Accompagné de chants, ou dans un silence respectueux, le cercueil, entouré de fleurs, du grand espoir de l’athlétisme kényan Kelvin Kiptum, mort à 24 ans, a circulé à bord d’un corbillard lors d’une procession dans les rues d’Eldoret, haut lieu de la course à pied dans la vallée du Rift (ouest). Le père et la mère de l’athlète, Samson Cheruiyot et Mary Kangongo, sont arrivés en pleurs près du cercueil, avant le début de la procession. «Mon coeur est toujours aussi lourd. Toute la famille vit un moment (…) triste», a déclaré à l’AFP l’oncle du marathonien, Philip Kiplagat, tout en rendant hommage à un «grand homme, quelqu’un sur qui on peut compter».
Le cercueil de Kiptum a ensuite pris la direction d’Iten, célèbre centre d’entraînement pour les coureurs de fond et demi-fond, où des dizaines de personnes ont signé un livre de condoléances. «Ce que Kelvin a réalisé était extraordinaire. Avoir atteint de tels sommets si jeune est déjà presque unique», a déclaré le président de la Fédération internationale d’athlétisme Sebastian Coe, lui-même ancien athlète, arrivé jeudi à Eldoret pour participer à la cérémonie. Il a également déploré la perte «d’une vie encore extraordinairement jeune». Une messe a ensuite été célébrée à Chepkorio, à une quarantaine de kilomètres d’Eldoret.
Kelvin Kiptum, marié et père de deux enfants, sera enterré vendredi lors de «funérailles nationales» qui auront lieu à Naiberi en présence notamment du président William Ruto et de Sebastian Coe. «Il laisse un grand vide dans l’athlétisme kényan et il faudra du temps pour le combler», déclare à l’AFP le responsable du programme jeunesse à la fédération kényane d’athlétisme, Barnaba Korir. Paul Ouma, cireur de chaussures qui ne travaille pas pour assister à la procession sur deux kilomètres, confie à l’AFP que cette disparition est «très douloureuse». «Nous attendions beaucoup de lui», assure-t-il.
Favori des Jeux olympiques de Paris, Kelvin Kiptum s’est tué dans la nuit du dimanche 11 février au lundi 12 après une sortie de route dans la localité de Kaptagat, dans la vallée du Rift, non loin de son lieu de résidence et d’entraînement. Son entraîneur, le Rwandais Gervais Hakizimana, 36 ans, également à bord, a aussi été tué sur le coup. Selon un médecin légiste, Kelvin Kiptum, dont les analyses toxicologiques sont toujours en cours, est mort à la suite de graves blessures à la tête.
Considéré comme l’étoile montante de l’athlétisme kényan et mondial, Kiptum avait fait une entrée tonitruante dans le monde du marathon en battant lors de sa troisième course officielle, à Chicago en octobre dernier, le record du monde (2 h 00 min 35 sec) détenu par la légende de la discipline, son compatriote Eliud Kipchoge. L’image restera celle d’un athlète élancé (1,78 m, 59 kg), volant d’une foulée puissante sur le bitume de Chicago, accélérant même en deuxième partie de course, là où la plupart des marathoniens de tout niveau fléchissent. Il avait annoncé qu’il allait tenter de devenir le premier homme à courir un marathon officiel sous la barre symbolique des deux heures à Rotterdam le 14 avril.
Kiptum avait commencé à courir régulièrement en 2016. En 2019, il avait réussi deux semi-marathons très rapides en deux semaines (60:48 à Copenhague puis 59:53 à Belfort, France), lorsque Gervais Hakizimana lui avait proposé de le coacher pour le marathon, leur collaboration décollant pendant la pandémie de Covid-19 en 2020. Forçat de l’entraînement, Kiptum courait régulièrement plus de 250 kilomètres par semaine, et parfois plus de 300, des chiffres rares même au très haut niveau, assurait son entraîneur, résident français et coureur de niveau national qui avait rencontré Kiptum pendant ses séjours d’entraînement au Kenya. Hakizimana a été enterré mercredi au Rwanda.