Au Stade de France

Ce n’est pas tous les jours que l’Afrique du Sud mord la poussière, quand elle a été dominée physiquement. C’est pourtant le tour de force qu’a réussi l’Irlande, samedi soir au Stade de France, en dominant les Springboks champions du monde (13-8). «C’était un match difficile. C’était physique», a reconnu le deuxième-ligne Eben Etzebeth, ancien joueur du RC Toulon. Un bras de fer étouffant qu’ont perdu les Sud-Africains, en manque de réalisme et d’efficacité face aux perches. Onze points laissés en route, c’est bien trop face à une machine aussi efficace que le XV du Trèfle.

«L’Irlande a trouvé les moyens de nous battre. Nous leur avons concédé des points et nous avons manqué des pénalités, ne pouvait que regretter le sélectionneur Jacques Nienaber. Nous n’avons pas su franchir leur ligne. Nous avons laissé passer des opportunités.» Et de poursuivre : «Nous avons eu des occasions pour marquer des points, et pas uniquement au pied, il y a eu des opportunités dans le jeu, notamment lors de la première mi-temps. En deuxième mi-temps, nous avons encore manqué davantage d’occasions.» Plusieurs temps forts ont ainsi été gâchés à cause de fautes de main, de petites scories.

Plus problématique pour les chantres du défi physique à outrance : les Boks ont perdu la bataille des rucks, un domaine dans lequel ils font généralement régner la terreur. «C’est un secteur dans lequel l’Irlande a joué de façon remarquable ce (samedi) soir. C’est l’une des raisons pour lesquelles nous avons eu du mal à les breaker», concède Jacques Nienaber. Souvent, son équipe a essayé de jouer, d’ouvrir le jeu, comme si elle refusait d’affronter frontalement les Irlandais dans le combat au sol. «Je pense que nous avons manqué de précision, confirme le flanker et capitaine Siya Kolisi. Nous n’avons pas su conserver le ballon et renverser le jeu. Mais les joueurs prennent leurs responsabilités. On espère pouvoir s’améliorer sur ce point-là pour le prochain match.»

Autre problème, plus inquiétant et récurrent depuis le début de la compétition, l’Afrique du Sud ne possède pas de buteur fiable. L’ouvreur Mannie Libbok et le demi de mêlée Faf de Klerk ont laissé en route pas moins de 11 points : trois pénalités et une transformation. Ça passait contre l’Écosse et la Roumanie, pas contre l’Irlande, dans un match au couteau. Après les ratés de Libbok contre l’Écosse, Kolisi était monté au créneau pour défendre son buteur. «Nous sommes une équipe, et parfois tout ne se passe pas comme prévu. Je peux aussi rater des plaquages, mais nous devons avant tout rester une équipe», avait-il avancé. Ce samedi soir, changement de discours. «On veut s’améliorer dans ce secteur, a-t-il reconnu. Aujourd’hui, on n’a pas saisi les occasions et quand on ne saisit pas les occasions, le résultat est ce qu’il est…»

Piqués au vif, les Boks savent qu’ils ne peuvent se reposer sur leurs lauriers. Avant cette Coupe du monde, ils étaient sûrs de leurs forces, alignant des inédits bancs en 7-1 (sept avants, un arrière) lors de la victoire écrasante contre les All Blacks en match de préparation puis ce samedi contre l’Irlande. Au Stade de France, le fameux «bomb squad» (l’équipe de déminage), entré en force dès la 50e minute de jeu, n’a pas eu l’effet escompté. «C’était juste une composition d’équipe. On pensait que c’était la meilleure façon d’être compétitifs ce (samedi) soir. On n’a pas obtenu le résultat escompté mais on a été compétitifs», avance néanmoins le sélectionneur Jacques Nienaber.

La suite est désormais balisée avec un quart de finale qui se profile face au XV de France. «On savait que ce match (contre l’Irlande) serait difficile, avant même le début de la Coupe du monde. Il ne faut pas trop s’appesantir sur une défaite, il faut rebondir et se concentrer sur le prochain match. C’est ce qui est important», martèle le capitaine Siya Kolisi. Il reste d’abord aux Springboks un dernier match de poule contre les Tonga, dimanche prochain (21h) à Marseille. Avant de penser aux Bleus. «On va se concentrer là-dessus maintenant, après viendront les matchs à élimination directe. J’ai hâte d’y être», salive déjà Eben Etzebeth.