e préfère quand Manon Aubry milite avec François Ruffin à Amiens pour parler réindustrialisation qu’avec Jean-Luc Mélenchon sur l’EurovisionCela faisait longtemps que l’on n’avait pas constaté l’absence de drapeau palestinien à un rassemblement organisé par La France insoumise (LFI). Une fois n’est pas coutume, un drapeau européen était même hissé sur un grand mât, surplombant l’estrade de fortune d’où s’exprimait Manon Aubry, tête de liste LFI aux élections européennes, lundi après-midi à Amiens. Cocasse, pour l’organisation qui a banni la bannière étoilée de tous ses meetings. C’est que la candidate Insoumise, créditée de 8 % des intentions de vote dans notre sondage quotidien Ifop-Fiducial, s’exprimait depuis un terrain qu’elle n’a pas choisi : l’usine Metex, menacée de fermeture faute de repreneurs, qui produit de la lysine, un acide aminé présent par exemple dans l’Aspégic. Les ouvriers mettent en cause le « dumping chinois » permis par l’Union européenne en abaissant les taxes à l’import sur ce produit chimique.

Une table ronde a été organisée sur le parking du site industriel en étroite collaboration avec le microparti du député Insoumis François Ruffin, présent lui aussi. Aux côtés des deux élus, plutôt complices, plusieurs syndicalistes se sont exprimés, dénonçant avec véhémence leurs conditions de travail. L’occasion pour Manon Aubry de mettre à l’ordre du jour de sa campagne les questions sociales qu’elle affectionne tout particulièrement, après plusieurs semaines de matraquage de son parti sur la situation humanitaire à Gaza. « Je préfère quand Manon Aubry milite avec François Ruffin à Amiens pour parler réindustrialisation qu’avec Jean-Luc Mélenchon sur l’Eurovision », confie un brin railleur le candidat communiste aux européennes, l’Amiénois Léon Deffontaines.

« Ces deux sujets ne sont pas en concurrence l’un et l’autre. Il faut pouvoir parler de ce que vivent ces salariés tout en exigeant un cessez-le-feu immédiat à Gaza », a expliqué l’Insoumise. François Ruffin, qui s’est plusieurs fois inscrit en faux avec la ligne de Jean-Luc Mélenchon depuis qu’il a rejoint son mouvement en 2017, a pour sa part hiérarchisé ces deux thèmes de campagne. « Évidemment qu’il faut un cessez-le-feu immédiat à Gaza, évidemment qu’il faut tout faire pour aider l’Ukraine, mais le quotidien des gens, ce n’est pas cela », a-t-il défendu devant plusieurs journalistes.

L’élu de la Somme, engagé de longue date pour la défense du tissu industriel de son territoire, a toutefois affiché son soutien plein et entier à la liste menée par Manon Aubry au scrutin du 9 juin prochain. « Je soutiens la liste de La France insoumise pour une raison simple : la clarté », a affirmé François Ruffin devant la cinquantaine de salariés et de syndicalistes réunis devant lui, avant de vanter l’opposition totale du groupe de gauche radicale coprésidé par Manon Aubry au Parlement européen à l’ensemble des traités de libre-échange.

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Le soutien de François Ruffin, figure de la gauche et candidat putatif pour la prochaine élection présidentielle, devait à nouveau être mis en scène lundi soir lors d’un meeting commun à Amiens. Les différents discours devaient largement porter sur les conséquences sociales de la désindustrialisation. En ciblant singulièrement la Commission européenne et sa présidente, Ursula von der Leyen, coupables, selon Manon Aubry, d’« organiser notre propre vulnérabilité en construisant un modèle économique dans lequel on est là pour se faire piller par la Chine et par tous les États qui produisent à bas coût et qui tirent les droits des travailleurs et de l’environnement vers le bas ». L’eurodéputée a en outre pris l’engagement lundi après-midi de « ramener » la présidente de la Commission européenne devant les salariés de Metex.

Manon Aubry a précédé la venue de Raphaël Glucksmann, le candidat socialiste crédité de 14 % des intentions de vote, qui se rendra devant l’usine ce mardi avant un meeting pour « présenter (ses) propositions pour une Europe sociale et solidaire ».