Laurent Berger persiste et signe. Faisant fi du recadrage de la première ministre, Élisabeth Borne, qui avait déclaré il y a quelques jours que le secrétaire général de la CDFT n’était pas «dans son rôle de leader syndical quand il parle de crise démocratique», celui-ci a réitéré ses propos dans la matinale de LCI ce mardi. «Oui, nous sommes dans une grave crise démocratique», a argué le syndicaliste, après avoir exprimé son agacement. «Personne ne peut nous assigner un rôle. La CDFT est dans le rôle qu’elle s’assigne elle-même […] Nous ne sommes pas les obligés de la première ministre.»
Le leader syndical soutient que la réforme des retraites reste entachée d’un «vice démocratique», dans la mesure où le «parlement ne s’est pas prononcé sur le vote». Si Laurent Berger assure qu’il répondra à l’appel du gouvernement pour «discuter» des prochains sujets de l’agenda social (travail, partage de la valeur…), il regrette que l’exécutif n’ait pas «souhaité parler avant», et que cette invitation au dialogue intervienne «alors que l’épisode des retraites n’est pas clos.»
Pour l’heure, Laurent Berger confie qu’il n’a pas reçu «l’invitation d’Emmanuel Macron à aller à l’Élysée», et qu’aucun dialogue permanent n’est engagé le ministre du travail Olivier Dussopt. «On n’a pas eu de contacts avec lui depuis plusieurs semaines, sans doute parce qu’on est dans une situation de confit», analyse Laurent Berger.
Le gouvernement, comme l’intersyndicale, est suspendu à la décision du Conseil constitutionnel, qui rendra ses conclusions sur le texte des retraites vendredi. «Le Conseil Constitutionnel est légitime» a tenu à rappeler Laurent Berger. Interrogé sur la poursuite du mouvement en cas de feu vert du Conseil Constitutionnel, Laurent Berger se veut pragmatique : «Il est clair que la CDFT ne fera pas des manifestations pendant six mois sur cette réforme des retraites», a-t-il laissé échapper. «Mais on n’en aura pas fini de l’épisode des retraites» pour autant, prévient le syndicaliste. «Il y a d’autres épisodes, par exemple la mise en œuvre de la réforme, au 1er septembre. Ça va être un vrai bazar, parce que les infrastructures ne sont pas là», alerte Laurent Berger.
En attendant, le leader syndical entend capitaliser sur le succès de la mobilisation contre la réforme des retraites. «Je pense que le syndicalisme a fait la démonstration de sa centralité dans le monde du travail», estime-t-il. «Nous avons enregistré 27 000 adhérents supplémentaires à la CDFT depuis le début de l’année». Le secrétaire général du premier syndicat de France a également annoncé qu’il écrivait un livre consacré un travail, «un impensé politique». L’ouvrage sortira «dans quelques semaines», selon les dires du syndicaliste.
Enfin, Laurent Berger entend user de son influence politico-sociale pour barrer la route au Rassemblement national, dans la perspective des prochaines présidentielles. «C’est mon obsession, a-t-il déclaré. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que ça n’arrive pas, je resterai un militant contre le Front National».