Face à des coureurs comme Mathieu van der Poel, Wout Van Aert et Tadej Pogacar, «la marche est haute» pour les Bleus aux JO de Paris cet été, mais «pas inaccessible», souligne le sélectionneur de l’équipe de France de cyclisme sur route, Thomas Voeckler, dans un entretien à l’AFP.

QUESTION: le parcours olympique de la course en ligne le 3 août est taillé pour quel type de coureur?

REPONSE: «On peut affirmer sans trop de crainte qu’il ne convient pas un pur grimpeur. Ce n’est pas non plus une classique ou un Monument de plus. Ce sera une course très atypique. À cause de l’enjeu mais aussi avec le peloton réduit à 90 coureurs. Les grosses nations (qui disposent du quota maximal de quatre coureurs par équipe) auront moins l’avantage parce qu’elles auront moins le surnombre. Il faudra de la vigilance, de l’humilité et de la prise en considération de tous les adversaires.»

Q: une surprise est-elle possible?

R: «Pourquoi pas, mais je pense qu’on retrouvera quand même les costauds devant. On peut imaginer un scénario comme celui des JO de Tokyo. Richard Carapaz n’était pas forcément cité dans les tout premiers favoris et c’est lui qui devient champion olympique, pas (Tadej) Pogacar. Mais Carapaz, c’est un solide quand même. Ça tombe très bien puisque les coureurs français sont plutôt dans ce registre-là que celui d’ultra-favoris. Quand il y a des Van der Poel, des Van Aert et des Pogacar en face, la marche est haute. Mais pas inaccessible.»

Q: quand allez-vous donner votre sélection?

R: «Ce n’est pas validé encore mais vraisemblablement vers le 5 juillet. Il y a forcément des coureurs qui sont déjà sur ma shortlist. Mais aujourd’hui tout n’est pas encore déterminé, loin de là.»

Q: est-ce un avantage ou un inconvénient de courir le Tour de France juste avant les JO, sachant que Julian Alaphilippe n’y participera pas?

R: «Les avis sont partagés. Il n’y a aucune science exacte. Aujourd’hui, avec le degré de maîtrise de l’entraînement, je crois en une préparation hors Tour de France pour un événement comme ça. Maintenant, il y a une recette qui convient à tel ou tel coureur, selon le profil, l’expérience et les capacités d’entraînement. C’est vraiment du cas par cas. Mais il faudra quand même me donner des garanties, ça c’est clair. Je ne me contenterai pas d’un oui, oui je me sens bien .»

Q: quelle sera votre stratégie pour le contre-la-montre du 27 juillet?

R: «Malheureusement on n’aura qu’un seul représentant au départ et il devra, selon le règlement, participer à la course en ligne. Quand je suis entré en fonction en 2019, je croyais dur comme fer d’avoir un médaillable potentiel sur le chrono individuel. Mais je ne vais pas vendre du rêve. Si on regarde les résultats, il n’y a pas de raison qu’on aille chercher une médaille. Sur le chrono, il n’y a pas de surprise. Et pas tellement de stratégie non plus. C’est surtout de la préparation et ça, je ne le maîtrise pas. Ce n’est pas mon job. C’est aux coureurs de se préparer.»

Q: est-ce que vous pourriez du coup renoncer à aligner un spécialiste sur cet exercice afin de privilégier la course en ligne?

R: «J’aurai des choix à faire. Mais, même si la médaille semble inaccessible, je n’ai pas non plus envie d’aller en touriste sur le contre-la-montre pour faire 23e. Je crois aussi beaucoup à la dynamique en équipe de France. Et pour ça, je ne veux pas faire une semaine avec un coureur qui n’est pas spécialiste du chrono. Mais il faudra que le participant au contre-la-montre soit un pilier des quatre coureurs qui seront au départ de la course en ligne. Il devra être capable de jouer en rôle. Chaque coureur représente 25% d’une équipe. C’est énorme.»

Propos recueillis par Jacques KLOPP