Angélique Cauchy a 36 ans, et de son propre aveu, elle ne va mieux «que depuis janvier». En 1999, à l’âge de 12 ans, cette joueuse de tennis en herbe, N.2 française chez les juniors, tombe sous l’emprise de son entraîneur, Andrew Gueddes, au club de Sarcelles (Val-d’Oise). «J’ai été violée près de 400 fois par mon entraîneur de tennis, pendant deux ans», comme elle l’a confié en mai dernier à Franceinfo .
En juillet, une commission d’enquête a été lancée, relative à l’identification «des défaillances de fonctionnement au sein des fédérations de sport, du mouvement sportif et des organismes de gouvernance du monde sportif». Angélique Cauchy a ainsi témoigné devant des députés au Palais Bourbon ce mardi 5 septembre. Calme, voix posée, elle a livré les détails sordides de ce que lui a fait subir Andrew Gueddes, condamné à 18 ans de prison en 2021 pour viols et agressions sexuelles sur quatre jeunes filles âgées de 12 à 17 ans.
«Ça s’est fait en même pas deux ou trois mois, raconte Cauchy. Je lui ai dit : « Non il ne faut pas, ce n’est pas bien. Moi je ne veux pas. » Il m’a dit : « Tu sais, ça arrive souvent dans les relations entraîneur/entraînée.» L’ancienne joueuse de tennis, «tétanisée» lors des actes, se souvient des pensées sombres qui lui traversaient l’esprit : «J’avais un petit carnet avec les autographes des joueurs du PSG, parce que j’allais les voir au Camp des Loges (le centre d’entraînement du PSG, ndlr). Et entre ces feuilles, j’écrivais : « Je n’en peux plus, il faut que ça cesse, je vais faire que tout s’arrête. » J’ai pensé tellement de fois à me suicider.»
Comme de nombreuses autres victimes, Cauchy a été emmenée par son entraîneur à La Baule, d’où était originaire Gueddes. «Cela a été les quinze pires jours de ma vie, dit Cauchy. Il m’a violée trois fois par jour. Le premier soir, il m’a demandé d’aller dans sa chambre et je n’y suis pas allée. Et donc il est venu dans la mienne. Ça a été pire. J’étais prisonnière, je ne pouvais pas partir quand je voulais, et après j’étais obligée de rester dans l’endroit où ça s’était passé.»
Coincée, forcée, la jeune fille qu’elle était s’est résolue à opter pour la moins pire des solutions. «Les soirs d’après, ça paraît fou, mais j’y suis allée de moi-même, et j’ai fait ces treize pas qui me séparaient de sa chambre pour aller me faire violer», poursuit Cauchy. Gueddes est allé jusqu’à lui dire «qu’il avait le Sida» et qu’il lui «avait donné». «J’ai vécu entre 13 et 18 ans en pensant que j’avais le Sida», partage la femme dont un dépistage lui apprendra qu’elle n’a jamais été contaminée.
L’omerta a ainsi perduré pendant des années. «Dans le milieu du tennis, ça se savait qu’il était… pas correct avec les filles, les jeunes filles», développe Angélique Cauchy. Et de rappeler ce qui avait été révélé lors de l’enquête du procès de Gueddes : «Une seule dame était allée voir le président du club en disant qu’il avait un comportement inapproprié envers les jeunes avec violences verbales, physiques, et un comportement ambigu avec certaines joueuses. Le président lui avait répondu : « Oui mais il nous ramène des titres. »»
Le rapport de la commission est attendu pour décembre 2023. D’autres personnes issues du monde sportif, telle que l’ancienne patineuse Sarah Abitbol, elle aussi victime de viols par son ancien entraîneur Gilles Beyer alors qu’elle était mineure, sont attendues pour témoigner.
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