Quatre d’un coup, comme Helmuth Duckadam. Le légendaire gardien moustachu roumain du Steaua Bucarest avait écoeuré le FC Barcelone en finale de la Coupe des clubs champions 1986 (0-0, 2 t.a.b. à 0). Ronwen Williams, le portier des «Bafana-Bafana» (les Garçons), a, lui, crevé l’écran contre les tireurs du Cap-Vert en quarts de finale (0-0, 2 t.a.b. à 1). «Si votre gardien arrête quatre penalties, ce n’est plus de la chance», estime son sélectionneur, Hugo Broos.
C’est de la préparation. «Mon téléphone est rempli de clips de penalties», explique Ronwen Williams, «merci aux analystes vidéos pour ce travail parce que ce n’est pas facile d’avoir des extraits de tous ces joueurs qui évoluent un peu partout dans le monde». Les analystes vidéos de la sélection, dirigés par Sinesipho Mali «rendent mon travail 50% plus facile parce que j’ai une idée de l’endroit où la plupart des joueurs vont tirer», poursuit le gardien des Mamelodi Sundowns, qui joue en équipe nationale derrière quatre défenseurs de son club. Le portier «remercie aussi le coach des gardiens», Grant Johnson, que l’on a vu poings serrés lancer de sonores «Come on!» sur les penalties arrêtés par son protégé.
Capitaine depuis que le défenseur Thulani «Tyson» Hlatshwayo a été écarté après que les Bafana-Bafana ont manqué la qualification pour la précédente CAN en perdant au Soudan (2-0), Williams n’oublie personne dans ses remerciements. Le trophée d’homme du match contre le Cap-Vert «ne signifie rien. Ce qui compte pour moi c’est la façon dont nous avons lutté pendant 120 minutes. Je le reçois au nom des joueurs, du staff technique, de tous ceux qui sont de cette aventure avec nous», dit-il. «Les analystes vidéo font un travail fantastique», abonde Hugo Broos, en course pour une deuxième CAN, après avoir remporté celle de 2017 avec le Cameroun.
Le Belge pourrait rejoindre le Français Hervé Renard, sacré avec la Zambie (2012) et la Côte d’Ivoire (2015). Le coach salue aussi le «très beau travail des analystes vidéo. Ronwen avait l’information, mais ensuite c’est lui qui décide sur l’instant. Et il n’a pas seulement réussi cela, il nous a aussi sauvés à deux minutes de la fin du match quand un joueur arrivait lancé seul», souligne Broos. Williams a alors réussi un arrêt miraculeux dans le temps additionnel, une manchette qui a dévié le ballon sur sa barre. «Je suis simplement heureux d’avoir pu montrer ce que je vaux», commente le nouveau héros des Bafana-Bafana.
Le Sunday Times, le principal quotidien d’Afrique du Sud, a titré sur «Ron-win» (jeu de mot avec win, «gagne») et «Williams (Guillaume) le Conquérant». Ses débuts en sélection ont pourtant été très difficiles, un terrible 5-0 contre le Brésil dans un match amical en mars 2014 (5-0), avec un triplé de Neymar. Il est ensuite resté longtemps dans l’ombre d’Itumeleng Khune (89 sélections), avant de devenir titulaire au tournant des années 2018 et 2019. Né à Port Elizabeth, qu’on appelle désormais Gqeberha, il a franchi un nouveau palier en rejoignant le plus grand club du pays, les Mamelodi Sundowns, vainqueur de la toute nouvelle Africa Super League.
Ronwen Williams, qui a fêté ses 32 ans le 21 janvier le jour de la victoire contre la Namibie (4-0), avait passé douze saisons à SuperSport United, un autre club de Pretoria. Auparavant, il a fait un bref passage pas concluant dans les équipes de jeunes de Tottenham. Le voilà aujourd’hui à deux matches de rejoindre dans la légende André Arendse, le gardien sud-africain champion d’Afrique devant Mandela en 1996…