureux sur la totalité du match. C’est positif de mettre encore plus de 40 points mais, oui, on aurait dû en prendre moins…»

La domination, qu’elle soit territoriale ou en termes de possession de balle, était totale. Lors du premier quart d’heure, on ne voyait que les Gallois : 90% d’occupation territoriale, et encore plus de possession de la balle. Sauf que tout cela n’a pas servi à grand-chose. Une domination quasiment stérile avec un seul essai inscrit par George North en première main (8e). Beaucoup d’efforts pour la bande de grognards de la Principauté, immédiatement punis par l’intenable Damian Penaud (10e) parfaitement servi par une limpide passe allongée d’Antoine Dupont. Au final, les Bleus ont su faire le dos rond durant cette entame de feu du XV du Poireau. Et, dès la mi-temps, la messe était déjà dite (20-7).

C’est une image que la France du rugby ne comprend pas. Ne digère pas. La veille du match,les joueurs du XV de France ont reçu des mains de Bernard Laporte leur tunique pour ce dernier match du Tournoi. Des mains du président démissionnaire de la FFR, condamné en première instance (il a fait appel) pour corruption. Alors que tous les voyants sont au vert pour l’équipe de France avant «sa» Coupe du monde, cela fait tache. Les amateurs de rugby – et encore plus ceux qui sont moins initiés – ne comprennent pas que l’ancien dirigeant ne se mette pas en retrait. Qu’il ne s’éclipse pas et laisse les Bleus vivent leur aventure. On le sait, Fabien Galthié et Bernard Laporte sont très proches, intimement liés. Jamais un président n’avait mis à disposition de son sélectionneur de tels moyens, financiers et logistiques. Aujourd’hui, le XV de France, numéro 2 au classement mondial, en récolte les fruits. Après le succès historique à Twickenham, Galthié avait dédié cette victoire à Laporte. Déjà, beaucoup avaient tiqué. L’ombre de l’ex-président de la FFR a à nouveau plané au-dessus de la victoire de samedi. Avec un gênant sentiment de malaise.