Roger Federer n’avait jamais imaginé venir un jour à La Courneuve, en région parisienne. «On a assez vu Versailles, les Champs-Élysées et la tour Eiffel. Ça fait plaisir d’être en dehors et de voir la vraie ville, pas juste les touristes en masse», plaisante le Suisse ce mercredi 22 mai, dans la salle polyvalente de l’école maternelle Louis-Michel.
À quelques dizaines de kilomètres de la Porte d’Auteuil et de Roland-Garros, l’homme aux 20 titres en Grand Chelem a fait le déplacement en Seine-Saint-Denis (93) pour l’inauguration d’un court de tennis, dans le cadre du programme Around the World de son sponsor Uniqlo, série de rencontres internationales sur les thèmes de l’art, du tennis et de la culture.
À 42 ans, le Maestro n’a pas pris une ride, son français non plus. «J’ai joué sur tellement de terrains partout dans le monde, mais un terrain comme ça, pas souvent…», lance-t-il à propos du nouveau court bigarré, dont les couleurs et le design ont été imaginés par l’artiste locale Caroline Derveaux. «Il est fun. Le tennis doit être fun !» Federer va y échanger quelques balles avec des enfants de La Courneuve soutenus par Fête le Mur, une association créée il y a une trentaine d’années par Yannick Noah pour les jeunes des quartiers prioritaires. «Je suis trop content d’être ici, c’est important de redonner quelque chose à la communauté, de jouer avec les enfants, de les motiver à faire du sport et en particulier du tennis», se réjouit le Suisse.
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Mais avant de prendre sa raquette, passage devant les journalistes pour répondre à quelques questions sur sa nouvelle vie d’ambassadeur pour les marques. «La dernière année et demie était super. La roue continue de tourner. Je ne me suis jamais levé aussi tôt, souligne-t-il. J’emmène mes enfants à l’école, je fais ma gym et ma rééducation, je reste en bonne forme. Retraité, c’est un mot qu’on n’aime pas trop dans mon sport !»
Sourire aux lèvres, il confie que «le tennis [lui] manque beaucoup», mais qu’il est en même temps «soulagé de ne plus [s]’entraîner comme un dingo tous les jours». Entre deux tournées promotionnelles, la légende confie profiter de vacances au Vietnam, à Hong Kong, à Dubaï et aux Maldives. Passera-t-il une tête à Roland Garros ? «Je vais revenir un jour oui, comme je l’ai fait à Wimbledon l’année dernière. J’aime bien, parce que je sais que ça fait plaisir aux gens et je peux voir mes amis. Mais en même temps il faut avoir une bonne raison de revenir, sinon tout le monde te dit ‘mais qu’est-ce que tu fous là ?’ (rires)»
Il est l’heure d’aller inaugurer le court, qui jouxte l’école maternelle. Deux tribunes ont été installées de part et d’autre. Le temps des derniers préparatifs et en attendant que la pluie s’interrompe dans le ciel de La Courneuve, Roger Federer reçoit la visite de Gilles Moretton, président de la Fédération française de tennis. Les enfants prennent place sur le court et autour, l’ambiance monte d’un cran. «Merci d’accueillir chaleureusement », commence le speaker. «Federeeer !», crie une fillette depuis les tribunes. «Exactement ! Elle a raison ! Monsieur Roger Federer !». Et l’ancien numéro 1 mondial de faire son entrée comme il en fit des milliers dans sa carrière, sous les acclamations du public.
Les premiers échangent le confirment : le Bâlois n’a rien perdu de ses gestes, de son élégance, de sa décontraction légendaire. Coup droit, revers, service, slice, amorti. «J’y arrive encore, ce n’est pas fini !», lance-t-il à la foule. Le voilà obligé de se baisser pour esquiver un missile. La maladresse de ses jeunes adversaires le fait rire. «Je sens beaucoup de puissance ici.» C’est loin d’être le premier court qu’il inaugure, mais Roger Federer semble apprécier le moment, et l’originalité de ce court multicolore. «J’aimerais voir un peu plus de couleurs dans le tennis, confie-t-il. Notre sport est assez ‘old school’. Il faut des nouvelles méthodes, des nouvelles idées. Si on n’a pas ça, les jeunes vont aller au foot ou dans un autre sport.» Mais nul doute qu’à La Courneuve, la légende a suscité plus d’une vocation pour la petite balle jaune.