Il n’existe «pas de mesure magique, seule et unique, qui permettrait de débloquer la situation. L’État prendra sa part, nous serons un facilitateur», prévient Élisabeth Borne, la première ministre, qui a présenté ce lundi après-midi les mesures du gouvernement pour soutenir le secteur du logement. L’exécutif a entendu les multiples alertes lancées ces derniers mois par les professionnels du secteur. Si ceux-ci attendaient une mesure forte, capable de faire repartir rapidement la construction neuve, qui conditionne largement la santé de tout le secteur, ils risquent d’être déçus. Le gouvernement estime que la crise est essentiellement conjoncturelle. Et qu’il faut prendre des mesures «le temps que les taux se rééquilibrent», selon Matignon. Pour y parvenir, une action est lancée à tous les niveaux: l’accès à la propriété, le marché de la location, la relance du neuf et le logement social. Le Figaro dévoile les principales mesures de ce plan.

Pour le premier point, le prêt à taux zéro (PTZ) sera prolongé jusqu’en 2027. «Notre premier objectif est de permettre l’accès à un logement pour tous les Français. C’est pourquoi nous allons prendre des mesures pour garantir l’accès aux prêts immobiliers, notamment en assouplissant certaines règles et en prolongeant et transformant le prêt à taux zéro», expose la première ministre. De même, les conditions d’octroi devraient être assouplies, en discussion avec les autorités bancaires. Ce nouveau PTZ fera l’objet d’un recentrage et sera dorénavant dédié à l’acquisition d’un logement neuf en zone tendue (uniquement pour les logements collectifs et non plus pour les pavillons) ou bien pour l’acquisition d’un logement ancien en zone détendue sous condition de réalisation de travaux de rénovation.

Le bail réel solidaire, qui dissocie le foncier du bien immobilier, devrait être étendu. Ce dispositif permet d’accéder à la propriété à des prix 30 à 50% plus faibles que sur le marché. Un pacte de confiance devrait être négocié avec les acteurs du logement social, qui obtiendront plus de moyens financiers. Les plafonds de ressources seront révisés à la hausse afin de permettre à davantage de ménages de pouvoir être éligibles à ce dispositif. Pour le très court terme, CDC Habitat et Action Logement vont être mis à contribution pour acheter aux promoteurs 50.000 logements (17.000 pour le premier et 30.000 pour le second).

En contrepartie, le Pinel, ce dispositif fiscal soutenant les investisseurs particuliers achetant un bien pour le louer, ne sera pas prolongé. C’est un changement majeur dans le paysage du logement en France, qui risque de ne pas être apprécié par les professionnels.

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Depuis plusieurs mois, ils n’ont cessé de tirer la sonnette d’alarme sur la crise qui arrive. En novembre dernier, le gouvernement avait convoqué un Conseil national de la refondation (CNR) consacré au logement. Les craintes portaient alors sur les problèmes structurels du secteur, notamment la difficulté à obtenir des permis de construire et la hausse continue des prix sur une très longue période. Sauf que l’envolée des taux d’intérêt a plongé le logement dans une crise conjoncturelle depuis. Initialement prévues le 9 mai dernier, les conclusions du CNR logement, et les mesures du gouvernement, ont finalement été décalées de près d’un mois. Le temps pour le gouvernement de revoir sa copie. Et de prendre réellement la mesure d’une crise qui pourrait devenir une véritable «bombe sociale», comme le répètent de plus en plus de spécialistes du logement. Cette crise se manifeste sous de nombreux aspects. Tour d’horizon.

La situation est problématique tant dans le neuf que sur le marché de la location. Sur le premier niveau, la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) a publié des chiffres très inquiétants pour le début de l’année. Sur les trois premiers mois, les ventes de logements collectifs se sont effondrées de 34 % par rapport à la même période de l’année précédente. Et la chute atteint 46 % par rapport au premier trimestre 2019. Les acheteurs-habitants sont en très fort recul (- 31 %), mais c’est encore pire du côté des investisseurs (- 52 %). Cette dégringolade du marché du neuf a forcément ses conséquences sur l’activité des professionnels de la construction. La Fédération française du bâtiment (FFB) estime à 100.000 le nombre d’emplois menacés à un horizon de 18 à 24 mois.