Durant les fêtes de fin d’année, la rédaction des sports du Figaro vous livre une série sur les «braqueurs» de l’année sport, ces personnalités ou entités pas forcément attendues et qui ont fait parler en 2023. Ce jour, les propos du patron de Jumbo-Visma lors du Tour de France.
Omloop Het Nieuwsblad, Kuurne-Bruxelles-Kuurne, Tirreno-Adriatico, E3 Saxo Classic, Gent-Wevelgem, Tour d’Italie, Critérium du Dauphiné, Tour de France, Tour d’Espagne…En 2023, Jumbo-Visma a vécu une saison exceptionnelle. Les « Guêpes » ont remporté de nombreux succès de prestige, aussi bien des courses par étapes, et notamment les trois Grands Tours – impressionnant ! –, que des classiques flandriennes du début d’année. Malgré ces résultats incroyables, la formation néerlandaise a énervé la planète cyclisme, acteurs comme suiveurs, et notamment en France. Sans doute, un peu, à cause de son ultra-domination sur certaines épreuves, comme sur le Tour de France et le Tour d’Espagne. Surtout, certainement, à cause de Richard Plugge, son manager.
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Retour en juillet dernier, en plein Tour de France. Au cours d’une interview accordée à L’Équipe , revenant sur les suspicions entourant les performances de Jonas Vingegaard, l’ex-journaliste adresse un tacle (plus ou moins subtil) au cyclisme français, et plus particulièrement à Groupama-FDJ…sans toutefois la désigner clairement. «On regarde aussi autour de nous ce que font les autres. Par exemple, on était avec une équipe française (il s’agit de Groupama-FDJ, ndlr) à notre hôtel durant la journée de repos (lundi, veille du contre-la-montre, ndlr). On voyait des coureurs boire des grandes bières. L’alcool, c’est du poison, et surtout quand vous êtes déjà fatigué, vous allez l’être encore plus», assure-t-il. Avant de poursuivre et d’enfoncer un peu plus le clou : «Au début de la dernière semaine du Tour, qui est la plus importante, il faut faire très attention à ce que vous buvez et mangez. Nous, personne n’a bu d’alcool, car ça vous casse, et même ceux qui ne sont pas coureurs ne devraient pas en boire. Donc c’est tout un ensemble. On peut ouvrir nos portes, répondre à toutes les questions. Mais il faut aussi montrer l’autre côté. Parce que ça explique aussi une partie des différences, pas seulement en notre faveur, mais en défaveur des autres.»
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Ses propos ont (logiquement) fait bondir Marc Madiot, le manager de la formation tricolore : «C’est minable, pitoyable, petit, honteux. Qu’il ferme sa gueule. Qu’il ferme bien sa gueule ! Le jour de repos il y a traditionnellement un pot avec l’encadrement. Le staff a bu des bières. Mais les coureurs seulement des Perrier, a-t-il assuré au Parisien. Le lendemain aucun n’a loupé son chrono. Le surlendemain j’ai quatre gars dans l’échappée. Je ne vais pas m’abaisser à l’appeler. Je suis au-delà de la colère. En plus je suis sûr qu’il m’en veut personnellement car on n’est pas d’accord dans l AIGCP (association internationale groupes cyclistes professionnels). Minable, minable minable…»
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Minable ? Le mot est (peut-être ?) fort. Petit ? Ça l’est, assurément. Avec ses accusations, Richard Plugge reprend à son compte la sempiternelle théorie selon laquelle les équipes françaises travaillent moins, ou moins bien, que leurs homologues étrangères. Il insinue quelque part que la différence de résultats entre sa structure et celles issues de l’Hexagone, et d’ailleurs, se trouve uniquement dans une plus grande implication, un dévouement sans bornes et sans faille de ses coureurs…comme si les éléments défendant les couleurs de formations françaises ne faisaient pas attention à leur plan d’entraînement, leur sommeil, leur alimentation. C’est omettre que les budgets, et donc les moyens, ne sont pas (du tout) les mêmes. C’est aussi, d’une certaine façon, un véritable manque d’élégance, peut-être même de l’arrogance («Nous, on travaille mieux que les autres.»). On attend (bien) autre chose de la part du patron de la meilleure équipe du peloton. On attend aussi (bien) autre chose de la part du président de l’Association internationale des Groupes Cyclistes Professionnels. Pour 2024, on lui souhaite d’avoir un peu plus de classe.