Envoyé spécial à Bram (Aude)

«Une gauche populaire et vaillante», a martelé la socialiste Carole Delga aux Rencontres de la gauche organisées ce week-end à Bram dans l’Aude. Depuis trois ans et la naissance de ses ambitions nationales, la présidente de la région Occitanie et de l’association Régions de France a choisi ce village de 3200 habitants pour faire sa rentrée politique, «parce qu’il est au centre de l’Occitanie et que l’Aude est un territoire rural où il y a beaucoup d’angoisse et où le RN monte». Les trois députés de cet ancien département socialiste sont tous du RN désormais. Bram, et le cassoulet du banquet de clôture, est la roche de Solutré de Carole Delga. Le lieu «illustre cette France loin de tout dans la région la plus éloignée de Paris (…) où la pauvreté est élevée depuis longtemps.»

La présidente de région parmi les mieux élus de France a attiré 700 personnes samedi soir au débat sur « l’esprit Charlie aujourd’hui » en présence de Riss, directeur de Charlie Hebdo, et 1800 dimanche matin aux ateliers sur l’action climatique, le travail, l’école, l’immigration, l’Europe… Parmi les invités, Jacques Attali, l’ancien directeur de l’Organisation mondiale du commerce Pascal Lamy, et les députés socialistes Valérie Rabault et Boris Vallaud. L’agora sur la recherche d’une union de la gauche – sans LFI, Manuel Bompard n’est pas venu – a réuni le porte-parole du PCF Ian Brossat, les présidents du PRG Guillaume Lacroix et du MRC Jean-Luc Laurent, et le premier secrétaire délégué du PS Nicolas Mayer-Rossignol, qui s’oppose à l’alliance de la Nupes.

Mais la députée européenne d’Europe Ecologie-Les Verts Karima Delli a annulé sa venue. « Je ne peux pas cautionner le principe de la défense de l’autoroute Toulouse-Castres », a-t-elle écrit à Carole Delga. Après avoir manifesté devant l’Hôtel de région, les opposants à l’autoroute se sont invités à l’atelier sur le climat dimanche. Marion, une agricultrice en grève de la faim, y a même été applaudie. Carole Delga, qui rencontrera les opposants mardi à Paris, a estimé devant la presse que « l’autoroute est la moins mauvaise des solutions (…). Je ne peux pas accepter que des gens se sentent loin de tout. » Le nouveau sénateur communiste Ian Brossat s’est interrogé, lui, sur l’intérêt de l’union de la gauche. « Aux législatives, on a fait l’union et on a collectivement échoué. Et on a en plus de ça 90 députés RN. »

Dans son discours de clôture, prononcé sous un soleil de plomb, Carole Delga a rappelé ses origines modestes et défendu « la gauche du réel », parfois brocardée en « gauche cassoulet », en répétant le mot de Jean Jaurès : « Le courage c’est d’aller à l’idéal et de comprendre le réel ». Rappelant que « rarement dans notre histoire, les Français ont été autant désespérés par la politique », et qu’il y a « 10 millions de pauvres », elle a attaqué la politique gouvernementale. « Climat, pauvreté, eau, qui peut soutenir que le marché seul trouvera des solutions ? Il n’y a que le président de la République pour croire au ruissellement magique. (…) Voilà pourquoi je milite pour un impôt sur la fortune climatique et progressif qui permettrait de récolter 50 milliards d’euros par an ! »

Elle s’en est prise ensuite à l’extrême droite. « Que propose Le Pen si ce n’est ce même libéralisme autoritaire et de monter toujours les uns contre les autres ? » Pour lutter contre « ce sentiment d’abandon » dans les campagnes comme dans les quartiers pauvres, l’élue favorable à l’entreprise a estimé qu’ « il ne sert à rien de stigmatiser les patrons, mais de défendre ceux qui sont loin de tout ». Dans une adresse à LFI, elle a ajouté que « c’est à la gauche de porter ces choix. Pas à la gauche qui braille mais à celle qui travaille, qui cherche des solutions ! »

Carole Delga a ensuite fait des propositions. Sa priorité est l’amélioration de l’éducation. Rappelant que la région Occitanie a fait le choix de subventionner l’ordinateur, les livres et le transport scolaire gratuit, elle a estimé qu’« il faut revenir à la semaine des quatre jours et demi car la France est le pays de l’OCDE où il y a le moins de jours de classe, et où les journées sont trop longues. Il faut arrêter avec les vacances d’été trop longues. ».

Soulignant que la production d’énergie renouvelable a augmenté «de 85 % en Occitanie » depuis son élection en 2016, Carole Delga a déclaré, à l’adresse des Verts, qu’elle « croit à une écologie positive et pas à une décroissance punitive. » Elle a proposé de mettre fin à «l’absurde marché européen de l’électricité» et fait une proposition forte : « Il faut plafonner le prix du gaz grâce à la contribution sur les profits réalisés sur les énergies fossiles. »