«Le titre de rookie de l’année est un objectif, bien évidemment». Victor Wembanyama n’est pas du genre à se cacher ou à faire le timide au moment d’évoquer ses ambitions. Il a bien raison. Et cet objectif a été atteint. Auteur d’une saison exceptionnelle, saison achevée avec 21,4 points, 10,6 rebonds, 3,9 passes, 3,6 contres (1er de la NBA) et 1,2 interception (71 matches), l’une des meilleurs dans l’histoire de la NBA pour un joueur de première année, le prodige français de San Antonio a hérité lundi du titre de rookie de l’année. Une première pour un Spur depuis Tim Duncan, en 1998. Première tout court pour un Français. Jusqu’ici, seuls Boris Diaw (MIP en 2006), Tony Parker (MVP des Finales 2007), Joakim Noah (défenseur de l’année en 2014) et Rudy Gobert (défenseur de l’année en 2018, 2019 et 2021) avaient décroché une récompense individuelle, sans parler du All Star Game ou des cinq All-NBA.

Troisième Européen à hériter de cette récompense après l’Espagnol Pau Gasol (2002) et le Slovène Luka Doncic (2019), et successeur de Paolo Banchero (Orlando) au palmarès, «Wemby» s’invite dans ce club fermé des Français lauréats d’un trophée individuel en NBA, lui qui a un temps été en balance avec Chet Holgren (OKC). Un temps seulement. Après la victoire de San Antonio à Oklahoma City (118-132), avec 28 points, 13 rebonds et cinq contres du «Frenchy», fin février, il n’y avait déjà plus de suspense.

Et ce malgré le bilan des Spurs (22v-60d), avant-derniers à l’Ouest. «Une saison réussie, ce serait une saison où se rapprocherait même que de 1% du but final, qui est de remporter un titre», disait l’ancien joueur de Nanterre, l’Asvel et de Boulogne-Levallois au début de la campagne. Il va encore se passer un certain nombre de saisons avant d’imaginer un retour du trophée Larry O’Brien à «Alamo City», c’est assez clair. Jouer le titre, ça prend du temps. Mais les Spurs ont progressé au fil de la saison, c’est indéniable. Et c’est déjà ça. Il y a de l’avenir à San Antonio, qui a tout pour réussir.

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Et Wembanyama a surtout largement répondu aux attentes, même si le principal intéressé, perfectionniste, voit les choses différemment. «C’est peut-être le cas, mais ce n’est pas ce que je ressens parce que j’essaie toujours, chaque jour, de pousser plus fort et d’en faire plus, de réaliser plus d’objectifs, plus de records, plus de victoires. Mais le lendemain, je me dis toujours que je n’ai pas fait assez afin de me pousser encore plus. Donc, ma première impression est que je n’ai dépassé aucune attente, que j’aurais dû faire plus», martelait-il avant l’annonce de sa récompense, lundi, via The Athletic . Et pourtant… Le titre de rookie de l’année était attendu dès le départ, même si Holmgren représentait une menace. On n’imaginait toutefois pas que l’Alien français serait aussi consistant, solide physiquement, qu’il terminerait premier aux contres (254), qu’il égalerait autant de records. Bluffant. La liste de ses accomplissements serait trop fastidieuse à énumérer ici. Notons qu’il a été désigné rookie de l’année à l’unanimité, une première depuis Karl Anthony Towns (Minnesota) lors de la saison 2015-16. Il n’y a pas eu photo.

«Je pense qu’il serait très difficile pour quiconque de répondre aux attentes que la ligue et les fans placent en lui. Je pense que chaque soir, nous avons vu quelque chose de différent et que nous n’avions jamais vu auparavant. Entre mes années de joueur, d’entraîneur et de dirigeant, j’ai regardé 50 ans de basket-ball et chaque soir, je voyais quelque chose de Wemby que je n’avais jamais vu auparavant», savoure RC Buford, heureux CEO de la franchise texane, également pour The Athletic, mettant en outre en avant l’éthique de travail de son prodige, numéro 1 de la Draft 2023 : «Le temps qu’il a consacré à se développer et à entretenir celui de ses coéquipiers était incroyable».

Et ce n’est que le début. On est forcément curieux de voir ce que les Spurs réaliseront lors de l’intersaison, pendant que Victor Wembanyama, 20 ans, sera occupé à viser l’Olympe avec les Bleus (27 juillet-11 août). Après le titre de rookie de l’année et le titre de meilleur contreur de la saison, quels trophées individuels dans le viseur de «Wemby» ? Le géant (2,24m) français fait partie des trois finalistes pour le trophée de meilleur défenseur, avec Bam Adebayo (Miami) et Rudy Gobert (Minnesota). Sauf qu’il n’y a qu’à peine moins de suspense que pour le «Rookie of the year». «Rudy a de très grandes chances de le gagner cette année, et ce serait mérité», a récemment déclaré le natif du Chesnay, ne se faisant guère d’illusion. Et d’ajouter : «Qu’il le gagne maintenant, parce qu’après ce ne sera plus son tour…» Au moins aussi impressionnant défensivement qu’offensivement, Wembanyama est en effet appelé à faire une razzia dans les prochaines années. C’est sûr. Il faudrait tout de même que San Antonio soit un peu moins perméable…

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En continuant sur la même lancée, voire mieux, Victor Wembanyama ne sera sans doute pas loin d’une première sélection pour le All Star Game la saison prochaine. Pourquoi pas le MIP (meilleure progression) ? Avant cela, la liste des cinq All-NBA de la saison 2023-24 sera dévoilée dans les prochaines semaines. Avec le Français ? Pas impossible, et ce serait un sacré honneur. Intégrer l’un des trois cinq All-NBA en tant que rookie, ce n’est arrivé que quatre fois depuis les années 80, Larry Bird (1980, 1er cinq) et Michael Jordan (1985, 2e), puis deux anciens Spurs, David Robinson (1990, 3e) et Tim Duncan (1998, 1er). «Wemby» peut aussi prétendre à une place dans l’un des cinq défensifs, et il sera assurément dans le premier cinq des rookies. Pour le reste, le ciel est la limite : d’ici quelques années, Wembanyama sera un prétendant régulier au titre de MVP. Une chose est sûre : ce n’est que le début pour Victor Wembanyama. L’avenir lui appartient. La NBA, bientôt, aussi ?