Le tube de l’été prend racine. Longtemps à la lutte pour le maintien la saison dernière, le Stade brestois, modeste 15e budget de Ligue 1, n’était en rien programmé pour tutoyer les sommets du championnat. Et pourtant, c’est en position de troisièmes au classement que les Bretons débarquent au Parc des Princes pour affronter le leader parisien ce dimanche (20h45), en clôture de la 19e journée. Une surprise ? Oui. Mais pas un miracle. «Ils ne sont pas troisièmes par hasard», confirme Luis Enrique, l’entraîneur parisien. Les clés du succès brestois ? Un état d’esprit, de la continuité et une méthode, incarnée par Éric Roy, nommé début 2023, quand Brest était 17e et donc relégable. «C’est un processus long de reconstruction. Il y a un an, l’équipe était capable de faire certaines choses. Aujourd’hui, un peu plus», sourit l’ancien milieu de terrain, qui n’avait plus coaché depuis Nice il y a… 10 ans.
Sa nomination avait d’ailleurs surpris. Elle sonne aujourd’hui comme une évidence. En football, tout va très vite… Roy a d’abord redonné de la solidité et de la confiance à ce groupe qui, aujourd’hui, parvient davantage à montrer ses qualités dans le jeu. «Je n’ai ni recette miracle, ni baguette magique», sourit le natif de Nice, qui dirigera son 44e match à la tête de l’équipe brestoise ce dimanche. Parmi les clés du succès du SB29, il convient de ne pas oublier la qualité des joueurs. Focus sur les tauliers brestois.
Paradoxalement, le portier néerlandais réalise moins de miracles que par le passé. C’est parce qu’il est moins sollicité, grâce à la solidité collective de Brest. Malgré quelques petites erreurs ici et là, Marco Bizot a toujours répondu présent, lui qui est dans sa troisième saison en Bretagne. Et il se montre encore solide depuis le début de la campagne, lui qui a prolongé jusqu’en 2026 l’été dernier. «Je suis très heureux que Marco vienne s’installer dans la continuité avec nous, se réjouissait Éric Roy à l’époque. C’est un grand professionnel, qui a sans cesse envie de progresser. Il est d’humeur égale tout le temps et sa personnalité déteint sur le reste du groupe. C’est une très bonne nouvelle pour le Stade Brestois.» Formé à l’Ajax, international néerlandais (1 sél.) et arrivé fort d’une expérience de plus de 200 matches en D1 néerlandaise et belge, Marco Bizot représente une valeur sûre à 32 ans.
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Pour être très complet, il faudrait citer l’ensemble de la ligne défensive, Kenny Lala, Lilian Brassier et Bradley Locko. Mais le taulier derrière, c’est le capitaine Brendan Chardonnet. À 29 ans, celui qui a disputé son premier match de Ligue 1 au Parc des Princes en 2013, lors de la dernière de David Beckham à Paris, arrive à maturité. Formé chez les Ty’ Zefs, il a connu des moments de doute, comme lorsqu’il manquait de temps de jeu en Ligue 2 et qu’il a dû partir en prêt à Épinal, en National. La vitesse n’est pas sa qualité première, c’est clair. Mais il en a d’autres, dans l’anticipation et le duel par exemple. Breton pur jus, celui qui rêvait d’embrasser une carrière de pompier en étant gamin avait eu le nez creux en janvier 2022, lorsqu’on lui demandait, sur Free Ligue 1, quand Brest jouerait la Ligue des champions : «On se laisse deux ans». Chardonnet explosait aussitôt de rire. C’était une blague. Sauf qu’aujourd’hui, ça ne fait plus rire personne. «Tout est possible», clame-t-il, même si ce n’est pas lui qui risque de prendre la grosse tête.
Longtemps, Pierre Lees-Melou a évolué un cran plus haut, milieu offensif. Avec des hauts et des bas, de Dijon à Nice, en passant par une courte expérience en Angleterre avec Norwich. Désormais reconverti en sentinelle, le trentenaire a trouvé sa voie, sa place, sa vocation. Un peu tard ? Peut-être. «PLM» aura 31 ans en mai. Mais il est désormais comme un poisson dans l’eau, avec souvent Hugo Magnetti et Mahdi Camara un peu plus haut. Une plaque tournante qui n’hésite pas à serrer la vis et à mettre le pied, grattant un nombre incalculable de ballons. Plus qu’une reconversion, c’est une révélation. Dans les notes de L’Équipe, c’est lui qui apparaît en tête de la L1, devant Kylian Mbappé, Achraf Hakimi, Ousmane Dembélé (PSG), Alexander Golovin (Monaco) et Dante (Nice) ! Des performances qui n’ont pas échappé aux recruteurs rennais, qui auraient aimé le débaucher cet hiver. En vain.
Brest a dit non, déclarant son milieu de terrain intransférable après l’avoir récemment prolongé jusqu’en 2027. On a bien senti que l’offre rennaise faisait pourtant tourner la tête de l’intéressé, avec un salaire plus de deux fois supérieur à celui qu’il touche à Francis-Le-Blé qui l’attendait au Roazhon Park. «Rennes ? Ils jouent l’Europe chaque année. C’est un bon club. Tout le monde le sait», lâchait-il avec un sourire qui en disait long le 14 janvier dernier, après la victoire contre Montpellier (2-0). À voir si Lees-Melou parviendra à encaisser le coup, digérer et repartir de plus belle pour la deuxième partie de saison, à l’image de Brassier. «Par rapport à leur investissement, je n’ai pas du tout senti une quelconque démotivation chez eux», promettait encore récemment Éric Roy au sujet de ces deux joueurs.
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Formé à l’OL, prêté à Bourg-en-Bresse et Nîmes puis passé par Rennes, Romain Del Castillo, 27 ans, a mis le temps avant de prendre les clés à Brest. Longtemps gêné par les blessures, le natif de Lyon, recruté en 2021 dans les dernières heures du mercato estival, a tout de suite eu la confiance d’Éric Roy. Le départ de Franck Honorat l’été dernier lui a permis de prendre encore plus d’espace, d’ampleur. Meneur, créateur, finisseur, Del Castillo représente aujourd’hui le joueur clé d’un secteur offensif bien achalandé où tout le monde doit apporter. La preuve dans les statistiques, avec 11 buteurs différents depuis le début de saison, toutes compétitions confondues. Avec ses cinq buts, Del Castillo est le meilleur réalisateur de l’équipe à égalité avec Kamory Doumbia, auteur d’un quadruplé contre Lorient (4-0) fin décembre. Roy peut aussi compter sur Jérémy Le Douaron (4 buts), Mathias Pereira Lage (2) et les avants-centres Steve Mounié et Martín Satriano (3).
Auteur d’un début de saison tonitruant avant un petit coup de mou, Romain Del Castillo retrouve de sa superbe depuis plusieurs semaines. Talentueux. Le leader technique du SB29. Et c’est pour cela qu’Éric Roy ne le lâche pas d’une semelle. «Il a fait un très bon match sur le plan offensif, mais très moyen sur le plan défensif. Je suis dur avec lui mais je pense que deux ou trois fois, il a fait semblant de défendre», grinçait l’ex-coach de Nice après un doublé de son gaucher contre Clermont (3-0), le qualifiant affectueusement de «canaille». Et d’ajouter : «Je suis content de lui mais je ne vais pas le lâcher. Il faut être dur avec les joueurs de talent, sinon, ils s’endorment». Message reçu ?