Monstres des mers avec leur physique bodybuildé (32 mètres de long, 23 mètres de large), ils occupent (forcément) le devant de la scène. Et s’ils ne seront que cinq à décoller, ce dimanche à 13h05 au large du Havre, les trimarans Ultim restent les stars des stars au départ de la 16e Transat Jacques Vabre disputée en double tous les deux ans.

Une course sur la route du café et une ultime répétition avant le grand départ de leur tout nouveau tour du monde en solo et en course prévu le 7 janvier de Brest. Charles Caudrelier (Maxi Edmond de Rothschild), qui remet son titre en jeu dans cette Transat Jacques Vabre avec Erwan Israël, recadre l’objectif: «Cette Transat est un événement majeur pour moi. Elle n’a pas la notoriété de la Route du rhum mais c’est ma course préférée avec la Solitaire du Figaro. Avec son format à deux, elle a ouvert la voie à tellement de marins.»

Caudrelier l’a remportée trois fois (en monocoque Imoca avec Marc Guillemot en 2009, en trimaran Mod70 avec Sébastien Josse en 2013 et en trimaran Ultim avec Franck Cammas en 2021) et compte bien marquer les esprits en conservant sa couronne, deux mois avant l’Arkéa Ultim Challenge. «Notre bateau date de 2017 et si on est devant, c’est qu’on a réussi à trouver le bon curseur entre innovation et fiabilité. La concurrence va très vite, du coup on essaye des choses et cette Transat va servir à tester des détails qui ne se voient pas à l’œil nu. On a bon espoir d’avoir bien progressé mais on sait que les autres aussi. Notre ancienneté parle en notre faveur, notre bateau reste une référence. On va se battre pour gagner.» Sans craindre de casser? «Si le bateau ne tient pas quinze jours pour la Transat, il ne tiendra pas quarante-cinq jours pour le tour du monde. Et on a tout en double pour réparer si on a un problème, safrans, dérive, sauf le mât. On a encore besoin de travailler et de naviguer.»

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Vainqueur de la course 24H Ultim avec Sébastien Josse, un mois avant la transat, Armel Le Cléac’h va lâcher les chevaux ailés de son Maxi Banque Populaire XI, le sourire aux lèvres: «Ce n’est pas du tout la même longueur que la Transat, mais cette victoire fait du bien après une année difficile pour notre team (marquée notamment par le débarquement agité de Clarisse Crémer du monocoque des banquiers). Avec Corentin Horeau qui remporte aussi la Solitaire du Figaro, on retrouve une dynamique positive. On est là pour faire des courses et les gagner. On ne va pas s’ennuyer sur la Transat Jacques Vabre, parce qu’avec Edmond de Rothschild et SVR-Lazartigue (François Gabart et Tom Laperche), nous sommes très proches en vitesse. La traversée jusqu’en Martinique sera un super entraînement en termes sportif pour revoir toutes les manœuvres. Techniquement, comme nos bateaux seront dans la configuration tour du monde, ce sera un bon test. Et quinze jours sur la Transat, cela correspond à un tiers du tour du monde.»

La bataille navale s’annonce aussi intense que mouvementée sur les 7000 milles du parcours prévoyant deux passages du légendaire Pot au Noir. «Le bateau de Caudrelier reste le bateau à battre. Le team Gitana est dans la maîtrise et la maturité. Nous, on arrive à maturité et on commence à avoir quelques petits avantages à certaines allures. Au portant dans le vent médium, on arrive à voler un peu plus tôt. On a encore une phase de progression.» En espérant éviter les pépins techniques (les graves avaries de la Route du rhum 2018 avaient contraint les marins à repousser le tour du monde en solo) .

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«Effectivement il ne faudra pas casser sur la Transat à deux mois du départ, même si on a des pièces de rechange. Mais si on ne l’avait pas disputée, on aurait été naviguer et les risques de toucher quelque chose sont plus grands devant Lorient qu’au large. En tout cas, aujourd’hui, nos bateaux sont prêts pour le tour du monde en course, il a fallu du temps et pas mal d’ajustements sur les structures et les appendices ces dernières années pour atteindre ce niveau de fiabilité. Les Ultim restent une classe jeune mais aujourd’hui, on est prêt à y aller. Ce n’est plus un projet fou, on ne part plus dans l’inconnu, si ce n’est dans la capacité des marins à tenir quarante-cinq jours à ce rythme.»

Le dernier larron du triplé favori pour déguster le premier le café de la victoire à Fort-de-France, confirme la tendance et le bon niveau de préparation de ces machines de guerre (certes amicale). «On va partir en configuration tour du monde, à quelques détails près, détaille François Gabart. On est à l’heure, on est prêts. Les trois bateaux de tête sont très proches et Sodebo (Thomas Coville et Thomas Rouxel), on ne sait pas son niveau après ses grosses modifications. Le bateau de Caudrelier a-t-il encore un cran d’avance? La Route du rhum (qu’il avait remportée) a répondu l’année dernière, la Transat Jacques Vabre va répondre cette année.» Un dernier café pour la (longue) route.